Chapitre 10

401 34 20
                                    

J'étais restée perplexe face à sa remarque, si bien que lorsque nous fûmes de nouveau dans la salle, je m'éclipsai rapidement dans les toilettes. Je fermai la porte derrière moi, m'appuyai contre celle-ci et laissai échapper un lourd soupir. Je tournai mon regard vers le miroir, et fut surprise de me découvrir. Une lueur semblait éclairer mon visage, ayant succédé à la mine monotone que je traînais chaque jour depuis un certain temps. A l'aide de mes poings, je m'appuyai sur les rebords opposés du lavabo. Je ne me reconnaissais plus. La dernière fois que je m'étais observée de la sorte, c'était à ma dernière douche au gymnase. Mon teint était blanchâtre, peu attrayant. Alyssa Laura n'était plus l'adolescente démunie, Loïc Nottet l'avait changé. Mais ce changement s'avérait être le changement qu'il me fallait, pour redevenir comme avant. Des larmes se mirent à rouler sur mes joues, sans que je ne puisse les contrôler. Je me trouvais jolie, pour la première fois depuis longtemps. Tout a basculé grâce à lui et je lui en serai éternellement reconnaissante. Je me rendais compte maintenant, face à mon reflet, combien je tenais à ce garçon. Ôtant le pull noir du haut de mon corps, je le fixai un long moment, puis le collai contre moi pour respirer le parfum de son propriétaire, qui n'avait pas disparu. J'éclatai en sanglots par la suite, m'asseyant contre le mur pour me recroqueviller sur moi-même. Non, je n'étais pas triste, j'étais juste chamboulée. 

Soudain, une voix résonna dans le bâtiment, ce qui me fit brusquement sursauter. 

« Mais c'est pas possible ! Qu'est-ce que j'ai dit sur la façon de retomber après le saut ?! »

Bien qu'il paraissait timide aux premiers abords, Loïc déployait son caractère lorsqu'il connaissait les gens, ou qu'il avait un certain pouvoir d'ordre sur eux. Même si, en aucun cas, il ne se sentait supérieur. 

J'essuyai négligemment mes joues ainsi que le dessous de mes yeux, avant de me relever et de sortir de la pièce. Je rejoignis l'endroit des répétitions et grimaçai légèrement en voyant une blonde à moitié allongée sur le sol, la main agrippée à sa cheville. Elle avait dû chuter. Le jeune belge traversait la scène de long en large, la mâchoire serrée. Le fait que ce soit une danseuse professionnelle devait l'énerver d'autant plus. Il reprit son sang froid et alla s'accroupir près d'elle, laissant son paquet de feuilles sur le sol. 

« Bon, tu vas aller voir un médecin et tu me donnes son diagnostic, pour que je prenne des mesures radicales si nécessaire. Dit-il, en tapotant doucement son dos. »

Elle n'arrêtait pas de s'excuser, tandis que son chorégraphe essayait de la rassurer. J'admirais sa manière de gérer et de dédramatiser les choses, alors qu'au fond de lui, ça l'embêtait vraiment beaucoup. Il suspendit l'entraînement et chargea un danseur de conduire sa collègue à l'hôpital. Les pas lasses et peu enthousiastes firent que la salle se vida moins rapidement que tout à l'heure. Tapis dans l'ombre, je me résignai à sortir de ma cachette quand tout le monde fut partit. Je rejoignis Loïc, assit sur un siège, la tête calée entre ses mains. Je pris place près de lui, et approchai ma main encore tremblante de ses cheveux pour les caresser doucement. Il se redressa pour me regarder, avec des yeux remplis d'impuissance face à la situation. Il m'avait aidé, maintenant, c'était à mon tour. Je glissai timidement ma main dans la sienne, me mettant ensuite à la serrer. Des milliers de frissons envahirent mon être tout entier, je n'avais jamais été autant tactile avec lui. 

« Lo', ça va aller. Il y a toujours une solution. Demandai-je, d'une voix étonnement claire suite à mes pleurs. Peut-être qu'elle sera très vite sur pieds ou sinon, je suis persuadée que des milliers de personnes rêveraient de faire partie de ton équipe. 

-J'ai eu tellement de mal à les trouver, si tu savais. Malheureusement, les personnes de confiance ne se croisent pas à tous les coins de rue.. Soupira-t-il. » 

J'approuvai sa remarque d'un signe de tête, mettant mise à faire des petits mouvements circulaires sur sa paume, ce qui attira son attention. Il reposa cependant ses pupilles émeraudes sur les miennes quelques instants après. Mon rythme cardiaque marqua un déséquilibre. Je contemplai chaque parcelle de son visage angélique, fin et lisse. Mon dieu, il était tellement beau. Je ne savais plus où j'en étais, j'avais l'impression de découvrir des sensations nouvelles. Pour rien au monde, je ne voulais que ce moment s'arrête. 

Au bout d'un certain temps, le brun posa sa main sur ma nuque. Son allure était devenue hésitante, bien qu'il ne le voulait pas vraiment. Il s'approcha d'abord lentement, puis en voyant que je ne montrais aucun mouvement de recul, il fixa son regard sur mes lèvres. J'arrivais de moins en moins à supporter la distance infime qui séparait nos deux bouches, même si pour l'instant, j'étais incapable de faire le premier pas et de combler cet écart. Je passai mon index ainsi que mon majeur sur le début de sa mâchoire, plaçant ensuite ma joue contre la sienne. Rabattant doucement mes paupières vers le bas, j'inspirai et expirai calmement. On avait l'air de deux enfants qui prétendaient être amoureux. Mais moi, est-ce que j'étais amoureuse lui ? Et lui, était-il amoureux de moi ? Tout était tellement confus.. 

Néanmoins, ma réflexion fut de courte durée. En une fraction de seconde, le jeune homme se détacha pour prendre mon visage en coupe et coller ses lèvres sur les miennes. Je ne pus m'empêcher de sourire, tandis que je répondais à son baiser. C'était inespéré, mais il fallait avouer qu'inconsciemment, j'attendais ça depuis les premiers mots que nous avions échangé. 

A un moment, nous fûmes contraint de nous séparer, par manque de souffle. Mon cœur battait la chamade à l'intérieur de ma poitrine, faisant une bonne paire avec ma respiration saccadée. Je relevai son menton d'un pouce, avant de l'embrasser une nouvelle fois. 

J'étais amoureuse de Loïc Nottet. 



HomelessOù les histoires vivent. Découvrez maintenant