Chapitre 11

Depuis le début
                                    

– Un exemple de maturité, dis-donc... On ne va pas se refaire la discussion de la dernière fois quand même ?

– Mais tu ne te rends pas compte que pour moi, venir à son anniversaire avec toute la famille, c'est comme un agneau qui pénètre dans la fosse aux lions ?! Ils vont me réduire en bouillie.

– Pas tout le monde, enfin.

Je ne réponds rien, me prenant la tête entre les mains. J'ai envie de voir mes cousines et ma tante, c'est une certitude, mais est-ce que je suis prête à faire face aux autres pour autant ?

– Ma sœur... ajoute-t-il plus doucement. Je serai là, je te soutiendrai.

– Ah ! Donc tu admets que ça va être un calvaire.

Le silence au bout de la ligne confirme qu'il est à court d'arguments.

– S'il te plaît Charly, fais-le pour moi, lâche-t-il, à défaut de trouver autre chose.

– Pourquoi est-ce que tu y tiens tant, je ne comprends pas !

J'entends d'ici le grattement de ses ongles sur ses doigts, tic qui revient dès que le sujet est abordé. Mon cœur se serre et je comprends immédiatement. Il ne veut pas que je regrette, comme il l'a fait pour ma grand-mère. Même après des années il continue à se ronger au sang de ne pas avoir passé plus de temps avec elle. Mais la relation était tout à fait différente.

– Viens accompagnée si ça peut te rassurer, reprend-il.

– Franchement, qui accepterait de se rendre à cette torture sans y être contraint ?

– Demande à Pauline ou à d'autres amis, mais je t'en prie, ramène-toi.

Je pousse un énorme soupir pour qu'il comprenne bien combien il m'en coûte de dire oui, même au nom de tout l'amour que je lui porte.

– Ok. C'est quand ?

– Merci, Charly ! C'est demain.

– QUOI ? Demain, genre, demain ?!

– Tu avais oublié ?

– Évidemment que j'avais oublié, je m'en fichais, je ne voulais pas y aller !

– Je dois te laisser Charly, je t'envoie tous les détails par texto.

Je ne rétorque rien, m'attendant à ce que la ligne coupe, mais après un petit silence, il ajoute :

– Je t'aime, ma sœur.

– Humpf !

Ma réponse lui convient, car j'entends un doux rire et il raccroche. Je peux compter sur les doigts d'une main le nombre de fois où mon frère m'a dit qu'il m'aimait. Il n'est pas des plus expressifs, mais plus on avance, et plus j'en viens parfois à me demander si on n'était pas destinés à être jumeaux. Je ne l'avais pas forcément réalisé avant, mais il sent ce dont j'ai besoin, quand j'en ai besoin, et ça me fait du bien de savoir qu'il est là.

Je suis toujours tendue, d'autant plus après avoir finalement accepté de me rendre à ce repas familial que j'imagine déjà être désastreux, mais mon cœur est un peu plus léger.

***

Sur le chemin du parc, j'appelle Pauline pour la supplier de m'accompagner, mais elle me répond qu'elle bosse demain et que je vais devoir me débrouiller toute seule, non sans préciser que je ferai mieux de demander à – je cite – « mon coup raté de l'autre soir », alias Betty.

J'aurais vraiment voulu y aller avec ma meilleure amie. Elle connaît les détails de ce qu'il s'est passé avec ma famille, et je sais qu'elle en pince pour mon frère, même si jamais elle ne se l'avouera. Je vais devoir mobiliser des ressources inespérées.

Hating, Craving, FallingOù les histoires vivent. Découvrez maintenant