Chapitre 1 : Forêt obscure

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Je cours, ma respiration est sacadée. J'avale ma salive, puis jette un regard furtif et paniqué derrière moi. Le sol humide et sombre de la forêt est parsemé d'épines de pin et de ronces qui se plantent sous mes pieds à chaque pas.

Il va venir.

Je redouble d'effort et j'accélère. Un tronc foncé me barre la route. Sans réfléchir, j'esquisse une glissade pour passer en dessous. Je réussis sans trop de dommages, seule une branche acérée déchire le tissu de mon pantalon en même temps que ma cuisse. J'ignore la douleur et continue d'avancer.

Soudain, j'entends un bruit de pas lourds me courser. Il se rapproche. Ma respiration s'accélère et des larmes de terreur s'échappent de mes yeux, creusant la boue qui colle à mon visage, et s'infiltrant dans les innombrables plaies probablement infectées. Mes vêtements salis par le sang séché et frais me collent à la peau tant je transpire. Les pas me talonnent à présent, accompagnés du vacarme des branches des arbres qui se brisent sur son passage.

Il arrive.

Je tente de doubler encore une fois mon allure, mais le souffle me manque et mes muscles me font mal à force de courir sans fin. Brutalement, ce qui devait arriver arrive.

Une masse lourde et imposante me percute et je me retrouve projeté sur le sol boueux et ténébreux, tout comme la forêt. Je me retourne vivement, les yeux plein de terreur, suant, angoissant, et à l'agonie de mes diverses blessures. Je ne distingue que la silhouette de mon agresseur. Une masse noire et immense fond sur moi, et un cri plus terrifiant que tout ce que vous pouvez entendre sort de sa gueule. Elle s'ouvre grand, dévoilant quatre rangées de petites dents pointues et dégoulinantes de pus noirâtre. Une langue fourchue siffle et claque contre son palais. Je lève la tête. Deux grands yeux jaunes possédant la pupille des démons m'observent. De ses naseaux sortent un souffle chaud. Son haleine fétide me coupe la respiration. Une grosse patte donc les poils sont rêches et sombres s'écrase sur mon torse, bloquant mon œsophage. Bientôt, les imposantes et aiguisées griffes du monstre me labourent le ventre. J'hurle de douleur, les larmes dégoulinent une fois encore sur mes joues. D'un geste tremblant, j'arrache une branche large mais pointue, et la plante avec rapidité dans la patte de mon agresseur. L'instinct de survie guide mes mouvement hésitants. Ce dernier glapit un son terrible, gueule vers le ciel, avant de retirer sa patte ensanglantée.

Je profite de sa douleur pour reprendre ma folle course. Je me concentre pour ne pas m'évanouir, je sens mon sang donner des pulsions furieuses dans mes tempes. Finalement, la pénombre plus prononcée que d'ordinaire de la nuit m'empêche de voir mon chemin, donc je grimpe en vitesse dans l'arbre le plus proche.

J'escalade les branches, haletant, transpirant, terrifié, me demandant chaque seconde s'il va me retrouver. Je regarde toutes les demi-secondes derrière moi. Une fois hissé sur la plus haute branche que mes forces me permettent d'atteindre, je m'appuie contre le tronc noueux et me permets de souffler un instant. Le froid ambiant de l'endroit me transperce violemment. Je n'avais pas remarqué qu'il faisait si froid, certainement à cause de ma course effrénée contre-la-montre. Je frissonne.

Je replie mes jambes vêtues d'un vulgaire bout de tissu déchiré contre mon corps, et m'enlace le torse, habillé du même accoutrement. Mes cheveux collés les uns sur les autres par le sang séché et la boue tombent en petites mèches sur mon front trempé. Je lève les yeux vers le ciel et tente d'apercevoir le constellations. Je distingue seulement Pégase et le Cygne.

Est-ce que cela signifie qu'il me reste de l'espoir ?

Je regarde finalement la lune. Elle est pleine. Elle rayonne d'une beauté pure qui vide alors ma tête de toutes les horreurs de la journée. Je m'endors sur ce spectacle apaisant.

Demain est un autre jour.


C.O.M.A.Where stories live. Discover now