Je lui ai parlé des bruits, elle a secoué la tête en affirmant que c'était impossible et que personne ne pouvait squatter une chambre condamnée depuis longtemps. Lorsque je lui ai demandé la raison de cette condamnation, elle m'a répondu que la pièce n'était pas isolée thermiquement et qu'il était donc impossible d'y loger quelqu'un. De son anglais archaïque, elle a déclaré :

« Personne n'a jamais vécu dans cette pièce, la clé a disparu avant que l'on achète le bâtiment et nous n'avons pas les moyens de la restaurer. »

J'ai été surpris par le manque d'intérêt de Madame Ana, la gérante, pour cette pièce qui pouvait représenter, une fois restaurée, un client supplémentaire, voire deux pour une chambre double. Peut-être que cet endroit n'avait pas tant de succès auprès des touristes que ça.

Cette vibration a persisté toute la nuit, du moins jusqu'à ce que je m'endorme. J'ai trouvé une pharmacie qui m'a prescrit un « relaxant » qui allait m'aider à dormir mieux et plus facilement et je ne me suis pas fait prier pour en prendre dès que j'ai entendu ce son venir de l'autre chambre. Je ne voulais pas souffrir du manque de sommeil comme le reste de l'année. J'étais venu ici pour me reposer et oublier mes tracas quotidiens. Je n'ai pas encore écrit une ligne de mon livre.

07/05/2014

J'ai ouvert mon carnet ce matin, pensant avoir trouvé l'inspiration. Pourtant, après quelques lignes, je me suis arrêté pour me rendre compte que ce que j'écrivais ne me plaisait vraiment pas. J'ai arraché les pages et les ai jetées. Le carnet est resté ouvert sur la commode, ma plume dessus, vide.

Je me suis baladé sur le Karlův most aujourd'hui. C'était vraiment beau de voir les différents artistes sur ce pont mythique chanter, peindre, jongler. Ils étaient comme moi : ils vivaient de leur passion. J'ai souri cet après-midi.

J'aurais pu passer toute la soirée là-bas, si mon corps pouvait le supporter. Malheureusement pour moi, je sentais la fatigue sur mes épaules. Aussi, après avoir mangé quelque chose, je suis retourné dans ma chambre. J'ai regardé une dernière fois mon cahier avant de me coucher. Cette page blanche m'angoissait. J'ai plongé ma "suite de luxe" dans le noir et me suis couché.

Un toc timide s'est fait entendre de l'autre côté du mur. Je n'ai pas réagi, pensant qu'il s'agissait d'un grincement dû à un client qui empruntait le vieil escalier de l'hôtel. Puis deux battements se sont suivis à travers le mur. j'ai doucement ouvert les yeux et je suis resté silencieux. En me concentrant un peu plus, j'ai finalement pu distinguer le bruit. Un violon, j'entendais le son de quelqu'un qui jouait du violon. Je me suis levé et suis sorti dans le couloir pour tenter d'entendre. Aucune musique ne m'est parvenue, l'hôtel était complètement silencieux. Mais ce qui m'a semblé être un craquement ou un timide « toc » sur la paroi de ma chambre a attiré mon attention. Certes, il a été bref et très bas, mais assez démarqué du silence pour que j'aille me coller au mur. À vrai dire, je commençais plus à être effrayé que curieux mais je persistais, les mains et l'oreille plaquées contre le papier peint. Le violon avait stoppé, mais il a repris quelques secondes après. J'ai reculé et ai saisi la boîte de cachets dans le tiroir de ma table de chevet. J'en ai gobé un, puis je me suis couché une dizaine de minutes plus tard, assommé.

08/05/2014

Le jour suivant, je suis rentré complètement saoul. Ça m'a fait du bien, dans un sens. J'avais réussi à oublier les bruits que j'entendais régulièrement. L'air de Prague ne me convenait pas finalement, je croyais commencer à développer une sorte de folie ou de paranoïa à force de me dire qu'il ne pouvait y avoir personne dans la chambre mitoyenne à la mienne.

Je m'étais fait comprendre du barman de l'hôtel qui m'a servi des doses invraisemblables d'alcools en tout genre. Il me semble même avoir vu un reptile ou un oiseau dans l'une des bouteilles présentées au-dessus du comptoir. Je n'ai pas bu de celle-là.

N'ayez pas peur. [Réécriture]Where stories live. Discover now