Chapitre 15

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 J'entrai dans la salle à manger au centre de laquelle trônait une imposante table en bois sombre recouverte de nombreux mets à l'apparence exquise. Ilyan et Teydros était déjà installés. Je pris place face au triton. Un lutin accourut au moment où je m'étais assise pour remplir mon verre. Je le remerciai puis me tournai vers les deux acolytes qui se disputaient pour savoir qui aurait la plus grande part de tourte. Je réprimai un rire et m'emparai de la part en question. J'en pris une bouchée et je devais avouer que cette tourte était un véritable délice. Les deux amis se tournèrent vers moi avec des yeux ronds. Teydros déclara sous le choc :

« Comment as-tu osé ? La meilleure part de la fameuse tourte du chef Giovani ! »

Je ris en l'entendant se plaindre. Il marmonna quelque chose à propos de triche, de partage et de vengeance ce qui me fit rire encore plus.

Nous restâmes un moment silencieux savourant le festin que le chef et son équipe nous avaient concocté. Puis Ilyan après une gorgée de vin reprit notre conversation de ce matin.

« Demain matin nous serons à Ionad. Nous irons à l'Ambassade du Peuple de l'Eau. Là bas il y aura le nécessaire pour la première étape du plan. »

Je lui lançai un regard interrogateur.

« Quelle première étape ? »

Il fit un grand sourire en répondant à ma question.

« Un bal. Nous sommes invités à un bal.

- Est-ce que tu pourrais développer un peu plus ?

- Le bal en question est organisé par le réseau de contrebande. Enfin, la partie légale de leur réseau. J'ai demandé à la sœur de Teydros de nous trouver des invitations. »

Je jetai un coup d'œil en direction de Teydros. Alors comme ça il avait un sœur. Il m'offrit un large sourire.

« C'est ma sœur jumelle, Ria. »

Il s'adressa ensuite à Ilyan.

« Elle a vraiment galéré pour avoir ces invitations. A cause de toi je lui dois un gros service !»

Rien qu'à l'entendre on comprenait qu'il était très proche de sa sœur. Moi aussi je l'étais.... J'inspirai profondément puis me tournai vers Ilyan, son regard déjà posé sur moi.

« On va faire quoi exactement au bal ? »

Il ne répondit pas tout de suite comme plongé dans ses pensées. Il passa une main dans ses cheveux noirs.

« D'après mes sources, leur vendeur venant de Grian sera présent, ce sera notre chance de le démasquer. Il faudra aussi trouver où est cachée la drogue.»

Je hochai la tête. Ce bal était peut être notre seule occasion de le découvrir. Ilyan finit son verre et nous conseilla d'aller nous reposer. Nous nous levâmes de concert et sortîmes de la salle à manger. Ilyan se rendit dans la salle de réunion et Teydros se dirigea directement vers sa chambre en baillant.

« Bonne nuit, trésor.

- Bonne nuit, Teydros.»

Il entra dans sa chambre. J'allai l'imiter mais au lieu de cela je décidai de me rendre sur le pont. J'ouvris la porte qui menait à l'extérieur. Le froid de la nuit d'automne me couvrit de frissons. Mais je ne retournai pas à l'intérieur au lieu de cela je m'assis en tailleur sur le pont et relevai la tête pour admirer le ciel étoilé. Pas un nuage ne venait le cacher. Tout était calme autour de moi. Je ne voulais pas dormir, je ne pouvais pas. Je n'en avais pas la force, pas ce soir.

Mon esprit glissa lentement dans la culpabilité. Tu m'as abandonnée grande sœur. Oui...je l'avais abandonné. Tout était de ma faute. Si je n'avais pas existé, elle serait encore en vie aujourd'hui. Pas un jour ne passait sans que cette culpabilité ne m'étouffait. Rose...Elle ne quittait jamais vraiment mes pensées. Mais le pire restait la nuit, je la voyais dans mes rêves. C'était toujours le même, je revivais cette fameuse nuit et à chaque fois j'arrivais trop tard pour la sauver. Des larmes coulèrent silencieusement sur mes joues alors que je ne pouvais m'empêcher de revoir son petit corps baignant dans son propre sang. Je les essuyais tant bien que mal comme je l'avais toujours fait ces six dernières années.

Mon regard se posa sur le tatouage à l'intérieur de mon poignet. Un sanglot m'échappa. Ma famille n'était pas la seule à avoir trouvé la mort par ma faute. Mon meilleur ami aussi. Je touchai le renard tatoué sur ma peau m'imaginant qu'il réapparaîtrait, que j'entendrais à nouveau son rire. Mais rien ne se produisit. Évidemment.

Je lançai un regard à la lune, voyant à travers elle la divinité qui m'avait donné ce cadeau empoisonné, cette maudite bénédiction. Je m'allongeai, les bras derrière la tête. Mes pensées dérivaient vers une vie où Lluna ne m'aurait pas donné cette marque, vers une vie normal, une vie avec ma famille. C'était malsain, je le savais mais je ne pouvais m'en empêcher. Je restai quelques minutes, peut être une heure dans ce lourd silence envahi de souvenirs et d'un monde fait de « et si ».

« Tu veux mourir bêtement, humaine ? »

Je sursautai en reconnaissant cette voix envoûtante. Je me rassis rapidement et sans le regarder, lui demandai :

« Qu'est ce que tu fais ici?

- Je regarde une imbécile se laisser mourir de froid. »

Je me retournai vivement. Ilyan était appuyé contre la porte, les bras croisés. Je ne l'avais pas entendu arriver. Depuis combien de temps était-il ici ? M'avait-il vu pleurer ? Je me relevai et le toisai.

« C'est moi que tu traites d'imbécile ? Je te rappelle que tu n'es pas beaucoup plus couvert que moi. »

La pleine lune éclairait son visage et je pus voir un sourire narquois s'épanouir sur ce dernier. Qu'est ce que j'avais envie de lui en mettre une, écraser son nez sans défauts et effacer ce petit sourire.

« Les elfes ont une bien meilleure tolérance au froid que les humains. »

Je répliquai :

« Oh oui pauvre petite humaine que je suis.»

Je me tus lorsqu'il quitta sa position et se rapprocha lentement, s'arrêtant à un pas de moi. Il prit mon menton et releva ma tête me forçant ainsi à croiser son regard violet dans lequel brillait une lueur prédatrice. J'attrapai sa main qui tenait mon menton et la retirai. J'approchai ma bouche de son oreille et chuchotai :

« Mais saches que je peux te tuer à n'importe quel moment. »

Son regard s'abaissa vers son torse sur lequel j'appuyai un de mes poignards. Il sourit, une drôle de lueur dans le regard.

« Tu veux jouer, espionne?»

Je souris à mon tour. Mon arme toujours pointait sur son cœur. Sans me lâcher du regard, il sortit à la vitesse de l'éclair une lame qu'il posa sur mon cou. Il se pencha à son tour à mon oreille et susurra :

« Alors jouons. »

Mon souffle se saccada. Ma peau se couvrit de frissons qui n'avaient rien à voir avec le froid. Mes mains tenant le poignard tremblaient légèrement. Son odeur m'enivrait, un mélange d'épices et de sapin. Il ne me quittait pas des yeux. Il finit par retirer son arme de mon cou et j'abaissai également la mienne. Il sourit légèrement.

« Tu peux me tuer tout comme je peux te tuer. Mais avoue que ce serait dommage. »

Et sur ces mots, il repartit à l'intérieur me laissant seule sur le pont, le cœur battant anormalement vite.  

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Hellooo,

La première étape de la mission se dessine pour Aeryn et ses compagnons. Ionad n'est plus très loin, mais que découvriront ils lors de ce fameux bal?

J'espère que ce chapitre vous a plus. On se retrouve la semaine prochaine pour le chapitre 16.

Sincèrement,

leammf

The Blood Tears of RevengeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant