Chapitre 7 : parasite

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          Edith fixait le plafond de sa chambre, dos contre la couette de son lit, mains sur son ventre. Les rideaux en lin blanc laissaient entrer un filet de lumière solaire qui léchait ses pieds nus. Le beau temps était revenu et son chat avec. L'animal dormait comme un donut sur le radiateur. Son corps montait et descendait au rythme de sa respiration calme. Décidément, il avait trouvé son perchoir celui-là. Il avait établi propriété sur le radiateur ! Edith sourit en voyant le matou paisible. Il était extrêmement mignon. Valait-il mieux le garder et déménager ou bien le faire adopter ? Et cette promotion ! Agent secret ? Elle ? Et ce salaire qui doublerait... Elle avait besoin de réfléchir.

« Je pourrais faire un footing » pensa-t-elle en regardant sa montre : huit heures. À trois mètres sur sa gauche, dormait sur le canapé Juliette en position fœtale. Elle semblait toute petite. Edith soupira.

« Quelque chose cloche... » marmonna-t-elle.

« Ne te mêle pas de ce qui ne te regarde pas Edith. » grogna son reflet comme s'il venait d'émerger du sommeil. « Tu as accepté qu'elle dorme ici, c'est déjà suffisant. » ajouta-t-il.

Un sourire se dessina sur les lèvres de la jeune femme. Ne pas le voir était frustrant ! C'était comme parler au téléphone : il fallait deviner ses expressions. « Toujours sur la défensive toi » répondit-elle à voix basse pour ne pas réveiller Juliette.

« Avec toi... Il faut bien. »

Edith roula des yeux. La présence de son reflet, Gustave, se fit plus lointaine. Il devait sûrement être parti dans la cuisine. Le chat se réveilla en sursaut. Ses oreilles plaquées contre son crâne signifiaient qu'il était sur ses gardes.

Soudain, une migraine tirailla l'esprit de la jeune femme. Elle posa la paume de sa main droite sur son front. « Je n'ai pas encore pris mon médicament... Bizarre que l'effet se ressente si vite... Il n'y a personne d'autre que Gustave et Juliette. » pensa-t-elle en fronçant les sourcils. Le chat blanc bondit du lit et disparut souplement dans la cuisine.

Elle laissa tomber son œil sur la jeune endormie. Et si... ?

Une douleur aiguë transperça de part et d'autre la tête d'Edith.

« Alors tu m'entends ? » fit une voix rocailleuse.

Elle ouvrit de grands yeux. Le reflet de Juliette lui parlait.

Celle-ci ne semblait pas en être consciente, plongée dans un sommeil profond, elle ne bougeait pas d'un millimètre. À défaut de ne pouvoir distinguer visuellement les reflets, Edith pouvait les entendre, à moins d'ingurgiter son médicament quotidien. Elle se redressa lentement, plia ses jambes en tailleur et balaya la pièce des yeux, toujours sur son lit.

En face, le salon. Son mur gauche était en partie caché par le canapé miteux. Puis au fond, la porte d'entrée fermée à clé. Derrière la salle de bain, sur la droite, la cuisine faisait face au canapé. Enfin, à sa droite, son bureau donnait sur la fenêtre aux rideaux en lin. Tout semblait paisible.

Edith prit cependant peur. Lorsqu'un reflet entrait en contact avec quelqu'un et que son hôte n'en était pas conscient, c'est qu'il exerçait sur lui un certain contrôle. Juliette dormait parce que son reflet la condamnait aux bras de Morphée.

La jeune femme se mordit la lèvre.

« Je sais que tu m'entends... Réponds-moi. » insista le parasite d'une voix plus proche.

Le cœur d'Edith s'accéléra. Gustave avait raison, elle n'aurait pas dû laisser dormir une inconnue ici quand bien même elle était la sœur de sa collègue. Le reflet la regardait peut-être du canapé ? De la fenêtre à sa droite ? Devant son nez ?

Le Souffle de Nos RefletsWhere stories live. Discover now