Recette 20 - Arrêter les surprises

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Lorsque nous arrivons au restaurant, le hall est un vrai champ de bataille.

Et les vampires ne sont plus là.

Des verres brisés gisent au sol, les nappes sont tachetées de sang et, grosso modo, toute l'argenterie y est passé. Des serveurs, des cuisiniers et même des surnaturels que je ne connais pas, probablement des amis de mes employés, s'attèlent à nettoyer l'intégralité du restaurant.

Lydia accoure vers nous. J'ai comme réflexe de vérifier l'état des teintures et des anges peints aux murs et aux plafonds de peur qu'ils soient abîmés. Ce serait tout mon salaire qui y passerait. Je n'ai jamais été matériel alors, à vrai dire, je n'ai que faire de ces ornements superflus. Je n'ai tout simplement pas les moyens, financiers ou matériels, de refaire en quelques jours ce que d'autres ont pris des mois à réaliser.

Ma serveuse a les cheveux en bataille, les traits tirés et fatigués et on sens à son attitude qu'elle a dû user de sa magie pour calmer le conflit qui a ravagé les lieux. Je cherche Alex du regard, en vain. Owen, probablement par gentillesse, s'agenouille et tente de ramasser les bouts de verres.

— Ce n'est pas la peine, lui murmuré-je.

Je lui pose une main sur l'épaule pour qu'il se relève.

— Qu'es qui s'est passé ? demandé-je à Lydia une fois le loup à notre hauteur.

— Tout se passait bien, même après que vous soyez partis. Les plats s'enchaînaient, les vampires appréciaient et ils n'avaient même pas l'air de remarquer votre absence. Et en quelques minutes, sans que personne ne puisse comprendre son attitude, Alex a perdu les pédales. Il a commencé à jouer au chef, à s'énerver contre la brigade, à s'agacer envers les serveurs. J'ai tentais de le canaliser sans aucun succès.

— D'accord, où est il maintenant ? Qu'es qui l'a poussé à se transformer ?

Je m'avance pour partir à la recherche d'Alex, mais Lydia m'arrête.

— Je n'ai pas terminé. Même si la brigade était énervée, tous le monde a su faire abstraction des injures de Alex. Sauf que, tout à coup, il a attaqué les vampires.

— Sans aucune raison ? demande Owen derrière moi.

Lydia hoche la tête.

— Nous avons tout tenté. J'ai utilisé ma magie, beaucoup de loups se sont transformés, et les vampires ont visiblement compris que nous ne souhaitions pas la situation. Mais ils ont étaient obligés de se défendre, car ton ami devenait comme fou.

Je vois rouge. Qu'est-ce qui a poussé Alex à faire une chose pareille ?! Il sait pourtant que cet événement était important pour moi, et qu'il a probablement ruiné ma carrière.

— Je veux le voir, exigé-je.

— Nous ne savons pas où il se trouve, c'est ça le soucis. Nous avons pourtant tenté de le retenir, de le coincer quelque part en attendant que vous reveniez. Mais il était trop fort pour nous. C'est comme si il avait pour but de tuer quelqu'un.

— Et pourquoi tu ne m'as informé que de la transformation d'Alex ?

— Tout s'est passé très vite. Le temps que vous arriviez, il a attaqué les vampires, blessé la brigade, et s'est enfuit par l'arrière cours.

— Nous nous occuperons de son cas plus tard. En attendant, je veux savoir comment vous allez.

— Moi ça va. La plupart n'ont que des blessures superficielles.

***

Après une heure de rangement, de soin et d'organisation, le restaurant est de nouveau présentable. J'ai passé bon nombre de coups de fil, mais personne en ville n'a aperçu Alex.
Des questions me torturent l'esprit. Pourquoi ?
J'ai surtout l'impression que le monde entier se lie contre moi et que mes plus fidèles alliés voient soudain en moi un ennemi mortel.

La journée a été longue. Trop longue. J'ordonne à tous de rentrer chez eux et ferme les portes du restaurant avec Owen.

— Tu as une idée de pourquoi il aurait fait ça ? me demande mon commis, assis sur une chaise.

Je secoue vivement la tête.

— Aucune idée. Il a peut-être perdu le contrôle. Après tout, il y avait beaucoup de surnaturels dans la salle à ce moment là, et Alex ne côtoie quasiment que des loups. Toutes ces odeurs, ces bruits... Ça a du le faire vriller.

— Il y a un truc qui cloche, tu t'en rends bien compte ? Nous partons pour délivré Adonis des griffes de ta sœur et, comme par hasard, en simultané, Alex perd mystérieusement le contrôle ? Quelque chose se joue, Adonis avait raison. Tu dois découvrir ce que c'est avant qu'il ne soit trop tard, Aela.

— Et comment voudrais tu que je fasses ? Je ne suis qu'une louve qui cuisine, je ne suis pas une enquêtrice de renom. J'ai essayé, et tu as vu où ça a mené ? Je voudrais juste arrêter les surprises, que tout redevienne normal.

Owen se lève et se dirige vers moi, avant de prendre mes mains dans les siennes. Ses yeux couleur chocolat ( qui me donnent toujours aussi faim ) me scrutent, me donnent des papillons dans le ventre. Est ce possible de tomber sous le charme d'un regard ?
Son chignon totalement défait laisse ses longs cheveux ondulés flotter sur ses épaules.

— C'est bien toi qui m'a dit que le quotidien d'un loup était toujours à cent à l'heure. Ta vie n'est pas normale. Mais elle deviendra probablement catastrophique, comme celle de beaucoup de surnaturels car je suis sur que ta sœur ne va pas s'arrêter là, si nous ne faisons rien.

— Nous ? Tu comptes me suivre combien de temps encore ? lui dis-je avec un sourire.

— Ça n'a pas l'air de te déranger, réplique t'il en rigolant.

Il a raison. Je dois découvrir ce qui se cache, ce qui se passe dans l'esprit tordu de ma sœur. Il est hors de question que je la laisse détruire l'harmonie de la meute, ou qu'elle mette à feu et à sang Paris.

— Je me disais que... tu pourrais venir passer les fêtes de Noël chez mes parents. Ils ont une grande maison. Je sais qu'à Paris cela paraît incroyable, et que par dessus ça, ma demande est un peu insensé. Mais tu pourrais souffler un peu, et j'ai conscience que la situation avec tes parents ne s'arrangera pas tant que Maïwenn sera alpha.

— Tu veux la détrôner ?

— À force de te suivre un peu partout, je commence à croire qu'elle n'est pas bénéfique pour les Angers. N'est ce pas ?

— Non, elle ne l'est pas, soupiré-je.

— Alors c'est un oui ?

— À une condition.

— Laquelle ?

— J'adore le chocolat... Tu pourrais faire une bûche de Noël ? Je n'arrive jamais à les réaliser, c'est mon plus gros défaut.

Il me fait un clin d'œil.

— Aucun problème. Et je t'apprendrais.

Pour une fois depuis que je connais Owen, je me dis qu'il peut être un atout. Voir un ami.

Meute, Louche et Calamité Where stories live. Discover now