Il la regarda et son regard azur sembla transpercer son âme. Son cœur venait de rater un battement, et pourtant, elle se sentait plus vivante que jamais.
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Dimanche 13 novembre – Sao Paulo
Sa respiration est courte, saccadée. Ses mains tremblent. Sa gorge est nouée. Son estomac est serré. Impossible de trouver un point d'ancrage. Ni la paroi froide contre son dos nu, ni ses ongles plantés dans la paume de sa main, ni l'odeur des pneumatiques chauds, ni le son des voitures qui tournent encore sur le circuit ne lui permettent de remonter à la surface. Louca a l'impression de se noyer. Les larmes dévalent ses joues sans qu'elle ne puisse rien contrôler. La seule chose qu'elle a réussi à faire, c'est s'éloigner de Paul et des autres journalistes avant que l'angoisse ne la submerge complètement. Cette angoisse sournoise, mais qu'elle sait identifier. Surtout pendant ces week-ends de course. Cette angoisse qui la réveille au petit matin, le samedi, et qui ne fait que s'amplifier pendant ces deux jours. Cette angoisse que Louca pense maîtriser. Mais pas aujourd'hui. Ni aucun autre jour en réalité. Cette angoisse de voir quelque chose arriver à Pierre. Cette angoisse qui s'est concrétisée il y a quelques minutes alors que le normand a perdu le contrôle de sa voiture et a rencontré une barrière de sécurité. Elle l'a vu repartir, elle a entendu la radio qui confirmait que tout allait bien, et après un changement d'aileron, elle l'a vu reprendre la course, presque comme si de rien n'était. Mais son cerveau n'enregistre pas l'information et préfère se repasser en boucle le moment où les angoisses de Louca sont devenues sa réalité. Paul la rejoint une vingtaine de minutes plus tard, alors que la course se termine. La journaliste est toujours prostrée dans un coin du paddock réservé à la presse. L'agitation autour d'elle ne semble pas la sortir de son état d'angoisse, et c'est seulement lorsque la main de Paul se pose sur son bras, qu'elle relève la tête.
- Louca, ça va ? demande Paul d'une voix inquiète - Oui, oui, répond-elle la voix étranglée - Il va bien, il a terminé la course sans problème, enchaîne-t-il en cherchant la brune du regard - Ok, merci, répond-elle en évitant les yeux de Paul - Est-ce que tu veux que j'aille le chercher ? chuchote le journaliste - Non ! Non, surtout pas ! s'exclame Louca en regardant enfin son ami - T'es sûre ? continue Paul en fronçant les sourcils - Oui, ça va, je me sens mieux, t'inquiètes.
Louca commence à se relever difficilement sous le regard de Paul qui lui tend une main pour l'aider à se redresser. Lorsqu'elle saisit sa main, il peut sentir que tout son corps tremble.
- Tu devrais vraiment lui en parler Louca, reprend le journaliste à voix basse - Ça ne servirait à rien, répond la brune en haussant les épaules puis en s'éloignant pour aller prendre une bouteille d'eau, décidée à conclure cette conversation
Elle sait que Paul pense bien faire en lui conseillant de parler de ses angoisses avec Pierre, mais elle ne voit pas à quoi bon. Le pilote tenterait de la rassurer, de lui expliquer qu'il sait ce qu'il fait, qu'il maîtrise la situation. Et Louca n'en croirait pas un mot. C'est impossible pour lui de tout avoir sous contrôle, et cette course en est bien la preuve. Un long soupir s'échappe de la bouche de la parisienne après avoir bu une gorgée d'eau. Elle doit absolument se reprendre pour pouvoir finir leur journée, qui n'est finalement qu'à peine entamée, puisque les deux journalistes doivent encore se rendre en zone d'interview, puis boucler leurs articles.
