Chapitre 32

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Miss Parker

Nous étions tous deux privés de sommeil, une évidence incontestable. J'avais tendu une perche à Jarod, qui avait pris la parole avant même que je puisse intervenir. Sa proximité m'envahissait toujours d'un trouble palpable, et je craignais que cela ne se lise sur mon visage. Il parlait abondamment, peut-être était-ce sa façon de dissimuler ses émotions, son mal-être, ou bien autre chose encore ? Mon regard s'était tourné vers lui, scrutant chaque détail avec une intensité particulière. J'avais moi aussi parlé, peut-être même un peu trop... Il exerçait sur moi ce pouvoir que j'avais oublié : celui de libérer ma parole.


Depuis notre enfance, en sa compagnie, je me sentais libre de dire tout ce qui me traversait l'esprit sans craindre le jugement. Et une fois de plus, j'avais osé me risquer à cette vérité, même si désormais j'étais une adulte consciente du poids et des conséquences que peuvent avoir des paroles ou des actes impulsifs. Une adulte qui savait les risques encourus en désobéissant aux directives du Centre. Une adulte qui, bien qu'elle ne soit pas enchaînée et puisse se déplacer à sa guise à l'extérieur, demeurait tout aussi captive du Centre que les caméléons.


Si je voulais recouvrer ma liberté, je devais honorer ma part du contrat : retrouver les caméléons fugitifs, Jarod, Kassandra et tant d'autres. Pourtant, ma conscience se manifestait à nouveau, ou peut-être avais-je été trop faible ce soir-là en lui permettant de s'exprimer plus que de raison, et cela tourmentait désormais mon esprit. J'étais incapable de la contenir pour l'instant. Tout ce que je percevais, c'était le regard de Jarod, deux perles étincelantes et profondes qui me fixaient avec une intensité telle que je souhaitais m'y noyer.


Soudain, sa main se posa sur ma joue, me faisant fermer les yeux tandis que ses mots résonnaient en moi... Il ne voulait pas oublier ce que je venais de dire. J'en étais consciente. Après tout, on ne peut pas effacer les mots sur commande, et lui, avec son esprit prodigieux... Puis, il m'embrassa inopinément. Par réflexe, j'ouvris les yeux, pour les refermer aussitôt, prolongeant tendrement ce baiser. Une fois de plus, le contact fut interrompu, et je plongeai mon regard dans le sien, mes yeux scintillant d'une nouvelle intensité.


« — Moi aussi, j'ai envie de toi », soufflai-je d'une voix feutrée, avant que son visage ne se niche dans mon cou. Je fermai les yeux, savourant le contact de ses lèvres caressant ma peau. Il retira délicatement le plaid qui nous couvrait. Alors, sans prévenir, je passai ma jambe gauche au-dessus de sa hanche, l'attirant davantage vers moi. Ma main libre se glissa le long de son flanc, effleurant sa peau avec une tendresse avide.


« — Es-tu sûr cette fois-ci ? » osai-je demander, désireuse de m'assurer, afin d'éviter toute nouvelle frustration. Je me connaissais trop bien pour supporter cela.


« — Allons-nous, nous laisser aller sans réfléchir ? Est-ce que tu le veux aussi ? » ajoutai-je d'une voix douce, alors que ma main s'approchait dangereusement de son entrejambe, cherchant une réponse avant de m'aventurer plus loin.


En pleine tempêteWhere stories live. Discover now