Chapitre 30

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Miss Parker

Que dire, sinon que cette situation était chaotique, digne d'un cauchemar sans fin ? C'était pourtant la réalité, malgré ma tête lourde et tournante. Je me sentais comme plongée dans un tourbillon de confusion, où la frontière entre la réalité et un rêve étrange s'effaçait peu à peu. Allongée au sol dans un chalet rustique, la chaleur du feu de cheminée embrasait la pièce, répandant une lueur dansante sur les murs. Sous un plaid miteux, j'étais là, sans défense, dans les bras de Jarod, cherchant un réconfort dans cette proximité. Pourtant, cette proximité était paradoxale, car Jarod était l'homme que j'avais pour mission, depuis un an, de ramener au Centre.

Je soufflai en silence, le tumulte de mes pensées se mêlant à la furie de la tempête qui faisait rage à l'extérieur. Chacun de mes sentiments se battait en moi, comme des éclairs zébrant le ciel assombri. Il m'était impossible de trouver le repos. Mon esprit était déchiré entre mon devoir envers le Centre qui, ironiquement, semblait de plus en plus éloigné, et mon désir grandissant pour cet homme qui m'apparaissait sous un jour nouveau. Tout en moi était en ébullition, tandis que ma conscience semblait renaître de ses cendres.

Mes yeux, fatigués et embués, se fixaient sur le spectacle hypnotique des flammes dans la cheminée. Les nuances dansantes de l'incandescence reflétaient l'intensité de mes émotions tourmentées. Perdue dans cet univers enflammé, ma tête reposait sur le bras du caméléon, lui-même posé sur le parquet rude, inconfortable pour nos dos meurtris. C'était un moment à la fois réconfortant et troublant, une dichotomie palpable entre le besoin de réchauffement physique et l'instabilité émotionnelle qui me submergeait. Je me demandais, avec une pointe de déraison, si ce feu crépitant pourrait apaiser l'incendie intérieur qui ravageait mon être.

« Bordel, qu'est-ce qui m'arrive ? », pensai-je, déconcertée par l'ampleur de mes sentiments, par les mots que Jarod avait prononcés et qui résonnaient en moi bien plus profondément que je ne l'aurais voulu, bien plus que je n'aurais pu l'admettre. Sentant une larme rouler sur ma joue, je la chassai rapidement du revers de mon épaule.

« — Tu... tu parles toujours autant ? », parvins-je à articuler d'une voix rauque, étouffée par l'émotion qui m'enlaçait.


Je me raclai la gorge, m'efforçant de reprendre contenance, tout en me retournant doucement pour ne pas tordre le bras de Jarod à cause des menottes qui nous liaient.


« — Tu crois que je n'éprouve rien ? Tu crois que c'est facile et que je vis dans l'harmonie la plus totale ? »


Je plongeai mon regard dans le sien, cherchant des réponses, tandis que la couleur bleue de mes yeux semblait s'estomper pour se muer en une teinte grise, reflet de la confusion qui régnait en moi.


« — C'est loin d'être simple, Jarod. J'ai beau prétendre le contraire, je n'ai pas oublié notre enfance commune, ces semaines passées ensemble. Tu crois que ça m'a fait du bien d'apprendre que je devais te retrouver pour te ramener là-bas ? Mais je n'ai pas eu le choix, et je n'ai pas pu non plus faire autrement que de faire abstraction de mes émotions, parce que sinon, j'étais finie. Tu penses qu'on peut dire non au Centre, à Raines, à la Tour ? C'est loin d'être aussi facile. Et l'on ne démissionne pas comme ça. »


Mon cœur se serrait dans ma poitrine, ses battements rapides résonnant comme un tambour sourd dans mes oreilles. « Fait chier bordel, qu'est-ce qu'il me fait dire ! », m'exclamai-je intérieurement, déstabilisée par mes propres paroles, laissant entrevoir la vulnérabilité que je m'étais efforcée de cacher.


« — Oublie, d'accord ? Oublie ce que j'ai dit. »


Avec l'aube naissante, les choses devraient reprendre leur cours normal, du moins je l'espérais ardemment. Il le fallait... Il ne pouvait en être autrement... Si je laissais Jarod s'échapper, les conséquences pourraient être dévastatrices. J'étais terrifiée à l'idée de ce qui pourrait arriver. Mais n'avais-je pas également peur pour lui ? Pouvais-je encore prétendre ne pas me soucier de son sort ?




En pleine tempêteWhere stories live. Discover now