Chapitre 25

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Jarod 

J'étais complètement perdu, plus que jamais auparavant, et le souvenir de ma conversation désordonnée avec Kassandra ne faisait qu'empirer les choses. J'étais au milieu d'une tempête violente, les éléments déchaînés tourbillonnaient autour de moi, me laissant désarmé et vulnérable, tel un naufragé abandonné en pleine mer. Les éclairs zébraient le ciel sombre, soulignant l'intensité de mes émotions tourmentées.


Je me sentais nu, exposé aux tourments de mes propres émotions. Mais j'étais là, en présence de celle envers qui je ne devais ressentir rien d'autre qu'une profonde aversion. Cependant, il semblait que le destin avait d'autres plans, car elle était devenue celle dont l'unique but était de m'arracher ma liberté. Ironie du sort, je cherchais désespérément à la déshumaniser, à la réduire à une entité impersonnelle. Mais mes efforts étaient vains, car je connaissais cette personne bien trop intimement. Je savais pertinemment que j'étais incapable de lui vouer une haine profonde, en dépit de notre appartenance à des camps opposés.


Mais pourquoi était-ce si difficile de faire un choix ? Pourquoi ne pouvais-je tout simplement pas me laisser aller, sans me soucier des conséquences ? Pourquoi devais-je analyser chaque situation, chercher à les comprendre, à les décoder, à les appréhender ? Parfois, je me reprochais ma grande intelligence, car elle me rendait vulnérable et impuissant face à ces questions existentielles. Oui, j'étais démuni, même si je m'accrochais encore naïvement à l'espoir, tel un naufragé agrippé aux branches d'un arbre, essayant de se maintenir à flot. Bien que, pour l'instant, je demeurais incapable de comprendre pourquoi il fallait utiliser cette métaphore pour signifier simplement que nous faisions de notre mieux.


Tu te poses trop de questions inutiles, Jarod ! Par moments, j'aurais tellement voulu pouvoir mettre mon cerveau sur « off », particulièrement dans de telles situations.


« — Oui, je laisse faire ! » réussis-je à articuler avec force, alors que jamais auparavant je n'avais ressenti un désir aussi puissant pour quelqu'un. C'était incontrôlable, irrationnel, peut-être même abstrait, tout autant que la scène qui se déroulait sous mes yeux et mon attitude déconcertante. Étais-je réellement en proie à la jalousie ?


« — Une femme aussi belle que toi... » commençai-je, avant de me rendre compte que la situation était bien plus complexe pour elle. J'avais inconsciemment évité de répondre à sa question, alors qu'à l'extérieur, un éclair déchira à nouveau l'horizon, illuminant brièvement notre proximité physique maintenue par la menotte qui nous liait.


« — Oui, j'y étais, » lui répondis-je, observant avec attention son regard dans lequel transparaissait, malgré elle, une légère mais palpable inquiétude.


« — J'étais de service ce soir-là ! » Cette simple affirmation fit ressurgir une myriade de souvenirs dans mon esprit. L'évacuation en canots, Sydney, la bombe à bord du bateau et dans les canots. Mais par-dessus tout, l'anxiété de la savoir présente sur ce bateau, alors que je restais impuissant. Ce souvenir, ou plutôt cette sensation d'impuissance, avait ouvert une brèche en moi, dans laquelle je plongeais tête la première, laissant mes émotions s'exprimer sans retenue.


« — Oui, je t'en ai voulu. Je me suis demandé si tu aurais fait la même chose pour "m'arrêter". Aurais-tu tiré sur moi ? » Je ne voulais pas connaître la réponse, et je me maudissais déjà d'avoir posé cette question, qui ne faisait qu'approfondir davantage mon tourment. Pourtant, je continuais à m'enfoncer, déversant tout ce que j'avais sur le cœur. Peut-être que c'était ce dont nous avions besoin, elle et moi, pour avancer.


« — Athena ? » lâchai-je, dévoilant ainsi le secret le plus intime de Parker. Ce prénom, ou plutôt ce doux prénom, qu'elle m'avait murmuré un jour à l'oreille, me faisant comprendre que j'étais le seul à le connaître, avec ses parents. Mais était-ce toujours le cas aujourd'hui ? Apparemment non, si j'en jugeais par sa réaction. Elle se détacha de moi, rompant brusquement notre proximité physique. Je me sentais à la fois idiot et soulagé.


« — Parler, ça fait du bien parfois ! » commençai-je, incertain de moi-même, avant qu'elle ne prenne la parole à son tour, prononçant une réplique qui me sortit presque instantanément de ma torpeur, et qui, je crois, brisa mon cœur.


« — Parker, tu veux mourir pour te libérer ? » Alors, je vis une larme rouler sur sa joue. « — C'est donc ça, la vérité ultime de cette histoire ? Ta liberté contre la mienne ? Tu n'es pas revenue par choix ? » Je posai une question dont la réponse me semblait désormais évidente. Sans que je m'en rende compte, ma main vint se glisser dans la sienne. « — Je... je n'aurais jamais imaginé cela. Ou peut-être ai-je fait semblant de ne pas comprendre. » Je me redressai alors, écartant mon dos du sol et couvrant instinctivement mon intimité, car je retrouvais soudainement ma pudeur.


« — Viens... En nous serrant l'un contre l'autre, nous pourrons nous réchauffer, » lançai-je, incertain de sa réaction. Je me sentais à la fois bête et coupable de sa situation. « — Je te demande pardon, » laissai-je échapper, piteux.


En pleine tempêteWhere stories live. Discover now