Chapitre 17 › Pluie du cœur

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Les pulsations de mon cœur s'élancent avec fougue dans ma poitrine. Paul fait une passe à Nicolas qui s'empresse de rejoindre le milieu du terrain avant de la repasser à Maxence. Soudain, Gabriel déboule du fond et fonce en direction des premiers rangs. Les sportifs habillés de rouge lui saisissent le tee-shirt dans le but de le ralentir ou bien encore de lui barrer la route. Sous pression, tout en moi se met à paniquer. Je ne trouve aucun autre moyen d'évacuer cette émotion qu'en m'époumonant afin d'encourager le grand brun.

— Vas-y, Gabriel ! Fonce !
    Je doute qu'il puisse distinguer ma voix, pourtant, comme si je surveillais ses arrières, je lui indique où se situent ses ennemis.
    — Plus que deux minutes ! proclame l'arbitre.
    — Fonce, Gabriel !

Maxence monte en tête et, à quelques mètres du but, il élance sa jambe dans un coup de pied qui le fait vaciller en arrière. Le ballon décolle du sol et s'envole, suivi par le regard des joueurs. Les rouges se mettent en place dans le but de réceptionner la sphère. Quant à moi, je ne quitte pas des yeux Gabriel qui slalome en remontant le terrain. Mon visage est trempé et mes vêtements humides par la quantité d'eau qui tombe du ciel. Toutefois, je tonne d'une voix cassée le nom de mon ami.

Ce n'est qu'à la dernière minute que les adversaires comprennent le plan des bleus. Leur temps pour agir est écoulé. Gabriel bondit du sol et frappe le ballon d'un coup de tête. Celui-ci adopte la nouvelle trajectoire qui lui a été imposée et fonce droit dans le filet du but après avoir survolé le gardien.

L'arbitre siffle la fin du match au moment où la foule dans les gradins exprime sa joie quant à la victoire des bleus. Un sourire s'étire sur mes lèvres, je suis soulagé qu'ils aient pu gagner avec un but d'avance. Je me retourne un instant et suis forcé de remarquer qu'à l'exception de ma présence, personne n'est resté sous la pluie. Tout le monde est à l'abri, bien au sec sous la toiture des bancs qu'ils évacuent pour quitter le stade.

Les parapluies défilent et le terrain se dégage, les joueurs regagnent les vestiaires. Je demeure le seul sur place. Et pour cause, Gabriel s'approche de ma position. Ses cheveux foncés sont imbibés d'eau et de sueur. Il passe une main entre ses mèches qui retombent aussitôt, une peine que je ne me suis pas infligée.

Je lève les yeux afin de bien le regarder. Il a du mal à reprendre son souffle et des gouttes perlent sur son menton à cause de la pluie, ou bien de l'effort. Nos pupilles s'ancrent l'une dans l'autre. J'aimerais pouvoir dire quelque chose, mais je suis perturbé par une chaleur qui naît dans mon ventre et remonte vers mon cœur au fur et à mesure que nous nous scrutons.

C'est quoi cette sensation étrange... ?

La main de Gabriel se glisse avec une infime délicatesse contre ma mâchoire, me provoquant un frisson qui me glace l'échine. Mon corps se retrouve collé contre la rambarde tandis qu'il approche le sien, tant que je peux presque ressentir la chaleur qui émane de celui-ci. Sans un mot, il redresse mon faciès trempé vers le sien. Ce geste me vaut une bouffée de chaleur qui m'en fait oublier l'hiver et fermer mes paupières. La bouche du sportif se pose contre mon front et lui offre un baiser des plus tendres.

Je suis brusqué par cette démarche à laquelle je ne m'attendais pas. Mes sourcils se froncent à peine, non pas de mécontentement, mais à cause de mes ressentis qui me tordent le ventre. Il me relâche et finit par s'appuyer contre la barrière afin de rejoindre ma hauteur.

Là, il me scrute de près ; on dirait qu'il cherche à me déchiffrer tout en faisant croire qu'il n'a aucun mal pour lire dans mes pensées. Puis, dans un murmure, il déclare de but en blanc :
    — Tu vois, j'te l'avais dit que t'allais crier mon nom.
    J'avale difficilement ma salive tandis que ma mâchoire se contracte et que mes dents se resserrent.

Plus fort que ça, tome 2Where stories live. Discover now