Chapitre 16 › Va droit au but !

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Roxanne se tourne vers le terrain avec de grands yeux bien ouverts. Survoltée, elle ne peut s'empêcher d'exprimer son engouement.

— Vivement la fin, qu'ils retirent leurs maillots !

J'ai un soupir d'exaspération tout en regardant les garçons terminer leurs échauffements. À ma droite, Gabriel fait des étirements. Je l'observe se pencher afin de toucher la pointe de ses pieds à l'aide de ses mains. Cela me fait discrètement sourire, je ne l'ai jamais vu aussi sérieux qu'à cet instant. Finalement, je suis content d'être venu braver le froid pour assister à son jeu stupide. Peut-être qu'après ça, nous pourrons tous aller nous réchauffer au café pour boire un chocolat chaud et manger un morceau.

J'espère qu'il va gagner, que l'on puisse célébrer la victoire de son équipe.

Le sportif se redresse et me lance un regard brûlant qui lui donne un air ténébreux. Je détourne aussitôt les yeux, gêné de l'avoir fixé pendant un long moment. Il se dirige vers nous et je change la trajectoire de mon corps, ne sachant plus où me mettre.

— T'as tenu parole, lâche-t-il.

Il échange une bise avec les filles tandis que je cherche désespérément à paraître tout à fait normal et impassible. Il n'y a rien de plus bizarre que d'avoir les yeux rivés sur quelqu'un et qu'il le remarque. L'athlète se présente face à moi avec la barrière pour seul obstacle entre nos deux corps. N'ayant plus le choix d'ignorer sa présence, j'affirme d'une voix neutre :

— Comme tu peux le voir.

Il me paraît plus grand lorsqu'il porte ses crampons, ce qui me force à lever les yeux pour pouvoir le regarder. Je déteste ce sentiment d'impuissance. Sa mâchoire se contracte par le sourire qu'il retient et qui creuse ses fossettes.

— Cool, répond-il sans émotions.

Notre semblant de conversation est étrange, je ne sais pas où me positionner après le froid qu'il y a eu entre nous lorsque nous nous sommes quittés la veille. Nous restons là à nous observer, comme suspendus dans le temps. Ça me donne une sensation désagréable d'intrusion. Je fronce un peu les sourcils. Mes yeux dérivent vers son arcade sourcilière recouverte d'un pansement blanc, loin de la fantaisie de celui que je lui avais attribué. Le côté de son visage est recouvert de l'hématome qui vire au violet foncé. Le tout est entouré de jaune et de bleu délavé qui s'étend jusqu'au-dessus de sa paupière.

On croirait qu'il porte sur son visage l'esquisse d'une galaxie.

— Au fait, Gabriel, commence Solène, comment va ta cheville ?
Il décroche lentement son attention de ma personne et se tourne vers son interlocutrice.
— Ça va. J'vais gérer.
— Vous allez gagner, c'est sûr ! surenchérit Roxanne.

Mais Gabriel l'ignore. Il est occupé à se rapprocher de moi qui souhaite reculer. Mais les mains écorchées du sportif saisissent la tirette de ma veste qu'il descend jusqu'à mes clavicules. Le froid enveloppe mon cou, fait frissonner ma peau qui est recouverte par un pull en maille marron. Comme il l'avait fait à la soirée il y a une semaine pile, il s'empare de ma chaîne et sort mon pendentif en forme de soleil qu'il expose à la vue de tous. Et cela, même si je m'efforce de le cacher sous mes vêtements.

Il relâche son emprise et redresse ses yeux qu'il plonge dans les miens avant d'ajouter, un rictus au coin de sa bouche :

— Je n'ai pas le droit de porter la mienne.
J'avale difficilement ma salive tandis qu'il jette un coup d'œil à chacun de nos visages.
— Maintenant, c'est sûr, prophétise-t-il tout en reculant, nous allons gagner.
Un coup de sifflet retentit et Gabriel est déjà en train de courir en direction du milieu du terrain.
Maman avait raison ; j'aurais dû garder l'​​​​​​​écharpe.

Plus fort que ça, tome 2Where stories live. Discover now