Chapitre 27 - Fallen

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« To watch you, to guide you Through the darkest of your days »
Pour te voir, te guider À travers le plus sombre de tes jours

Wherever you will go — Charlene Soraia

Paul me raccompagne jusqu'à la porte de mon immeuble. Après mon aveu, la soirée s'est pourtant bien passée, même si j'ai senti au baiser qu'il m'avait donné que quelque chose n'allait pas. Mais je n'ai rien dit, je n'ai pas commenté. Ça n'aurait servi à rien, sinon à le fermer un peu plus.

— Tu veux rester ? proposé-je timidement.

Je sais bien que je n'obtiendrai pas la réponse souhaitée, mais qui ne tente rien n'a rien.

— Non, je vais rentrer me reposer...

J'opine de la tête et tente de capter son regard qui n'a plus croisé le mien depuis trop longtemps, me laissant l'impression qu'un gouffre s'est installé entre nous.

Paul s'avance vers moi et dépose un baiser aussi léger qu'une plume sur mes lèvres.

J'inspire pour ne pas craquer et le regarde s'éloigner. Dois-je le laisser partir ainsi ? Pour une fois, n'est-ce pas à moi de me battre ?

Je le connais trop bien pour savoir qu'il prendrait ça pour une invasion... Je me mordille la lèvre, indécise. Je ne peux pas rentrer chez moi, j'ai besoin de prendre l'air, de respirer. Si je m'étais dit il y a quelque temps que ce serait mon appartement qui me donnerait l'impression de suffoquer, je ne l'aurais pas cru. Mes jambes décident pour moi de le suivre à distance. J'ai besoin de m'assurer qu'il va bien, et si ce n'est pas le cas, je veux être là pour lui.

Il traverse les rues bondées de monde, tête baissée. Ça ne lui ressemble tellement pas. Un groupe passe devant moi, me cachant la vue. Mais je ne suis pas inquiète, mon esprit est focalisé sur lui et lui seul. Je pourrais traverser n'importe quelle foule pour arriver jusqu'à lui. Je parviens à me frayer un passage, mais ne le trouve pas. Mes yeux sont partout, sur tout le monde, mais ne tombent jamais sur l'homme que j'aime.

— C'était un malade, il n'en vaut pas la peine, dit un jeune à son ami.

Sa lèvre fendue me fige. Comme si je sentais, comme si je savais. Mes pas accélèrent et ma tête tourne à chaque coin de rue. Quand enfin je le vois, au milieu d'une ruelle sombre et vide de monde, il est en train de se relever difficilement. J'ai l'envie de le rattraper mais mon corps semble mis sur pause, incapable d'amorcer le moindre pas. Mes jambes attendent juste qu'il se soit éloigné pour reprendre leur marche.

Je n'arrive ni à m'approcher ni à m'éloigner. Pourtant, je le dois. Je dois lui laisser le temps de venir à moi, de me faire confiance. Alors, résignée, je m'arrête. Je fais un premier pas en arrière, puis un deuxième. La pluie a commencé à s'abattre, à l'image de la bagarre qui se joue en moi. Je me retourne et quitte d'un pas vif cette rue.

Je traverse à nouveau la foule et marche quelques minutes avant d'arriver chez moi. J'ouvre la porte et m'y adosse en la refermant. Mes cheveux goûtent dans ma nuque, me ramenant au présent. Je quitte ma veste, qui s'échoue à mes pieds. Le reste de mes vêtements subit le même traitement, ne reste plus que mon t-shirt trop large. Je me rends dans la salle de bain et récupère une serviette pour me sécher.

Voilà peut-être plusieurs heures que je suis assise sur mon canapé, broyant du noir. Mes cheveux sont à présent secs et mon corps réchauffé. Je ne sais pas pourquoi j'ai parlé, je ne sais pas ce qui m'a poussée à lui dire ce que j'avais sur le cœur. Je sais bien que ce qui se passe entre lui et moi est fragile et pourtant, je voulais, non, j'avais besoin qu'il sache. Il devait savoir que pour moi, il est important. Alors, je me suis jetée à l'eau. Le moment était-il mal choisi ? Je n'en sais rien... C'est trois mots là, je ne les ai jamais dits avant lui. Je n'ai pas de guide des sentiments, ils sont là et ont juste besoin d'être exprimés.

After the fallWhere stories live. Discover now