Chapitre 10 - Fallen

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« I want to I want to be someone else or I'll explode »

Je veux, Je veux être quelqu'un d'autre sinon je vais exploser

Talk Show Host— Radiohead


— Je ne peux pas, maman, lui répété-je pour la dixième fois. Je...

Mais comme toujours, elle est en boucle. Elle ne m'écoute pas ou plutôt elle ne m'entend pas. Je prends une profonde inspiration pour tenter de me calmer.

— Pourquoi ? Tu as peur de la croiser ?

Je ne réponds pas, cette simple évocation me serre le cœur.

— Je suis sûre qu'elle t'a pardonnée depuis longtemps, rajoute-t-elle.

Quoi ? Je resserre ma prise sur le téléphone, mes dents viennent entamer ma lèvre. Un goût de fer envahit bientôt ma bouche. Ça me rassure et ça me ramène à terre. Je suis là, à des kilomètres d'eux et de leurs œillères.

— Tu dois être là, mon cœur.

Je déteste qu'elle utilise ce surnom. Il ne sert qu'à me faire culpabiliser, qu'à m'adoucir. Il passerait inaperçu si elle le pensait vraiment.

— Maman, je...

— Les gens commencent à se poser des questions, Fallen. Tu n'arranges pas tes affaires, là.

Les miennes ? Vraiment ? Parle plutôt des tiennes, ai-je envie de rétorquer. Mais comme toujours, je ne dis rien.

— Je dois te laisser, maman. Mes amis m'attendent.

Je n'attends pas sa réponse que déjà, je raccroche. Mes amis ? Je ris tristement, seule au milieu de mon séjour. Rien, pas une photo, pas un souvenir de la Fallen d'avant. Ma famille, mes amis, ils ont tué le peu de foi que j'avais. Je les déteste d'avoir préféré fermer les yeux. De ne pas m'avoir crue et, finalement, de ne pas me connaître.

Je vais dans ma chambre et fouille mon armoire à la recherche de mon clavier. La seule chose qu'il me reste d'avant. Je le dépose sur mon lit et l'allume. Un léger bourdonnement se fait entendre et j'observe sans relâche la petite lumière rouge. Mes doigts viennent frôler les touches, mais je ne parviens pas à les pousser. Mon cœur bat fort au point où il couvre le bourdonnement. Je n'entends que lui.

Je ferme les yeux pour le ressentir et là, mon majeur vient pianoter sur une des touches. Elle rejoue le tambourinement qui résonne dans ma poitrine. Je ne peux pas faire plus que ça. Le son est mauvais, pas aussi bon que celui d'un véritable piano, mais il est suffisant.

Je frappe, frappe et frappe encore. Personne n'est digne de confiance. Je ferme les yeux et les rouvre sur la note posée sur ma commode. Et lui ? Mon cœur s'emballe, alors mon doigt accélère à son tour. Paul. La Bretagne. Ma mère. Mon rythme cardiaque se déchaîne. Mes pensées se bousculent. Je dois me décider maintenant. Demain matin, il sera trop tard. Mon doigt continue de frapper encore et encore. Je suis au bord de la crise de nerfs.

Ma main s'abat sur les touches et des notes horribles se succèdent. Je repousse le clavier et me lève jusqu'au bout de papier. Je saisis mon téléphone et compose un message, avant que le courage ne me fasse défaut.

[Ton offre tient toujours ? Fallen.]

J'appuie sur « envoyer » avant de me dégonfler puis je jette mon téléphone sur mon lit. Et s'il avait autre chose de prévu ? Et si je l'avais gonflé ? Et si ? Si rien, Fallen. S'il ne peut pas, tant mieux, se rassure ma prudence. Et comment progresser, alors ? se révolte ma liberté.

After the fallWhere stories live. Discover now