13.➰

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Nous montons les escaliers dans un silence de plomb jusqu'au sixième étage, ma mère jugeant que l'ascenseur n'est pas sûr.
Je la soupçonne d'être légèrement claustrophobe et d'avoir peur de rester coincé à
l'intérieur pour une durée indéterminée.

Une fois dans l'appartement, je ne perds pas une seconde et me poste en face de ma mère et d'Alec les bras croisés, au diable l'hospitalité j'ai besoin de réponses.
Je vois ma mère échanger un regard furtif avec Alec, je ne me serais jamais douté que ces deux là étaient de mèche.
En même temps comment j'aurai pu ?

- Ce serait peut-être mieux si tu lui expliquais la situation non ? Demande ma mère à Alec.

Celui-ci soupire tout en passant une main dans ses cheveux d'une manière nonchalante, ce qui a pour effet de les décoiffer encore plus qu'ils ne l'étaient déjà à cause de son casque de moto :

- Mouais, répond-il simplement.

Mon regard, désormais incendiaire, change de cible et vient se poser sur Alec.

- Pas besoin de me regarder de cette façon.

Je suis assez surprise par son ton devenu soudainement autoritaire, pourquoi me parle-t-il de cette façon ? Lui qui a toujours été très calme. En le regardant plus attentivement je m'aperçois qu'un ouragan fait rage dans ses yeux signe de sa colère.

Il s'approche de moi lentement, tel un prédateur s'approchant lentement de sa proie avant de l'attaquer, et instinctivement je recule d'un pas.

- Tu n'écoutes jamais quand on te parles ou alors tu n'écoutes que la moitié. Tu es putain de bornée, tu n'en fais qu'à ta tête alors que tu n'as absolument aucune idée de ce dans quoi tu t'es embarqué !

Il a terminé sa phrase sur un ton qui ne me plaît pas du tout, le ton que l'on emploie lorsque l'on dispute un enfant qui ne réfléchit pas à ce qu'il fait.
Ce n'est pas parce que c'est un foutu Chasseur d'Ombre que je dois obéir à tout ce qu'il me dit comme un chien-chien.
Depuis le début de cette histoire tout le monde me laisse dans le flou complet et j'essaie simplement d'agir au mieux pour ma sécurité et celle de ma mère avec les informations que je possède.

- J'étais censée faire quoi selon toi hein ? Dis-je en commençant à élever la voix, la colère prenant le dessus. Rester dans ton Institut et attendre ?
Je me suis réveillée dans un endroit inconnu avec des personnes dont j'ignorais tout jusqu'à leur nom, tu aurais fait quoi à ma place ? Débitais-je sans reprendre mon souffle.

Je le vois ouvrir puis refermer la bouche, visiblement il n'avait pas envisagé la situation sous cet angle.

Nous nous toisons pendant de longues secondes, puis ma mère prend la parole visiblement un peu mal à l'aise :

- Bon ben, je vais vous laisser discuter tranquillement tous les deux.

Je la supplie du regard de rester mais elle détourne les yeux et sors de l'appartement en claquant la porte.

Je me retrouve donc seule en face à face avec Alec, complètement muette, et j'attends, j'attends qu'il se passe un truc.
Alec cherche quelque chose dans sa poche arrière avant de me le tendre : Ma dague !
Comment a-t-il fait pour l'avoir sur lui ?
Il me semblait l'avoir laissé dans le tiroir de mon bureau ce matin pourtant.

- Emmène la partout avec toi, ta grand-mère savait que tu en aurais besoin. Dit-il d'un air gêné en détournant le regard.

- Comment tu sais ça au juste ? Demandais-je d'un ton soupçonneux, hésitante à prendre ma dague toujours dans la main tendue d'Alec.

- Je vais tout t'expliquer c'est promis mais tu n'aurais pas un endroit plus confortable ?
Parce que ça risque d'être long.

Je tends la main vers lui et reprends ma dague, je commence doucement à lui faire confiance mais il faut que je reste méfiante, on ne connaît jamais vraiment les gens.

- Ouais, viens dans ma chambre.

N'allez pas vous imaginez des trucs hein, c'est simplement pour éviter que ma mère interrompt la conversation une fois qu'elle rentrera dans l'appartement.
On s'assoit sur mon lit je me tourne vers lui, prête à écouter son récit.

Il prend une grande inspiration et puis se lance :

- Ta grand-mère et ton père était de grands noms des Chasseurs d'Ombres et il étaient tous les deux très proches.
Ils condamnaient tous deux les méthodes extrêmement conservatrices de l'Enclave.
Elle était donc au courant de la grossesse secrète de ta mère et l'a aidé à cacher ta naissance mais également à couvrir ton père pour ses absences répétées qui commençaient à devenir vraiment suspectes.
Malheureusement ces entraves aux lois de l'Enclave ont finis par revenir aux oreilles du Consul, qui est le plus haut représentant de l'Enclave, et ta grand-mère a été condamné à la peine capitale.
Dans le monde des Chasseurs d'Ombres cela équivaut à la peine de mort, on lui a retiré l'intégralité de ses runes.
C'est extrêmement douloureux autant du point de vue physique que moral.
Non seulement tu subies l'humiliation suprême devant ta famille et le Consul, mais en plus tu as la brûlure incandescente de toutes les runes retirées une à une, c'est le cauchemar de tous les Chasseurs d'Ombres.
Après ça elle s'est fait exilé et depuis son seul et unique but était de te protéger des Branwell, une famille très respectée et surtout extrêmement conservatrice.
S'il t'avait découverte il t'aurait jeter sur un bûcher.

- Et toi ? C'est quoi ton rôle dans tout ça ?

- Ma famille, les Lightwood, est très proche de la tienne à tel point qu'ils ont voulu arranger un mariage entre leur fille Lydia et moi, c'est dire.
Bien évidemment je m'y suis opposé et il a été annulé.
Quand ta grand-mère a été exilé, je me suis mis en tête de la retrouver et après de longues recherches j'y suis parvenu. On est devenu très proche malgré le fait que cette familiarité aurait pu me valoir la même punition.
Le jour de sa mort elle m'a demandé de lui jurer que je veillerait sur toi autant que je le pourrait étant donné qu'elle ne pourrait plus le faire.

- Mais pourquoi toi ?

- Peut-être car je ne l'ai pas renié ou tout simplement car je n'était pas à la solde de l'Enclave, pour être honnête je n'en sais rien. Dit-il tout en baissant la tête, l'air légèrement abattu.

Malgré le fait qu'il ne dise rien, je suis quasiment certaine que la disparition de ma grand-mère l'a grandement affecté, ils avaient l'air d'être très proches.
Comment aurait-elle pu lui confier ma sécurité si elle n'avait eu aucune confiance en lui ?

C'était quelqu'un de très méfiant qui m'a enseigné depuis toute petite à me méfier de tout le monde, et je pense qu'elle aurait voulu que je me fie à Alec.

Le manoirDonde viven las historias. Descúbrelo ahora