36. L'Ombre ailée

Start from the beginning
                                    

Alors qu'Aragorn commençait à s'éloigner, Boromir attrapa son bras et, avec violence, le retourna vers lui. J'hésitai à intervenir mais le rôdeur se défila rapidement du bras du blond.

-Vous avez peur. Toute votre vie vous vous êtes caché dans l'ombre, effrayé par ce que vous êtes ! Vous deux ! s'écria-t-il en nous montrant du doigt.

-Je ne conduirais pas l'Anneau à moins de cent lieues de votre cité, souffla Aragorn avant de s'éloigner.

Je n'avais rien rajouté, j'étais d'accord avec les paroles du rôdeur. De plus, Boromir avait été trop loin. Je lui lançai un dernier regard mauvais avant de m'éloigner. Encore énervé, je m'assis sur un gros rocher pour monter la garde. L'Homme du Gondor avait été trop loin, surtout avec Aragorn.

Le lendemain matin, nous reprîmes la route sur le lac. Nous longions des falaises. J'étais une nouvelle fois monté sur le dos de Drogon. Après quelques heures, deux grandes statues se tenaient face à nous, des deux côtés du fleuve. Ils étaient il y a longtemps des Rois. Les yeux voilés et les sourcils crevassés, ils fixaient le Nord avec sévérité. Chacun levait la main gauche, paume vers l'extérieur, en signe d'avertissement. Dans leur main droite avait été sculpté une hache et sur leur tête un casque et une couronne effrité.

-Depuis longtemps je souhaite contempler les Rois de jadis. Mes ancêtres, rajoute Aragorn en ramant.

-Ce sont Isildur et Anárion, les premiers Rois du Gondor, annonçais-je à la Communauté après avoir ordonné à mon Dragon de descendre pour leur parler.

Puis, mon Dragon reprit son envol et tournoya autour d'une des deux statues, sous les regards amusés de nos amis. L'animal ailé fit une pirouette dans les airs, ce qui fit crier de joie la Communauté, et moi d'effraie. Jamais il n'avait fait ça et cela m'avait surpris, mais ce n'est pas pour autant que je n'aimai pas cette action. Je sentis mon cœur se remplir d'un sentiment de liberté. Je me sentais comme un oiseau, libre comme le vent, léger comme une plume. Mes cheveux voltigeaient dans le vent et je levais les bras en l'air sous les rires de la Communauté, et surtout des Hobbits.

-Tu sais Drogon, beaucoup pensent que tu n'es qu'une machine de guerre, un cracheur de feu, me confiais-je à mon partenaire de vol, alors que nous étions tout deux haut dans le ciel. Mais pour moi, c'est faux. Quand j'ai quitté Westeros après la grande guerre, tu es la chose qui me restait. Je ne savais pas d'où tu venais, comment étais-tu né. La seule chose que je savais, c'est que ma mère avait gardé précieusement ton œuf. Alors c'est ce que j'ai fais, à mon tour. Et quand tu es né, j'ai compris. J'ai tout de suite compris que tu n'étais pas seulement un reptile, souvenir de mes ancêtres, mais que tu étais mon Dragon, mon ami. Et au fil du temps, j'ai commencé à te considérer comme mon enfant, mon bébé Dragon. Je t'ai considéré comme tel quand j'ai compris que nous étions liés. En effet, depuis toujours, je suis dotée du sang du Dragon. J'ai vite compris que j'étais disposé d'une résistance naturelle au feu et à la chaleur. Dès ta naissance, tu m'as considéré comme ta mère, et tu m'as protégé. Tu m'as souvent sauvé en lacérant et en brûlant les ennemis. Tu as toujours été là pour moi. Mais si un jour tu veux partir, prendre ta liberté et voler sans moi, tu en as tout le droit. Tu peux partir si tu le souhaites.

Drogon bien sûr ne répondait pas, mais j'eus l'impression qu'il approuvait mes paroles. Et ça me faisait du bien de me confier à lui. Tout ce que je disais, je le pensais. Je savais que cette discussion resterait entre nous deux.

Nous redescendîmes ensuite vers les autres qui avaient rejoint la rive pendant que je parlai. Drogon atterrissait rapidement pendant que la Communauté préparait un camps. Quand je descendis du dos de l'animal ailé, je me tournai aussitôt vers la forêt. Imité par Legolas, j'observai les bois obscurs avec appréhension. Je sentais la présence d'esprit.

-Nous traverserons le lac à la tombée de la nuit, déclara Aragorn. Nous cacherons les bateaux et continuerons à pied. Nous atteindrons le Mordor par le Nord.

-Ah oui ? Il nous suffira simplement de trouver notre chemin, une région de marécages puants, à perte de vue, se plaignait Gimli.

-Oui, c'est notre route, répondit le rôdeur sous le regard abasourdi de Pippin. Je vous suggère de prendre du repos afin de recouvrir vos forces, Maître Nain, finit-il sous les grognements du roux.

-Nous devrions partir maintenant, conseilla Legolas en se tournant vers Grands-Pas.

-Non, les Orques patrouillent sur les rives Est. Il vaut mieux attendre que l'obscurité nous cache.

-Ce n'est pas la rive Est qui m'inquiète, continua l'Elfe. Une ombre et une menace grandissent dans mon esprit, quelque chose approche. Je le sens.

-Nous n'avons pas besoin de recouvrir nos forces, nous les Nains. N'oubliez pas ça, jeune Hobbit, pesta Gimli de son côté.

-Où est Frodon ? intervient Merry, ce qui attira l'attention de tous.

Face à ses paroles, je me rendis compte que l'Hobbit n'était pas là. Puis mon attention se posa sur le bouclier du Gondor, reposant contre un arbre.

-Et où est Boromir ? fis-je à mon tour.

-Mettons-nous à sa recherche.

-Je ne le sens pas, lâchais-je en lançant un regard à mon Dragon.

Je lançai un dernier regard à nos compagnons avant de poursuivre le rôdeur dans les bois, épée en main. Je sortis moi-même mes dagues. Nous ferions mieux de nous séparer pour les retrouver le plus vite possible, avant que ça ne dégénère. Cette histoire ne sentait pas bon. Depuis le début, Boromir s'était montré intéressé par l'Unique et même hier soir, s'était montré désagréable. Depuis le début, Frodon fuyait son regard, effrayé par l'Homme du Gondor.


𝐅𝐄𝐔 𝐄𝐓 𝐒𝐀𝐍𝐆 ࿐ 𝐋𝐎𝐓𝐑 & 𝐇𝐎𝐁𝐁𝐈𝐓Where stories live. Discover now