Le présent est à vivre

Chapitre 84 - Délire ou Réalité ?

- Loki !

Il était trop faible. Ses paupières étaient trop lourdes.

- Loki, reste éveillé, disait quelqu'un.

Il reconnaissait cette voix mais n'arrivait pas à remettre la personne à qui elle appartenait.

- Il faut que tu ouvres les yeux, les autres vont bientôt arriver, la pressait-elle. Allez mon amour !

Personne ne l'avait jamais appelé ainsi. Il rassembla ses dernières forces pour ouvrir les yeux. Il fut d'abord aveuglé par la luminosité. Après avoir cligné des paupières plusieurs fois, il la vit au-dessus de lui. Elle était différente mais c'était elle, Jeanne. Il ne ressentait pas le lien, pourquoi il ne la ressentait pas. Des larmes s'échappaient de ses yeux.

- Ne pleure pas mon amour, tout va bien aller, le rassura-t-elle.

- Comment ? ... Il t'a tué sous mes yeux, dit-il la voix tremblante avant de s'étouffer avec du sang.

- Chut ! Tout va bien, j'ai très peu de temps.

Et c'est là qu'il la vit. Jeanne était toujours étendu à ses côtés sous sa forme de loup mais elle était aussi penchée au-dessus de lui. Il devait délirer. C'était ainsi de mourir ? Un passage douloureux entre ce monde et le prochain ? Elle posa sa main gauche sur son visage avec un regard bienveillant. Il la lui attrapa, ne comprenant pas ce qu'il se passait. Ce contact était si réel. Il sentit une bague à son annulaire gauche qu'il mit devant ses yeux. La bague était en or avec des petits serpents verts autour.

- Qui êtes-vous ? Vous n'êtes pas Jeanne. Elle ne porte pas d'alliance, la sienne et celle de Joyce sont autour de son cou.

- C'est pourtant moi, lui répondit-elle en montrant la chaine avec trois alliances dont deux qu'il reconnut immédiatement.

- Non, Jeanne est ...

Les mots se coincèrent dans sa gorge et une quinte de toux le prit lui faisant cracher du sang.

- Tiens bois, dit-elle en s'entaillant le poignet et en lui plaquant sur la bouche tout en glissant son autre bras sous lui pour le soutenir. Ecoute ...

Il résista avec le peu de force qu'il pouvait mettre mais elle insista.

- Ne fais pas l'enfant si tu veux rester en vie, le sermonna-t-elle. Putain ! J'ai oublié comme tu pouvais être borné à cette époque.

Il la regarda, interdit devant ses paroles. Mais retrouvant sa Jeanne, il céda. Le goût de son sang était le plus doux des breuvages qu'il avait pu gouter au cours de sa vie. Alors qu'elle lui parlait, il la détailla. Plusieurs mèches grises parsemaient ses cheveux bruns, elle avait des rides prononcées aux coins des yeux et près de la bouche. Sa peau semblait beaucoup plus basanée qu'aujourd'hui. C'était bien sa Jeanne mais ... en beaucoup plus vieille.

- Tu ne m'as racontée cette histoire qu'hier, sombre crétin, j'ai fait aussi vite que j'ai pu. Mais passer par les pierres est vraiment très compliqué, le réprimanda-t-elle. Ça devrait te suffire.

Elle retira son poignet de sa bouche et inspecta sa plaie au ventre.

- Mais tu es ...

- Non, tu as oublié ce qui nous tue ! le gronda-t-elle.

- L'argent, murmura-t-il plein d'espoir.

- Ou une décapitation ! Je vais m'en remettre, ne t'inquiète pas ... Et toi, tu commences déjà à cicatriser. J'ai une dernière chose à te dire.

Il se sentait étrangement bien, même un peu engourdi. Il avait envie de fermer les yeux.

- Loki, reste avec moi encore un peu, c'est mon sang qui te fait cet effet. Concentre-toi attentivement.

Il ferma les yeux, ses paupières devenant trop lourdes. Une douleur cuisante sur sa joue le fit sursauter et cligner frénétiquement des yeux.

- Quoi qu'il arrive dans le futur, il faut que tu promettes de ne jamais m'abandonner, de ne jamais me quitter.

Elle avait les yeux remplis de larmes en disant cela. Il se sentait de plus en plus groggy.

- Tu m'entends, mon amour, dit-elle. Quoique que je te dise ou fasse, promets-moi de rester à mes côtés.

- Oui, je te le promets.

- À dans deux millénaires alors, entendit-il pendant qu'elle posait un baiser sur son front et qu'il plongeait dans l'inconscience.

Loki se sentait bougé mais son esprit était trop embrumé pour réussir à analyser les informations qui lui parvenait.

- À trois, on soulève.

Il releva sa main qui retomba aussitôt sans force.

- Jeanne, murmura-t-il.

- Elle est là, Votre Altesse, mais on doit surtout s'occuper de vous, disait quelqu'un.

Ses souvenirs lui revenaient par bribes. Le vaisseau, l'Ordre noir, Thanos et Jeanne ... sa petite oméga.

Des gens s'agitaient autour de lui, ou plutôt pour lui.

Il fut pris d'un sanglot, la revoyant se débattre avant de s'éteindre dans la poigne du titan. Les machines s'emballaient autour de lui dans des bips stridents. Il porta une main à son visage mais des câbles l'en empêchèrent.

- Prince Loki ... Prince Loki, dit Caroline qui apparut dans son champ de vision, il faut vous calmer pour que je puisse vous soigner.

- Jeanne, elle est ... il l'a tué, ... je n'ai rien pu faire, bredouilla-t-il. Joshua, Théophyle, où sont-ils ?

Il se redressa vivement avec le besoin de trouver les enfants de Jeanne. Il n'avait pu sauver leur mère mais il ne les laisserait pas. La médecin lui fit barrage pour l'empêcher de se lever, mais il ne la laissa pas faire. Dès qu'il fit un pas, ses jambes ne le portèrent pas et deux infirmiers l'avaient récupéré pour le remettre sur son lit.

- Un sédatif, ordonna le médecin, et on se dépêche.

- Non ! se rebella-t-il faiblement. Je dois voir les jumeaux, je dois leur dire que Jeanne est ...

Le mot se coinça dans sa gorge. Cela rendait la situation réelle. Il l'avait perdu. Une fois de plus dans son existence, il avait perdu.

Il se débattait avec le peu de force qu'il avait alors que l'équipe médical lui injectait un produit.

- Je dois leur dire qu'elle est morte, hurla-t-il paniqué tombant sur le lit de plus en plus faible.

Alors que tout devenait flou, Caroline réapparut devant lui avec un sourire rassurant.

- Ne vous inquiétez pas Loki, Madame Jeanne va bien, elle récupère.

Et il sombra à nouveau dans l'inconscience.