Chapitre 10 : Le même chapitre

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Je marche sur une rue pavée. Une rue pavée qui pourrait être n'importe quelle rue pavé, vraiment. Je ne sais pas ce que je fais dans cette rue, si c'est même vraiment une rue. "  Est-ce même un lieu ?" je me demande, car ne peux voir devant moi. Du moins, ce que je vois ce limite à n'être qu'une brume épaisse et blanche. Et je ne peux rien entendre non plus, si ce n'est qu'un sinistre vent sifflant au loin, car je suis seule. Infiniment seule.

Je suis consciente que je rêve. Je marche un instant, tentant d'explorer les horizons. Mais il n'y a rien à explorer, l'endroit est vide. Il n'y a que la brume, les pavés glissants, le vent au loin. Et moi. Seule. Seule ? Je sens pourtant une présence, une présence dérangeante qui me regarde et m'examine sous tous les angles, même si elle se tient à l'écart. Elle se contente de m'observer. Pour l'instant. Mais je ne pense pas qu'elle ne fera que m'observer éternellement. Peut-être me veut-elle du bien, ou du mal. Je ne sais rien. Le rêve n'est pas très clair. Une partie de moi me dit toutefois qu'il me faut courir, m'enfuir loin de l'étrange présence, alors je cours. " Ploc, ploc", font mes mes chaussures en cuir en se heurtant contre le pavé mouillé. J'entends aussi ma respiration et ce vent, toujours ce vent qui m'accompagne où que j'aille.

Le rêve continue et je continue de courir. Je cours, et je cours, et je cours. Je m'enfuis mais où que j'aille dans cette rue - qui d'ailleurs n'est pas une rue mais plutôt un piège, un labyrinthe, une cage - je sens la présence de plus en plus oppressante abattre son regard sur moi. Elle me nargue même, en me faisant croire que j'ai réussi à m'enfuir, avant de fondre brutalement sur moi.

Je suis bientôt à bout de force, et je m'effondre sur le pavé de cette rue. Le livre m'apparait dans les mains, et me supplie de l'utiliser. Mais je me souviens de Rosaline et de sa mise en garde, je me souviens aussi de ma force, de ma magie, alors je l'envoie valser dans la brume, me relève et me remets à courir, épuisée et trempée jusqu'à l'os.

Le livre me revient dans les mains. Lui aussi, il ne me laisse pas m'échapper. J'ai la nette conviction que si je le jetais de nouveau au loin, il reviendrait. Alors que faire ? Je ne peux pas l'utiliser. Je ne peux plus l'utiliser. Dois-je le cacher ?

Mais... Il est déjà caché, n'est-ce pas ? SI on ne sait pas à quoi il ressemble, on ne peut pas le distinguer de mes autres livres... Non, je ne suis pas dans ma chambre, et ce n'est qu'un rêve.

Je suis dans un rêve, alors ? Oui. Ce n'est qu'un rêve. Je continue à courir. Je vais bientôt me réveiller.

Je sens une main - sa main -  s'emparer de moi, et je me réveille soudainement.

Je soupire. Je vais bien, tout va bien. Je suis simplement chez moi, dans ma chambre. Dans mon lit. Je suis en sécurité. Je le savais, ce n'était qu'un rêve. Mes yeux s'ouvrent lentement, cependant que le cruel Roi des rêves relâche son emprise sur moi, et je me retrouve à contempler le plafond pendant quelques secondes. Un plafond qui ne peut guère être le mien, cependant ;  car ma chambre est blanche et mon plafond est blanc, alors que celui que je regarde depuis maintenant 27 secondes se trouve être couverts de mousse. Oui, ce plafond ne peut possiblement être mon plafond. Je bondis hors du lit, pour me retrouver au milieu d'une chambre - ma chambre ? -, je fais le même constat. Cette chambre sale et humide ne peut guère être ma chambre, n'est-ce pas ? Ce bureau cassé et pleins de boue ne peut-être mon bureau, et cette chaise recouverte d'écorces et de mousses ne peut-être ma chaise. De même, ce miroir taché et vieilli ne peut-être le mien ! Pourtant, j'ai beau plissé, frotté, cligné des yeux, rien n'y fait, cette chambre est bien ma chambre. Là, près de la porte, il y a toujours les traits de crayons que ma mère avait tracé pour marquer ma taille. J'ouvre l'armoire humide, dont les planche de bois sont désormais gondolées, et je retrouve bien mes affaires, et mes vêtements. Et sur le bureau, sous la boue, se trouve ce foutu maudit livre, qui me suis jusque dans mes rêves, en parfait état. Pas de doute. Je suis bien chez moi.

Perdue dans les contesحيث تعيش القصص. اكتشف الآن