Solitude

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Il y a deux solitudes. Celle qu'on cherche, celle qu'on fuit. C'est sous une quadruple dose de médocs, déjà imposante de base, que je me fais une énième fois cette vaine et  stupide réflexion : A quoi bon ? A quoi bon courir, si ce n'est  à sa perte ? A quoi bon souffrir, si ce n'est pour raviver un tant soi peu l'estime de la personne à l'origine de ce mal-être ?

Ce soir, c'est sous le joug de l'effet croissant des médicaments et de mon alcool maison que je me retrouve une fois encore à tenter d'exprimer maladroitement l'ineffable vide qui ne cesse de croître dans mon coeur. Je tente à petit feu d'étouffer la flamme biologique qui anime en vain mon corps désarticulé de pantin bancal, mais à quoi bon ? A quoi bon crier à l'aide dans un système de névrosés, où la norme semble si folle aux gens jugés assez instables pour se retrouver en hôpital psychiatrique affublé de diverses étiquettes qui, une fois sorti de la chambre molletonnée, ne sont plus la "femme bipolaire" mais simplement l'enseignante surdouée.

La mort est une vieille amie, et c'est celle qui est là, tant quand je la cherche que quand je fuis la solitude. Elle semble aussi proche et inaccessible qu'un cumulonimbus à l'échelle du système solaire : inatteignable de mon insignifiante main humaine, et enlace de mon esprit perçant l'espace et le temps, tel des brins d'herbe aux chevilles métaphysiques de ma perception du monde. Même elle ne veut pas de moi. Ce n'est pas mon heure, je le sais, sinon je serais mort depuis bien longtemps. Les urgences. La branche qui casse. Les médocs peu efficaces. L'ethanol qui sera monté au double de la dose moyenne léthale. Je n'ai qu'à tenter de me tuer à petit feu, en l'attendant comme un premier désir, un rêve, perdu de vu ou détruit.


Bribes d'un Esprit TourmentéWhere stories live. Discover now