Première partie - 1. Second jugement échoué

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— 4 septembre, annonce le juge lorsque la cour est silencieuse. Monsieur Dawson Tom Chavez, 25 ans, ici en présence de son avocate Rita Vargas, accusé du meurtre d'Amber Hawkins du 16 octobre dernier.

Le vieux lit les papiers sur lesquels les faits sont rédigés pour m'accuser d'un meurtre avec préméditation. Amber était ma petite-amie en prime d'être une actrice relativement connue. Elle a commencé dans des courts métrages à Chicago, est devenue une actrice réputée à l'échelle mondiale et je vais être inculpé pour son assassinat.

Encore et toujours les mêmes discours et les mêmes accusations. J'en ai ras le cul ! Ça m'énerve au plus haut point d'être là et encore plus de ne pas être foutu de m'expliquer clairement. J'ai des images de son corps en sang, ça me suffit pour qu'un nœud se forme dans ma gorge.

— Nous sommes joins pour le jugement de cet homme, suspecté d'un acte de mauvaise foi. Les jurés délibèreront à huit-clos avant la fin de cette séance. Deux témoins sont du côté de l'avocat de la partie civile : Julia Peterson, voisine du suspect et Erik Lane, proche de la victime, eux qui nous rejoindront après la locution des faits du suspect.

Dawson Chavez, coupable. La séance est levée ! J'ai envie de hurler à l'encontre de cette injustice qui me fait broyer du noir toutes les nuits, mais ça aussi, ça va se retourner contre moi.

— Monsieur Chavez, venez à la barre nous présenter les faits du 16 octobre.

Théoriquement, je raconterai ma version, ils me prendront pour un excellent menteur qui préparait son canular durant sa détention, ils ne me croiront pas et vont se baser sur les témoignages des deux autres enfoirés de témoin à charge parce que c'est plus facile. Vous voulez une devinette ? Que faire d'un homme inconnu ayant eu une relation avec une célébrité ? On le cloître parce que l'affaire se terminera plus vite et qu'une personne cachée des médias ayant une relation avec la victime est forcément suspecte et donc coupable.

Je me lève, mon avocate m'observe au cas où je ferais un geste brusque et je quitte la table derrière laquelle j'étais assis. Je m'appuie à la barre en fronçant les sourcils et sens les regards de toutes ces commères et ces enflures remplissant le tribunal.

— Expliquez-nous ce qu'il s'est passé.

Les deux assesseurs du juge posent coudes sur table en me détaillant puis ils croisent simultanément leurs bras. J'ai envie de partir tout de suite, mais la vielle pie se lève pour me tenir compagnie. Ça fait presque 11 mois que j'ai cette histoire d'assassinat sur le dos. Je ne sais même pas comment j'ai fait pour tenir jusque-là et je ne comprends pas pourquoi l'affaire prend autant de temps à être bouclée.

Et puis avoir conscience qu'Amber a perdu son âme à cause d'un connard ayant monté son coup comme un chef pour me faire inculper ne m'aide pas du tout. Même le garde du corps d'Amber n'a rien vu venir et cerise sur le gâteau, ils ont refusé sa présence pour me défendre.

Le monde est définitivement contre moi !

— Monsieur Chavez ? interroge le vieux.

— Excusez-moi, juge.

— Commencez. Nous vous écoutons attentivement.

Expliquer ce que j'ai vu m'est impossible et je le réalise encore trop tard. J'en suis clairement incapable et la peur de ne pas être cru me rebute sans cesse. D'un certain point de vue, je suis jugé pour avoir tué le seul repère que j'avais, c'est légèrement paradoxal. Des souvenirs me reviennent brusquement quand je ferme les yeux.

Doigts en sang avec le corps éteint de la femme que j'aimais dans les bras, pleurant son décès.

Mort sur la conscience.

Chaudes larmes ruisselant jusque sur mon cou.

Je n'ai jamais été aussi faible de toute mon existence, à la limite d'être méconnaissable.

— Mon client est dans l'incapacité de s'exprimer depuis que je l'ai pris en charge. Je...

— Non, la coupé-je brutalement.

— Eh bien monsieur. Je suis surpris, réplique le vieux.

Ça fait trop longtemps que je la ferme et c'est trop dur d'être aussi impuissant. C'est le deuxième procès durant lequel je ne touche pas un mot sur l'affaire et le mutisme est considéré comme la preuve irréfutable : je suis le coupable parfait.

— Pardonnez-moi, juge ! crie une jeune femme essoufflée.

Ses yeux vert émeraude se fixent aux miens quand je me retourne. Le juge se lève, furieux du retard de la blonde, et son regard s'assombrit sur le coup. Ses poings se resserrent et sa mâchoire se crispe. Ces deux-là sont en train de foirer mon deuxième procès ! Je souffle silencieusement. Tant pis, il y en aura un troisième, j'ai tout mon temps. Je n'en suis plus à un près pour être accusé à tort et à travers d'un meurtre que je n'ai pas commis, pas vrai ?

— Madame, excluez-vous du tribunal, je dois vous touchez deux mots.

Sans le moindre scrupule, les jurés acquiescent l'excursion du juge durant l'audience. Je suis outré. Depuis quand a-t-on le droit de quitter la salle au début d'un jugement pour une femme plutôt sexy que je ne pensais jamais revoir ? La blonde fait volte-face et quitte la salle en poussant les immenses portes de bois. Le vieux frappe le maillet sur le socle, annonçant la clôture de l'audience. C'est décidé, il y aura un troisième procès, peut-être que je serais jugé de façon convenable, qui sait ? Bordel, l'espoir fait vivre !

— La séance est levée. Nous la reporterons dans les plus brefs délais.

Le juge sort en furie, suivit du public quittant les bancs sans précipitation. Une bande de cons ne cesse de me regarder avec dédain. Est-ce que je vais me faire défoncer si je les envoie littéralement se faire foutre ?

— Petit merdeux, me lance l'un d'eux.

— La jalousie attire bien des problèmes. Assassiner une fille bourrée de talents et d'argent ! Quelle honte de supplier l'innocence, me balance un autre.

Rita pose sa main sur mon épaule, je m'en dégage immédiatement. Elle ne m'a jamais soutenu et elle ose essayer de me réconforter pour se donner bonne conscience. Mes couilles, oui ! C'est une foutue félonne des lois !

Ma mâchoire se crispe de rage.

C'est le foutoir complet dans ma vie depuis le décès d'Amber, je menais une vie pépère avec elle : pas d'embrouilles, c'était simple. Si j'attrape le connard responsable de cette connerie, qu'il signe son arrêt de mort maintenant. Et là, oui, je serai coupable. Elle vivait bien, enfin nous vivions bien. Je m'étais installé chez elle au bout de huit mois de relation, elle me souriait tout le temps, faisait attention à moi, me surprenait et ça ne faisait qu'enfoncer ma culpabilité d'avoir eu le culot de la tromper plusieurs fois. M'aurait-elle pardonné d'avoir abusé d'autant de femmes durant son absence ? M'aurait-elle quitté ? Toutes les réponses se sont éteintes avec elle, alors je ne le saurais probablement jamais. Elle m'a quitté, elle. La mort l'a embarquée et un connard pire que moi fait de ma vie un Enfer.

Victimes [Tribunal des complices]Where stories live. Discover now