Première partie - 1. Second jugement échoué

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DAWSON

Yeux fermés. Mains menottées. Brouhaha incessant.

— Silence ! hurle un homme depuis l'intérieur. Faites entrer l'accusé.

Deux flics poussent les hautes portes grinçantes et je lève la tête en prenant une grande inspiration. Lorsque j'ouvre les yeux, je suis surpris de voir autant de monde se lever. Je m'attendais à ce que les bancs vides me fassent un petit coucou avant de retourner en taule, mais faut quand même pas se leurrer.

Les banquettes en bois massif sont alignées de façon à m'indiquer le chemin vers l'abattoir. J'avance muettement, les gens chuchotent à mon passage et je serre la mâchoire, irrité de me retrouver dans cette situation de merde.

J'ai été signalé comme « détenu perturbé et possiblement violent » dès mon premier interrogatoire, alors je suis accompagné de trois mecs armés, chacun prêt à me coller une balle ou à me donner un coup de crosse si je ne respecte pas les conformités du procès. Ça ne m'empêche quand même pas d'avoir envie de planter leur face d'idiots de poulet dans le sol poli sous mes pieds, histoire qu'ils comprennent ce que ça fait d'être incriminé comme ça. Bordel.

Le juge de la séance se lève, lisse sa robe noire, affaisse ses lunettes aux verres ronds au bout de son nez et s'appuie sur son immense bureau. Si ses yeux accusateurs pouvaient m'enterrer, ce serait déjà fait. Mais je continue de soutenir son regard en fronçant les sourcils. J'ai rien fait, putain.

Je ne suis pas le coupable, je sais ce que j'ai fait, mais si je l'ouvre, personne ne me croira. Même si toutes les preuves se retournent contre moi, je ne suis pas responsable de ce qu'il s'est passé. Il faut absolument que ces connards comprennent que je ne suis pas le bon type et qu'ils se trompent lourdement sur moi.

Aujourd'hui, c'est mon second procès. Et au bout de celui-ci, je vais tranquillement retourner croupir en taule et j'en ressortirai sûrement lorsque j'aurais 60 piges passées. Et encore, je ne sais même pas si j'en sortirais ! Je sais qu'ils ont besoin de résoudre cette affaire au plus vite, les médias ont besoin de réponses, ils ont suffisamment de preuves théoriques pour m'inculper du meurtre d'Amber Hawkins.

Ouais, ouais.

Un meurtre.

Mais il y a un hic : je n'arrive pas à expliquer ce qu'il s'est passé. Les gens ont un don pour déformer les faits et je suis persuadé que ça va encore me faire défaut. Alors je la boucle. C'est très facile de faire porter le chapeau à un innocent muet, mais sont-ils au moins conscients de ce que l'on peut ressentir en découvrant un corps ensanglanté après une longue journée de travail ? Je ne comprends même pas comment ils peuvent se permettre de penser que c'est moi, je vivais avec Amber, bordel !

— Asseyez-vous, annonce le vieux.

Mon avocate est debout devant une table à ma gauche. Une vieille pie qui doit avoir la cinquantaine, brune avec un visage rond légèrement ridé, des yeux marron foncé cachés derrière des binocles ovales et des nibards touchant presque le parterre. Pour le coup, on peut dire que je ne fais pas parti des chanceux ayant l'occasion de s'enfiler son avocate dans le seul but de supplier mon innocence devant la cour d'assise. Plutôt mourir que d'essayer de la baiser même si ça pourrait être facile. Trop facile. Elle aussi croit que je suis coupable, j'ai décroché un avocat d'office pas terrible, je ne suis pas plein aux as et j'ai refusé l'aide financière d'Amber lorsqu'elle était encore là. Question d'égo. La seule chose que j'ai accepté, c'est rester dans l'ombre pour ne pas qu'on me fasse chier. En soit, personne ne me connaissait avant son décès.

Je sors de mes pensées lorsque le gars derrière moi me pousse pour que je m'asseye à côté de mon avocate et le flic me retire la chaîne reliant mes poignets à mes chevilles en restant à côté de moi.

Victimes [Tribunal des complices]Where stories live. Discover now