Chapitre 9

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♪ Hold On - Shawn Mendes ♪

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Il ne veut pas partir. Nous sommes à la cafétéria de l'hôpital depuis déjà une heure. Abby et lui ne s'arrêtent pas de parler, et je les écoute attentivement. Ils ont tellement de choses à se dire, c'est impressionnant. J'ai bien fait d'aller le rattraper. Je le vois, ça lui fait du bien de discuter avec elle.

— Ce chenapan se sauvait dès qu'il le pouvait au début. Et il faut croire qu'il était rapide ! Il nous semait bien vite avec son fauteuil.

— C'était vraiment trop facile, répond-il en riant. Abby finissait toujours par me trouver en première. Elle tentait d'être sérieuse, puis elle finissait par exploser de rire.

— Tu étais mon petit protégé, je ne pouvais pas te gronder trop longtemps, sourit-elle en attrapant sa main.

— C'était quel genre d'enfant ? questionné-je.

— Au début, c'était un petit garçon très renfermé. Il ne parlait jamais. Ni au personnel, ni aux enfants, et encore moins aux psychologues. Et une nuit, je l'ai entendu pleurer dans sa chambre. J'avais fini mon service, mais je ne pouvais pas le laisser comme ça, c'est évident. Alors je suis entrée et il m'a demandé de venir le border. Il s'est endormi dans mes bras. Je ne suis pas rentrée de la nuit. Et le lendemain, il m'a demandé mon prénom. Et c'est comme ça qu'il s'est ouvert, du moins à moi.

Je le regarde. Décidément, je ne pensais pas que ça avait été si difficile. Il me sourit doucement.

— Je n'étais pas très sociable, déclare-t-il.

— Tu ne l'es toujours pas, le taquiné-je.

Il lève les yeux en l'air, amusé. Abby nous regarde en souriant, l'air pensive. Je me demande ce qu'elle pense de nous. De moi.

— Mais tu n'as pas changé physiquement, continue-t-elle. Tu as toujours eu cette petite bouille adorable et tes cheveux bouclés. Mon Dieu, on en a passé du temps à te les démêler ! Il refusait de les couper. Attendez, je suis sûre d'avoir des photos dans mon téléphone...

— Eh, je pourrai porter plainte, plaisante-t-il.

— Essaie mon grand, essaie... Ah, les voilà ! Qu'est-ce que tu étais mignon.

Elle lui tend le cellulaire et je me rapproche de lui, curieuse de voir à quoi il ressemblait étant enfant. Je ne l'avais vu qu'une fois, aux alentours de dix ans, sur une photo dans la chambre de sa sœur.

— Et bah... Je ne me souvenais même pas de ces photos.

Un sourire s'étend sur mes lèvres lorsque je le vois. Il est tout petit. Dans ce fauteuil roulant, il ne sourit pas. Il fait la moue, mais ses yeux sont cachés par de longs cheveux blonds et très bouclés. Encore plus qu'ils ne le sont aujourd'hui.

Je fais glisser mon doigt sur l'écran. Cette fois, il sourit à pleine dents. Il n'est pas dans son fauteuil, mais dans les bras d'Abby. Il a l'air heureux. Et chose incroyable, on pourrait croire qu'elle est sa mère. Ils se ressemblent tellement sur la photo, c'est à ne pas y croire. Leur seule différence, c'est la couleur de leurs yeux. Ceux de l'infirmière sont bruns. Je me souviens d'une phrase que j'avais lue quelque part, comme quoi on ressemble aux personnes que l'on aime. Il en est la preuve.

— Vous vous ressemblez tellement, lancé-je, un peu choquée.

— Je l'appelais maman des fois, et elle me reprenait souvent. Ça me brisait le cœur, avoue-t-il en lui souriant.

Neptune 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant