N.A.

5. Noa : Au balcon

Jonathan est très... tactile et agréable. J'évite le moindre contact que l'on pourrait avoir, je ne veux pas flancher et regretter après. Je respecte Jason, je ne veux pas que mon couple s'effondre parce que j'aurais fait preuve de faiblesse l'espace d'un instant. Pourquoi ai-je d'ailleurs ce genre de raisonnement ? Tout a toujours bien fonctionné avec Jason, on est à l'abri de ce genre de risque, nous !

Au fil des échanges que nous avons eus, j'ai appris que le brun de 25 ans travaille dans le commerce, tandis que son ami Chris est dans la Navy. Ils vivent en colocation et j'apprends lors du dîner que Zooey et Jonathan ont divorcé il y a un an après six mois de mariage. Ça m'a beaucoup surprise puisqu'ils s'entendent assez bien, je suppose donc que c'était un divorce à l'amiable.

Dès que 23 h 30 sonnent, les deux compères décident de rentrer. Jonathan doit aller voir sa sœur le lendemain et Chris, rentré depuis deux jours de sa mission, a besoin de repos. Je les salue, referme la porte et Zooey m'informe qu'elle va débarrasser la table avant d'aller dormir. Je propose de l'aider, mais elle refuse, aussi je file dans ma chambre et ouvre la porte-fenêtre. Vais-je revoir le voisin mystère ? Cette fois, pas question de sortir en petite tenue, je garde mes vêtements. J'allume ma cigarette et jette un œil au balcon voisin. Il est là ! Assis à même le sol, adossé au garde-corps, il marmonne des trucs incompréhensibles. Il pose un verre à côté de lui.

— Ça va ? demandé-je avec une pointe d'inquiétude.

Il sursaute légèrement ; il ne m'avait pas encore remarquée. Il se tourne pour me faire face.

— Ouais..., jure-t-il en fermant les yeux. Déjà là, après une... une semaine sans fumer ?

Alors il a remarqué que je m'étais absentée... Je devrais rentrer, mais j'en suis incapable : il pique bien trop ma curiosité. Qu'est-ce qui a bien pu le mettre dans un état pareil ?

— Laisse-moi deviner : ta copine ne veut pas coucher avec toi ? lancé-je en expirant la fumée.

— Même pas, ricane-t-il. Trois semaines qu'on n'a pas baisé. Et... elle quitte l'appartement demain matin.

Il prend son verre et boit une gorgée avant de se relever en tanguant.

— Pourquoi ?

Il fronce ses sourcils épais en fermant les yeux. Bon, cette fois, c'est clair : il est complètement ivre.

— Elle est rentrée à 20 h. Elle faisait du shopping, ajoute-t-il hilare.

Mes yeux s'arrondissent de surprise, mais je le laisse malgré ça continuer son récit. Il a besoin de parler, je le sens. Est-ce qu'il m'a volontairement attendue sur son balcon afin que nous en discutions ? Ça fait longtemps qu'il se saoule assis par terre comme un clochard ayant perdu la boule ?

— Et là, éc-écoute bien... Elle m'annonce qu'on n'a plus de bébé. Envolé. Pffou. Comme ça. Plus de bébé. Jolie connerie de faire un gosse, hein ?

C'est pas possible...

— Comment elle s'appelle ? le questionné-je pour me rassurer.

Et si c'était la femme avec qui j'ai passé l'après-midi à flâner dans les boutiques ? La fille nommée...

— Ilène Meester, annonce-t-il en laissant tomber son verre par-dessus le garde-corps. Merde.

Le verre se brise quelques mètres plus bas et le son me glace le sang. Alors c'est de lui dont elle m'a parlé ?

Ilène m'affirmait qu'il est un homme d'honneur, il prend toujours sur lui pour respecter sa parole. Or sa façon de penser est d'une complexité surprenante, comme si c'était une invitation à le connaître. C'est ça qui l'a tout de suite attirée et je crois que je comprends.