Act. 5

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         La mélodie de la musique qui a rythmé ma vie et mon enfance s'échappe de l'enceinte que Sacha a déposé sur le sol de la scène. Je suis conviée à commencer, la rage dans les veines. Au-delà du fait que je connais cette chanson sur le bout des doigts, je ne peux pas perdre alors qu'elle est ma préférée.

Nous savons tous les deux que Loris ne sera jamais objectif. Lorsque c'est comme ça, il s'agit de mettre son égo de côté. À la fin, il va falloir admettre qui a été meilleur, et je ne suis pas sûre d'arriver à lui accorder une victoire.

Don't tell me not to live, just sit and putter, commencé-je d'une voix forte.

Pas question de lui laisser croire que j'ai perdu de mon talent pour le surprendre plus tard. Je suis la meilleure du début jusqu'à la fin, je n'ai pas besoin de me rabaisser pour qu'il pense que je suis plus forte que lui... c'est déjà le cas.

Who told you're allowed to rain on my parade ?

Au moment où je prononce cette phrase, j'enfonce mes ongles dans la paume de ma main tant je la pense. Je pousse ma voix, les sourcils légèrement froncés, et il me coupe :

— I'm marching my band out, I'll beat my drum...

Mon cœur se soulève à l'instant même où j'entends le timbre de sa voix, puis il retombe dans le creux de mon ventre. J'avale discrètement ma salive, lui laissant le temps de briller. Je crois en moi, Dieu seul sait à quel point, mais ce connard de Sacha est époustouflant. Ce n'est pas simplement sa façon de chanter, c'est un tout. Sa façon d'interpréter la musique, de bouger, ses expressions du visage.

Mais la musique est dans mon sang, dans mon cœur, dans ma tête, alors je reprends le dessus :

I gotta fly once, I gotta try once. Only can die once, right, sir ?

Oh lice juicy, juicy and you see... enchaîne-t-il.

I gotta have my bite, sir.

Je ne lui laisserais pas les paroles qui suivent, pas alors qu'elles me motivent. Je ne peux pas lui donner Don't rain on my parade, car cette musique symbolise purement le fait de repousser tous les gens qui tentent de nous prendre la lumière. Cette musique, c'est la représentation parfaite de ce que je ressens tous les jours, de cette flamme en moi qui brille si fort qu'elle n'attend qu'à se faire une place.

Alors je chante, mieux que je n'ai jamais chanté face à lui, et je lui montre qu'il n'aura jamais mon niveau :

Get ready for me love 'cause I'ma comer

I simply gotta march, my heart's a drummer

Don't bring around a cloud to rain on my parade.

Nous nous battons jusqu'à la fin. Nous ne lâchons pas et ne montrons aucun signe de fatigue non plus. Il me cherche du regard, cherchant à me pousser à bout, et mon talent l'horripile. Le fait que je me sois améliorée en quatre ans le rend complètement dingue, je le vois bien. Il pensait m'avoir rattrapée, j'en suis sûre, mais il n'y arrivera jamais.

Je lui vole la fin de la musique, plongeant mon regard dans le sien :

Nobody, no, nobody gonna rain on my parade !

Je tiens la note, les yeux fermés et les mains participant à cet effort. Lorsqu'on chante, ce ne sont pas seulement les cordes vocales qui vibrent. C'est tout le corps entier qui participe et qui vit la musique. J'accomplis, je l'espère, ce que Barbra Streisand a été capable d'accomplir. Cette note de fin et cette force incroyable dans sa voix.

SupernovaWhere stories live. Discover now