Harry.
Je soupirai en déposant l'immense sac de farine sur le comptoir de la boulangerie. J'avais une tonne de miches de pain à faire, aujourd'hui, étant donné que les Fêtes arrivaient très, rapidement.
Souriant en voyant une cliente qui entrait dans la boutique, je laissai de côté le sac de farine, pour aller la servir.
-Bonjour, dis-je en essuyant rapidement mes mains sur mon tablier. Qu'est-ce que je peux vous servir?
Elle me demanda une miche de pain aux raisins, tranchée. Je me déplaçai donc vers l'appareil qui tranchait chaque tranche également, lorsque la porte s'ouvrit. Relevant le regard, j'eu envie de tout arrêter et d'entrer six pieds sous terre. Valerie était dans la boulangerie, en complet.
Je terminai de trancher la miche pour la cliente, avant de la faire payer et de la remercier. Lorsqu'elle sortit, je m'exilai de mon comptoir, pour aller près de Valerie, qui regardait les paniers-cadeaux qu'un traiteur vendait, ici, durant le temps de Noël.
-Tout va bien? Tu n'es pas censé travailler? demandais-je en m'assoyant sur une table.
-J'ai reçu une lettre, de l'enseignante d'Eliott, pour confirmer qu'elle devait bien lui donner quatre billets, pour la pièce de théâtre.
-D'accord.. Où est-ce que tu veux en venir? Tu ne pouvais pas m'en parler au téléphone?
-Elle vient? murmura simplement Valerie, le regard enragé.
-Qui, elle? Ma mère? Ma tante? Rosie, la petite cousine d'Eliott?
J'allais embarquer dans son petit jeu. Valerie pouvait parfois faire des enfantillages, c'était effroyable. Franchement, on ne parlait pas du mariage de son fils, mais bien d'une petite pièce de théâtre pour enfant.
-Arrête de rigoler, Harry. Tu sais très bien de qui je parle, dit-elle en me fixant dans les yeux.
Je soupirai en me levant de la petite table, pour retourner derrière mon comptoir, continuer mes pains. J'entendais ses talons qui claquaient contre le sol de bois. Elle était en furie.
-Putain, oui! dis-je en me retournant comme un malade, parce que je n'en pouvais plus. Oui, Astrid sera à la pièce, d'accord? Mais c'est Eliott qui le voulait. Et il a foutrement le droit de vouloir qu'Astrid soit là. Arrête, merde!
Elle me regardait en mordillant sa lèvre inférieure, essayant presque de se retenir d'arrêter de pleurer.
-Merde, Val! On ne sort plus ensemble. Pourquoi est-ce que tu aurais le droit d'avoir Daniel dans ta vie et que moi, je ne peux avoir personne, hein? À la limite, je pourrais comprendre, si tu étais célibataire, mais tu as un enfant avec Daniel, vous êtes mariés! Alors qu'est-ce que ça te fait que je sorte avec quelqu'un?
-Elle est plus jeune que moi! Et je suis certaine qu'elle fait exprès de ma prendre ma place auprès d'Eliott! cria Val.
J'éclatai de rire en secouant la tête. Décidément, elle était complètement timbrée.
-Va foutre la merde chez quelqu'un d'autre, Valerie. Tu dis des conneries et tu le sais très bien. Je ne vais te dire qu'une chose: Eliott se rend déjà compte que tu ne passes pas vraiment de temps avec lui, que Jade est la priorité et que lorsqu'il est chez toi, c'est comme s'il était invisible. Ce n'est pas un con, notre enfant! Et si tu n'arrêtes pas de te faire des idées à propos d'Astrid, je peux t'assurer qu'il le sentira aussi. Putain! Tu as la chance d'avoir deux enfants, d'avoir un emploi qui te plaît et un conjoint! Arrête de t'occuper de ma vie, Val. Si tu as si peur de perdre Eliott, c'est peut-être parce que tu sais que tu pourrais t'améliorer.
Elle déglutit en me regardant, avant de quitter la boulangerie, sans dire un mot. J'y étais peut-être aller fort, mais j'en avais assez. J'aimais Astrid et elle faisait partie de la vie d'Eliott, maintenant.
***
-Mamie! cria Eliott en courant vers ma mère, qui venait d'ouvrir la porte.
Elle nous avait invité à dîner, à la dernière minute. Et pour me changer les idées des événements de ce matin, j'avais décidé d'accepter.
-Bonjour, mon petit Eliott! Je me suis ennuyée!
Astrid regardait Eliott et ma mère en souriant. Elle tourna la tête vers moi, fronçant légèrement les sourcils.
-Tu es certain que tout va bien? chuchota-t'elle.
J'hochai la tête en souriant légèrement, balayant l'air de la main.
-Je suis juste un peu fatigué. C'est super occupé à la boulangerie, à cause du temps des Fêtes, expliquais-je.
La vérité, c'est que je n'avais pas envie de lui parler de l'incident de ce matin. Je savais que ça la rendrait mal à l'aise, surtout en sachant que la pièce de théâtre était demain soir.
-Bonjour! Je suis Anne, s'exclama ma mère en s'approchant d'Astrid, lui tendant la main.
-Astrid, sourit-elle. Ravie de vous rencontrez.
-Tu peux me tutoyer, tu sais. Tiens, je vais prendre ton manteau et le ranger dans le placard. Eliott, donne-moi ton manteau!
Je souris en le voyant qui courait, encore vêtu de son manteau, de sa tuque et de ses gants.
-Papi, il est en train de couper le sapin, dans le bois! Je l'ai vu par la fenêtre! sourit Eliott en se débarrassant de ses vêtements chauds, le sourire aux lèvres.
-Tu vas pouvoir le décorer avec Mamie, alors, dis-je en souriant.
-Et avec toi et Astrid et Papi, aussi! Mamie, Astrid elle est super bonne pour décorer les sapins, tu sais!
Je tournai les yeux vers Astrid, qui souriait en rougissant légèrement. Ma mère nous regardait tous les trois, le sourire aux lèvres.
Maintenant complètement arrivés, Eliott qui jouait avec le chien et mon père qui terminait d'abattre l'arbre, ma mère était en train de nous servir un verre de vin.
-Alors, Astrid. Qu'est-ce que tu fais comme travail? demanda-t'elle en lui tendant sa coupe.
-Je suis propriétaire d'une boutique, juste à-côté de la boulangerie d'Harry. Et... c'est une genre de brocante, en fait. Je récupère les vieux objets, je les remet en bon état, j'essaie de me renseigner quant à leurs histoires, leur vécu, expliqua-t'elle en haussant les épaules, à la fin.
-Eliott est devenu un accro aux vieilles bandes-dessinés de Superman, dis-je en souriant, parce que ma mère savait à quel point j'adorais ce genre de bd, plus jeune.
-Oh! Ça semble super intéressant! dit ma mère en souriant. Je devrai assurément aller y faire un tour, alors. Vous devriez aller regarder dans le grenier, je suis sûre que tes bandes-dessinées y sont encore! Et profites-en pour lui faire visiter la maison, Harry.
Astrid rigola doucement, avant de tourner la tête vers moi. Lui faisant signe d'approcher, je me mis à lui faire visiter ma maison de jeunesse.
Elle m'écoutait parler de chaque pièce, alors que je lui racontais certains souvenirs. Nous étions rendu à ma chambre. Avançant vers mon lit, je soupirai en m'assoyant dessus, fixant le lit de bébé d'Eliott, qui était juste à côté.
-Ça va? chuchota Astrid en s'assoyant près de moi, prenant ma main dans la sienne, doucement.
-Tu te rends compte que j'ai passé des nuits ici, à dormir près d'Eliott, alors qu'il n'était qu'un tout petit bébé. Je dormais chez mes parents avec mon fils, parce que j'étais en processus de me louer un appartement, de décider ce que j'allais faire de ma vie. Et... j'aurais pu faire le con et décider de ne pas prendre mes responsabilités. Décider de laisser Valerie s'occuper du bébé toute seule, continuer de vivre ma jeunesse et m'enfuir. Mais je suis resté, j'ai appris à changer une couche, à faire manger un bébé, à introduire les aliments selon les risques et les dangers d'allergies, d'étouffements et d'intolérances. Et putain, j'ai l'impression qu'elle n'est jamais fière de moi, chuchotais-je en regardant le sol. Que je ne fais que de la merde, selon elle. Et je sais que je suis un bon papa, mais... j'ai l'impression que c'est tout le contraire.
Je déglutis en sentant une boule, dans ma gorge. La crise de Valerie m'avait secoué, je devais l'avouer. C'était comme si je n'en faisais jamais assez. Comme si je n'avais pas le droit d'avoir Astrid dans ma vie.
Je sentais la main d'Astrid, qui serrait la mienne. Et son autre main, qui était contre ma nuque, ses doigts bougeant doucement contre mes cheveux.
-Harry, chuchota-t'elle en secouant la tête. Tu es un papa formidable. Tellement formidable. Et contrairement à la majorité, tu as pris tes responsabilités envers ton fils et ça, c'est déjà gros. Je n'ai jamais vu un enfant aimer autant son papa. Tu devrais voir Eliott, quand il me parle de toi, quand il me dit que vous êtes allés au parc, quand il me dit que tu as joué avec lui au super-héro. Il rayonne, cet enfant, tu ne sais pas à quel point il est heureux de t'avoir, comme papa.
Elle prit une petite pause, avant de continuer.
-Je ne sais pas comment est ta relation avec Valerie, maintenant, mais... il ne faut pas que tu crois ce qu'elle te dit, ce qu'elle essaie de te faire croire. Tu as le droit d'être heureux. Et je ne dis pas ça parce que je suis amoureuse de toi, mais vraiment, je n'ai jamais vu une telle relation entre un père et son fils, Harry. C'est de l'amour pur.
Astrid me sourit en me fixant.
-Je sais, chuchotais-je en prenant une grande inspiration. C'est juste que ce matin, Valerie est venue me voir, pour me faire une crise de jalousie, littéralement. Et ça m'a retourné, je n'ai pas arrêté de penser à pleins de trucs, à toi, à moi, à Eliott.
Je soupirai en déglutissant, haussant les épaules. C'était peut-être juste la fatigue, après-tout. Les vacances des Fêtes arrivaient bientôt et je pourrai enfin me reposer avec Astrid et Eliott.
-On s'en fout, chuchota Astrid en souriant. On s'en fout de ce qu'elle dit, d'accord? L'important, c'est que ton fils soit en santé et heureux et que toi aussi, tu sois heureux.
J'hochai la tête, fixant Astrid quelques secondes, me demandant bien comment j'avais pu rencontrer une personne aussi extraordinaire, lorsque j'entendis des pas et des rugissements de dinosaure.
Je souris en voyant Eliott qui s'approchait de la chambre, un dinosaure en main.
-Papi a rentré le sapin, papa. Et il est vraiment très haut. C'est le sapin le plus haut de tout l'univers, dit-il en souriant.
Il s'approcha de moi, faisant semblant de faire marcher son dinosaure sur la commode, avant de s'asseoir sur moi.
Je déposai mon menton contre sa petite tête, le serrant contre moi. Astrid souriait en nous regardant.
-Papi prend toujours les sapins les plus haut, ajoutais-je en me souvenant de Noël, quand j'étais plus jeune.
-Parce que Papi est un super-héro super fort donc il est capable de prendre les plus gros sapins. Il est un super-héro comme toi et comme moi. Et Astrid et Mamie, ce sont des princesses.
-Je suis une princesse? demanda Astrid en souriant, regardant Eliott.
Je souris en lui jetant un coup d'oeil.
-Oui, tu es une princesse. Et tu as une robe... mauve et Mamie a une robe rose, expliqua Eliott en souriant.
-Et Hansel le chat, c'est un super-héro? demandais-je.
Eliott secoua la tête, déposant son dinosaure sur mon épaule.
-Non, Hansel c'est un lutin, parce qu'il est tout petit, comme les lutins, expliqua Eliott en me regardant comme si j'étais un idiot, de ne pas avoir réalisé que notre chat était un lutin.
-C'est vrai, je n'avais pensé à ça, dis-je en regardant Astrid, rigolant doucement avec elle.
***
Nous étions en train de manger le dessert, dans le salon, pendant qu'Eliott, Astrid et ma mère décoraient le grand sapin.
-Mamie! Tu sais que maintenant, on a un chat, à la maison? demanda Eliott en s'approchant de moi, parce que je tenais son assiette avec sa petite part de gâteau.
Il prit une bouchée et retourna près du sapin.
-Un chat! Il s'appelle comment? demanda-t'elle en souriant.
-Il s'appelle Hansel le chat. Et il est orange. C'était un tout petit bébé quand on l'a trouvé. Et il avait froid et il avait peur. Mais quand il a vu que nous étions très gentils, il a décidé de venir habiter avec nous, raconta Eliott.
J'entendais Astrid qui rigolait, en écoutant la version un peu fantastique de l'histoire d'Eliott.
-Et Hansel le chat, c'est un gentil chat. Mais papa il le dispute, parfois, quant il dort sur le comptoir ou dans le bol de fruits. Mais il est un gentil chat, Hansel. Je vais l'apporter à Noël, dans ma valise de dinosaure, pour ne pas qu'il ait froid. Tu pourras le voir. Et toi aussi, Papi!
Je souris en le regardant, qui souriait en gesticulant.
-Il ne vas pas manquer d'air, dans la valise? demanda Astrid en regardant Eliott.
-Mais non, je vais ouvrir un peu la fermeture éclair, Astrid!
J'éclatai de rire, avec ma mère et mon père.
-Franchement, Astrid! Il faut réfléchir, dans la vie! dis-je en souriant, lui lançant un clin d'oeil.
Elle éclata de rire en s'approchant de moi, pour prendre sa tasse de café, avant de s'asseoir sur le canapé et de poser sa tête contre mon épaule.
-Tu crois à tout ce que je t'ai dit? chuchota-t'elle. Tu vois à quel point il t'aime, pas vrai?
Et j'hochai la tête. Même si j'avais eu quelques inquiétudes, tout à l'heure, je savais qu'Eliott était le petit garçon le plus heureux de tout l'univers.
***
:)
trop mignoooon.
je vous aime.
l.xx