Pulling a Bradbury

By somebaudy

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“Écrire un roman, c’est compliqué: vous pouvez passer un an, peut-être plus, sur quelque chose qui au final... More

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Floraline et le raton laveur

Dans la vie, on a toujours le choix

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By somebaudy

Dans la vie, on a toujours le choix. Je vous donne quelques exemples :

- Aller à Paris visiter un salon professionnel en voiture

Ou

- Aller à Paris visiter un salon professionnel en Thalys

Je choisis le train.

Pourquoi je choisis le Thalys : parce que je prends la parole lors d'un atelier-débat : « Aléseuses-fraiseuses à l'heure de l'Internet des objets : perspectives et réalités » et que je souhaite relire mes notes.

- Prendre un billet Confort 1

Ou

- Prendre un billet Confort 2

Je choisis Confort 1

Pourquoi je fais ce choix : C'est plus l'algorithme qui remplit les trains en faisant payer un maximum à un maximum de monde qui a fait ce choix pour moi. Au moment où j'ai réservé, les billets Confort 1 étaient moins chers que les Confort 2.

- Rester silencieux

Ou

- Adresser la parole à ma voisine de compartiment

Je choisis de lui adresser la parole.

Pourquoi je fais ce choix.

Parce qu'elle a la beauté étrange des femmes slaves, parce qu'elle a la pommette taquine et le regard félin, parce qu'elle est passée d'une revue scientifique en italien à une revue scientifique en anglais tout en répondant - en russe - à un correspondant. Parce qu'elle emploie un modèle de smartphone que je n'ai jamais vu et que je change de smartphone plus souvent que d'avis sur qui va gagner la Barclays Premier League cette année.

Proposer d'aller lui chercher un café à la voiture bar

Ou

Ne pas lui proposer d'aller chercher un café à la voiture bar

Je choisis de lui proposer

Pourquoi je fais ce choix : parce que la conversation est bien engagée entre nous, parce qu'elle m'a dit qu'elle a quitté son petit ami il y a six mois, parce qu'elle parle un français parfait, parce qu'elle a un rire si joli qu'on voudrait que ce soit un animal pour le montrer à des enfants dans des zoos ou dans des documentaires. Ce n'est pas un petit animal mignon, c'est juste un petit rire. Tout ce qu'elle dit à mon sujet me met en valeur. Elle s'intéresse aux mêmes choses que moi, tout ce que je dis a l'air de la passionner. Bref, c'est le genre de femme qui donne envie qu'on lui propose un café.

Me précipiter vers ma place et poser le gobelet pour le thé de Ekaterina

Ou

Laisser passer le vieux prêtre noir et aveugle que les journalistes et photographes ont accompagné jusqu'à la porte du Thalys

Je choisis de laisser passer.

Pourquoi je fais ce choix : parce que j'espère impressionner Ekaterina, parce que ce vieux monsieur a un visage doux et paisible avec un large sourire, parce que je me dis que ça me fait un point de karma, parce qu'on m'a appris à respecter les vieux, les aveugles et dans une autre mesure les noirs et les ecclésiastiques et que là, c'est le grand cumul.

Après avoir renversé une goutte de mon café sur sa jupe beige clair, regarder le visage de Ekaterina

Ou

Après avoir renversé une goutte de mon café sur sa jupe beige clair, regarder les jambes, les mollets, les chevilles et les escarpins de Ekaterina

Je choisis de regarder les jambes (et les mollets, les chevilles et toutes ces autres courbes qui m'arrivent droit au coeur). Je choisis accessoirement d'éponger la tache avec un mouchoir en papier. Ekaterina me répète que ce n'est pas grave, vraiment, on ne voit plus la tache, on la devine à peine, personne ne peut savoir.

- « Ce sera notre petit secret »

Elle a une façon très amusante de prononcer « secret ». On dirait qu'elle se prépare à croquer un macaron.

Quand Ekaterina me dit qu'elle a un TOC et qu'elle me demande de lui tenir la main entre la descente du train et l'extérieur de la gare du nord : accepter de lui tenir la main pendant cinq bonnes minutes.

Quand Ekaterina me dit qu'elle a un TOC et qu'elle me demande de lui tenir la main entre la descente du train et l'extérieur de la gare du nord : me méfier et trouver ça louche qu'elle emploie le coup du « j'ai un TOC, vous allez rire, Alexandre... oh, permettez que je vous appelle Sacha. Vous pouvez m'appeler Ekaterina Vladimirova.. »

Je choisis d'accepter.

Pourquoi je fais ce choix : parce que c'est un feu vert gros comme la tour Eiffel, parce qu'un échange de numéros de téléphone, d'adresse mail et de beaucoup plus si affinités ne saurait tarder. J'entrevois des promenades le long de la Seine, un repas dans un endroit chic, peut-être le restaurant de mon hôtel ou le sien suivi de ce que l'usage a décidé de pudiquement appeler « un dernier verre » alors qu'il ne s'agit pas d'un verre, qu'il s'agirait ici de quelque chose qui se produit pour la première fois et pas forcément une seule fois.

Quand Ekaterina Vladimirovna me dit qu'elle prend un taxi pour le Boulevard Lannes me demander s'il y a bien un hôtel quelque part sur ce boulevard

Ou

Quand Ekaterina Vladimirovna me dit qu'elle prend un taxi pour le Boulevard Lannes ne pas me poser de question, décider qu'il y a probablement là un hôtel-boutique, une bonbonnière, quelque chose d'exclusif et de raffiné, que c'est l'écrin parfait à la beauté d'Ekaterina Vladimirovna et l'imaginer en négligé, soignée jusqu'au bout des ongles sang m'attendre sur un dessus de lit en satin crème.

Je choisis de ne pas me poser de question.

Pourquoi je fais ce choix : parce qu'il n'y a pas assez de sang dans mes hormones pour que je puisse réfléchir, parce qu'une partie importante de mon sang est en train de faire turgescent un organe et n'est donc pas en train d'oxygéner mon cerveau.

Quand Ekaterina Vladimirovna monte dans une voiture sans plaque d'immatriculation, sans « taxi » indiqué nulle part, quand le chauffeur touche ses lunettes en nous regardant arriver, main dans la main : me méfier. Qui peut conduire une limousine allemande noire sans immatriculation dans un pays qui sursaute au moindre poil de barbe ?

Ou

Quand Ekaterina Vladimirovna monte dans une voiture sans plaque d'immatriculation, sans « taxi » indiqué nulle part, quand le chauffeur touche ses lunettes en nous regardant arriver, main dans la main : décider que décidément les hôtels du Boulevard Lannes ont des privilèges excentriques ou alors que la voiture est tellement neuve que pas encore immatriculée ou alors que mes yeux me jouent des tours : le chauffeur vient de toucher la monture de ses lunettes avec l'index droit. Personne n'a besoin de toucher la monture de ses lunettes à l'extrémité des branches la plus loin des oreilles.

Je choisis de décider qu'Ekaterina étant une femme tout à fait extraordinaire, il est normal qu'elle se déplace dans des véhicules eux aussi hors du commun.

Pourquoi je fais ce choix : parce qu'à l'évidence l'ennuyeuse logique minéralogique ne s'applique pas à des êtres aussi différents du commun des mortels que Ekaterina. N'a-t-elle pas un smartphone d'un modèle que je n'ai jamais vu, nulle part ?

Me rendre au parc des expositions de la porte de Versailles en métro

Ou

Me rendre au parc des expositions de la porte de Versailles en taxi

Je choisis le taxi

Pourquoi je fais ce choix : parce que je veux un peu d'intimité et un peu de silence pour penser très fort à Ekaterina Vladimirovna, tant que son visage est tellement près dans mon souvenir qu'en tendant le bras vraiment fort je pourrais le toucher.

Après l'atelier-débat sur les aléseuses-fraiseuses, rentrer à Bruxelles, oublier Ekaterina Vladimirovna, reprendre le cours de ma vie de consultant dans un cabinet avec un nom américain.

Ou

Après l'atelier-débat sur les aléseuses-fraiseuses, prendre un taxi et lui dire « Boulevard Lannes » sans plus de précision. Descendre au numéro 1 du Boulevard et l'arpenter entièrement, certain de tomber sur l'hôtel bonbonnière où Ekaterina Vladimirovna m'attend sur un dessus de lit en soie sang.

Je choisis d'aller Boulevard Lannes

Pourquoi je fais ce choix : parce que je croyais connaitre tous les quatre-étoiles et les palaces de Paris et qu'un hôtel qu'Ekaterina juge décor à la hauteur de sa beauté doit être, lui aussi, à couper le souffle.

Arrivé devant le 40-50, boulevard Lannes, ambassade de la Fédération de Russie en France, faire demi-tour, prendre le Thalys, rentrer à Bruxelles dans mon trois pièces en enfilade moitié Ikea, moitié Habitat, moitié antiquaires du Sablon et recommencer le cours prévisible de mon existence

Arrivé devant le 40-50, boulevard Lannes, ambassade de la Fédération de Russie en France, sonner à l'imposant parlophone et annoncer fièrement « bonjour, je cherche une certaine Ekaterina Vladimirovna, elle m'a dit qu'elle descendait dans un hôtel Boulevard Lannes et... »

Je choisis de sonner.

Pourquoi je fais ce choix : parce qu'au-delà des grilles, j'ai reconnu la limousine sans plaque minéralogique. Le chauffeur est en train de lui fixer une plaque commençant par CD. En me voyant il a le même geste que tout à l'heure : li touche les branches de ses lunettes à leur endroit le plus large, juste à côté des verres.

Quand la porte s'ouvre d'un vrombissement électrique élégant, décider de ne pas pénétrer sur l'extra-territoire où s'applique le droit russe, prendre un taxi pour la gare du Nord, acheter un yucca, le baptiser Ekaterina et passer à autre chose.

Ou

Quand la porte s'ouvre d'un vrombissement électrique élégant, poser un pas assuré sur le sol de l'extra-territoire russe, me diriger vers la porte principale du bâtiment.

Je choisis de poser un pas assurer sur un sol qui n'a pas l'air très très différent de celui que je viens de quitter.

Pourquoi je fais ce choix : parce que de toute évidence, Ekaterina est diplomate, fille, mère ou femme de diplomate, peut-être les quatre à la fois. Une chose est certaine : c'est ici qu'elle m'attend sur un dessus de lit en lin sang.

Quand Ekaterina Vladimirova apparait dans le hall d'entrée de l'ambassade me précipiter vers elle sans écouter ce qu'elle est en train de dire, les gestes qu'elle est en train de faire.

Ou

Quand Ekaterina apparait dans le hall d'entrée de l'ambassade observer attentivement son visage, prêter attention au geste qu'elle est en train de faire. Son doigt pointeur alterne entre sa jupe, toujours tachée et votre serviteur. Elle est, sans nul doute, en train de parler du prêtre noir, vieux et aveugle et de la minuscule goutte de café qui nous a rapproché.

Je choisis de me précipiter vers elle.

Pourquoi je fais ce choix : parce qu'une seconde passée loin de Ekaterina Vladimirnova est une seconde gâchée, que je suis impatiente de partager avec elle un repas, une conversation, de reprendre notre petit flirt là où nous l'avions laissé.

Comprendre qui est le Vladimir dans le nom patronymique de Ekaterina Vladimirovna en détectant un air de famille indéniable avec le portrait de Vladimir Poutine et tourner les talons aussitôt, courir comme je n'ai jamais couru tant que la porte du bâtiment n'est pas complètement fermée, franchir la grille, l'escalader s'il le faut, appeler la police avec mon smartphone, hurler pour attirer l'attention.

Ou

Comprendre qui est le Vladimir dans le nom patronymique de Ekaterina Vladimirovna en détectant un air de famille indéniable avec le portrait de Vladimir Poutine et trouver ça sympa d'avoir un petit flirtouillet avec la fille d'un membre du G8, avancer vers elle tout sourire et main tendue.

Je choisis d'avancer, tout sourire et la main tendue.

Pourquoi je fais ce choix : parce qu'avoir le numéro de portable d'une fille de chef d'état quand on travaille dans un cabinet de consultance c'est un raccourci express pour le grand bureau, l'assistante personnelle, le titre ronflant et le travail vraiment intéressant. Ras-le-bol des aléseuses-fraiseuses.

Entendre Ekaterina me dire dans un français glacial « Papa n'a pas du tout aimé ces photos » en voyant une photo de nous deux main dans la main, prise par le chauffeur de la limousine, me faire assommer, me réveiller en vomissant dans la soute inconfortable d'un avion militaire, sentir une piqûre, me rendormir, me réveiller quelque part sur l'immense territoire russe face à un peloton d'exécution, comprendre que Ekaterina n'aime vraiment pas qu'on tache sa jolie jupe beige de chez Courrège et demander un baillon.

Ou

Entendre Ekaterina me dire dans un français glacial « Papa n'a pas du tout aimé ces photos » en voyant une photo de nous deux main dans la main, prise par le chauffeur de la limousine, me faire assommer, me réveiller en vomissant dans la soute inconfortable d'un avion militaire, sentir une piqûre, me rendormir, me réveiller quelque part sur l'immense territoire russe face à un peloton d'exécution, penser que Ekaterina n'y est pour rien, que c'est une erreur, une farce, croire jusqu'au bout que tout va bien se passer et refuser le baillon.

J'avoue que pour ce dernier choix, j'hésite un peu. Une chose est certaine : j'aurais mieux fait d'aller à Paris en voiture.

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