ELEANOR
Mes mains se resserrèrent machinalement autour du volant, comme une tentative de garder sous contrôle la montée d'angoisse qui se formait en moi. Je tentais au mieux de garder mon attention sur la route, et de ne pas me laisser distraire par mes mains qui tremblaient violemment, au point où, il m'était difficile de les maintenir en place, tant elles étaient moites et glissaient du volant.
Je coupais le son de ma musique, restant sur mes gardes du moindre bruit suspect. J'essayais de me rassurer, en me disant que peut-être, cet individu ne me voulait aucun mal, et qu'il s'agissait sûrement d'une personne qui effectuait le même trajet que moi pour une bonne raison.
Mais alors que j'approchais de mon quartier résidentiel privé, je peinais de plus en plus à rationaliser.
Peut-être était-il un proche d'un de mes voisins qui venait simplement rendre une visite en pleine nuit...
Ça ne marches pas, trouve autre chose.
Sur un coup de tête, je décidais de changer ma trajectoire et pris une ruelle à sens unique, avec un rond point au bout, qui menait vers un cul de sac.
La seule raison qui pousserait quelqu'un à prendre cette rue serait qu'il vive ici, ou qu'il ait besoin de faire demi-tour.
Dans les deux cas, si cet individu prenait encore une fois le même chemin que moi, il y avait de grandes chances que cela signifie qu'il était entrain de me suivre.
Je pris une profonde inspiration alors que je tournais à gauche, mon cœur battant si fort qu'il résonnait dans l'habitacle de la voiture. La rue était à peine éclairée, ce qui ne faisait qu'augmenter mon angoisse.
Un tas de questions se bousculaient dans mon crâne, à présent que j'étais quasiment certaine que ce n'était pas Jungkook ; qui était cette personne, et que me voulait-elle ?
Alors que je pénétrais doucement dans la rue, la voiture qui roulait plusieurs mètres derrières moi, disparut de mon champ de vision.
Sans m'en apercevoir, je retenais mon souffle alors que les secondes s'écoulaient, attendant le verdict et m'imaginant le pire. Stationnée à l'arrache, je fixais mon rétroviseur, priant avec ferveur pour qu'aucune voiture n'y apparaisse.
Allait-il tourner ou continuer sa route ?
Était-il l'auteur de ces messages ?
Comment avait-il eu mon numéro ?
Pourquoi moi ?
Chaque seconde cumulait une nouvelle question qui ne faisait qu'aggraver mon taux d'angoisse.
Mon coeur pompait à tout rompre et si je n'étais pas occupée à m'inquiéter pour autre chose, je craindrais qu'il sorte de ma cage thoracique.
Soudain, une lumière aveuglante, venant de derrière, fit chuter mon cœur à mes pieds.
Il m'avait suivi.
Je m'enfonçais dans mon siège, me baissant instinctivement pour ne pas qu'il me voit.
Les larmes me montaient aux yeux alors que la peur s'emparait de mon corps, me tétanisant complètement à la réalisation.
Un inconnu m'avait suivi en pleine nuit jusqu'à une ruelle sombre, j'étais seule et sans défense.
J'avais donc très peu de chance de m'en sortir.
D'une main tremblante j'éteignis les lumières et verrouillais ma voiture, puis me saisit de mon portable qui était accroché au support de téléphone, sur le tableau de bord.
Je tentais tant bien que mal de garder ma respiration la plus silencieuse possible, pour ne pas attirer l'attention. Je restais baissé pour ne pas être vue et déverrouillais, non sans peine, mon smartphone.
J'ouvris la page de mes contacts et sélectionnait machinalement l'un d'entre eux. D'une oreille attentive, je m'accrochais au bips incessants de l'appel, espérant qu'ils cessent pour laisser place à une voix, sans pour autant détourner mon attention des bruits qui m'entouraient.
Les yeux clos, je subissais les secondes qui s'écoulaient comme une forme de torture.
" Allo Eleanor ? " Je me maudis intérieurement lorsque je réalisais qui je venais d'appeler.
J'étais tellement prise de panique que mon instinct m'avait poussé à l'appeler. Mais je repoussais cette pensée parasite au fond de mon esprit, ce n'était pas le moment de jouer les fiers.
" Jungkook ?" L'interrogeait-je d'une voix étranglée de surprise, comme si je n'étais pas celle qui venait de l'appeler.
" El, ou est-ce que tu es ?" Je l'entendais très mal, sûrement dû à un problème de réseau mais c'était suffisant. Comme une bouffée d'oxygène, je sentis mon coeur reprendre un rythme cardiaque plus ou moins décent. Même si la voix de Jungkook était à peine audible, c'était assez pour me calmer.
Entendre sa voix eut un plus gros effet sur moi que je ne l'aurais voulu, tant et si bien que ma gorge se noua, me rendant en incapacité de lui répondre. J'étais à deux doigts de fondre en larmes de soulagement, alors que je n'étais pas encore tirée d'affaires.
Mais j'étais certaine d'une chose. Même si ce soir cet homme réussissait à m'embarquer et que je disparaissais, Jungkook parviendrait toujours à me retrouver.
Voyant que je ne répondais pas, Jungkook bafouilla quelque chose que je ne parvenais pas à entendre, et pour cause, la voiture derrière moi s'approchait dangereusement de mon véhicule, et je ne parvenais plus à me concentrer sur quoi que ce soit d'autre.
Je fermais les yeux aussi fort que je le pouvais, libérant quelques larmes par la même occasion alors que je m'enfonçais au plus profond de mon siège.
Faites qu'il ne me voit pas,
Faites qu'il ne me voit pas,
Faites qu'il ne me voit pas.
La voiture cessa d'avance et je n'eu même pas le temps d'imaginer le pire, que mes craintes se réalisèrent.
J'entendais la portière de la voiture claquer, signe qu'il venait de sortir de l'habitacle et mes larmes redoublèrent.
Faites qu'il ne m'arrive rien,
Faites qu'il ne m'arrive rien,
Faites qu'il ne m'arrive rien.
" Jungkook je t'en supplie ..." Sauve moi, fut ce que je m'apprêtais à dire, mais le bruit de quelqu'un qui toquait à ma vitre me coupa net.
J'allais mourir ce soir.
A présent la peur avait totalement pris le contrôle de mon corps et de mon cerveau, je n'étais plus qu'une fontaine à eau, tant je pleurais. Je n'étais même plus capable de penser de façon cohérente, tant et si bien que je gardais les yeux fermés, comme quand j'étais petite lors des partie de cache-cache avec Adonis et que je pensais que si je ne le voyais pas, il ne pouvait pas me voir non plus.
Un nouveau bruit assourdissant contre la vitre.
De toute évidence il était en train de perdre patience, et ce n'était plus qu'une question de temps avant qu'il ne pète la vitre.
" Ouvre ! " Cria la voix de l'homme depuis l'extérieur de la voiture.
Je serrais mon téléphone de toutes mes forces contre mon oreille, espérant au moins que Jungkook puisse entendre tout ce qu'il se passait, même si moi je l'entendais mal.
" Eleanor ouvre cette porte ! " Répéta la voix dans le téléphone.
Comment connaissait-il mon nom ?
Puis tout à coup je réalisais que quelque chose clochait.
Chaque bruit qui venait de l'extérieur faisait écho dans mon téléphone, ce qui ne pouvait vouloir dire qu'une seule chose.
Je pris une profonde inspiration, priant de tout mon être de ne pas me tromper.
Je finis enfin par ouvrir les yeux puis tournais lentement la tête vers la fenêtre.
Tout mon corps se remis à fonctionner normalement et je crus m'effondrer de soulagement alors que mes yeux croisèrent deux énormes billes noirs et réconfortante.
Et cette fois-ci plus que jamais, je m'y perdit avec grand plaisir.
Car Jungkook se trouvait devant moi, me faisant signe de déverrouiller la voiture. Je pris quelques secondes pour revenir à moi-même, puis j'exécutais ce qu'il m'ordonnait et Jungkook ouvrit précipitamment la porte, avant de se pencher et de s'avancer vers moi, pour me saisir dans ses bras.
Je m'accrochais à lui comme à une bouée de sauvetage, le serrant de toutes mes forces. Mes larmes redoublaient alors que la pression retombait petit à petit.
" Chut, ça va aller." Me susurra t-il en me caressant les cheveux. Ma tête était nichée dans son cou et j'humais son odeur si familière qui me ramenait doucement à la réalité.
Jungkook me laissa profiter de ce havre de paix pendant encore quelques minutes, le temps de me calmer puis s'éloigna de moi et plaça ses mains sur mes épaules. Il planta ses yeux dans les miens en prenant un air sérieux.
" Je crois qu'il n'est pas encore partit, je dois aller vérifier, en attendant je veux que tu montes dans ma voiture et que tu t'y enfermes."
" Qu-quoi ? De qui tu parles ?" En voyant Jungkook j'avais tiré la conclusion que c'était lui qui me suivait depuis le début et que je m'étais simplement fait un film. Mais ses mots m'indiquaient le contraire.
" L'homme qui te suivait, je crois qu'il est au bout de la rue, à t'attendre." Aussitôt la boule dans mon ventre réapparut.
Alors je ne m'étais pas trompé, un homme m'avait bel et bien suivit jusqu'ici.
Mon cerveau se mit de nouveau à chauffer, me rendant dans l'incapacité de répondre.
" Eleanor!" Son ton était ferme et presque autoritaire, mais la pointe d'inquiétude dans sa voix ne m'échappait pas.
" Qu'est-ce que je fais de ma voiture ?"
" Tu la laisses ici, je viendrais la récupérer demain. Je ne sais pas ce qu'il veut, ni à quel point il peut être dangereux, alors il est hors de question que je te laisse rentrer seule. Alors tu vas monter dans ma voiture, verrouiller les portes et attendre gentiment que je revienne, c'est compris ?"
Son regard était sombre, je ne l'avais jamais vu dans cet état. Il semblait déterminé mais également alarmé, ce qui était une première pour Jungkook qui avait toujours un coup d'avance sur tout. Et cela me fit me rendre compte de la gravité des choses.
Tout ça me dépassait largement.
J'hochai la tête et sortit de ma voiture après avoir récolté mes affaires, je montais dans la sienne et m'y enfermait, comme il me l'avait demandé.
Jungkook me jeta un regard furtif à travers la vitre, avant de s'éloigner de moi, pour sortir de la ruelle.
Je gardais mes yeux fixés sur lui, jusqu'à ce qu'il disparaisse complètement de mon champ de vision. Chaque pas qu'il faisait en direction opposée d'où je me trouvais, creusait un peu plus mon estomac.
Même si je savais que Jungkook savait parfaitement se défendre, je ne pouvais m'empêcher de craindre pour lui, face à un fou, ou à quelqu'un de préparer, il ne pourrait rien.
Et si cette personne était armée et se jetait sur lui ?
Je ne pouvais même pas imaginer l'éventualité de ce scénario sans en avoir la nausée.
Les minutes défilaient et je me rongeais les ongles à sang, incapable de contrôler la panique qui ne faisait que s'accroître en moi.
Faites qu'il ne lui arrive rien,
Faites qu'il ne lui arrive rien,
Faites qu'il ne lui arrive...
J'aperçut au loin, une silhouette avancer dans ma direction, mon cerveau n'eut même pas le temps de m'alerter que je le reconnus immédiatement.
Je lâchais un immense soupir de soulagement alors que je le détaillais au fur et à mesure qu'il s'approchait de moi.
Il semblait sain et sauf, Dieu merci.
Lorsqu'il atteignit la voiture, il ouvrit brusquement la portière, s'installa et démarra sans un mot, créant par la même occasion, une ambiance tendue.
JUNGKOOK
Dans un silence de mort, je roulais sur l'autoroute bien au-dessus de la vitesse autorisée, dans une tentative de me divertir l'esprit. Je pouvais sentir le regard interrogateur d'Eleanor sur moi et je tentais de l'ignorer au mieux.
Rien que sa présence me rendait malade.
Malade de culpabilité.
Ash venait de menacer Eleanor et tout ça n'était que de ma faute.
Ash...
Ce fumier l'avait suivi toute la soirée, en se marrant bien de la faire flipper.
" Tu ferais mieux de répondre à Wolf, ou bien elle paiera le prix de ton silence." Sa phrase tournait en boucle dans ma tête, j'avais envie de lui arracher la langue pour lui faire regretter ses paroles.
Sept ans étaient passés depuis la dernière fois que j'avais vu ce chien et il était resté fidèle à lui même, un putain d'enculé gonflé aux stéroïdes mais avec rien dans le froc. Il ne m'avait suffit de montrer qu'un peu les crocs pour que ce froussard soit à deux doigts de se faire dessus.
Je ne savais pas avec quelle force j'étais parvenue à me retenir de lui peter la gueule, mais c'était quasiment miraculeux.
" Où est-ce qu'on va ?"
La voix d'Eleanor était comme un coup de poignard en plein cœur.
Un rappel constant que je la mettais en danger et que peu importe combien je me tenais éloignée d'elle, cela ne changerait pas la donne. Car il était déjà trop tard, elle était à présent leur cible numéro un.
" Chez moi."
" Oh hum, je préférerais rentrer chez moi." Je ne répondis rien et me contentais de changer de trajectoire.
Chez moi ou chez elle, à présent cela ne faisait plus aucune différence. Ce soir, en suivant Eleanor, j'avais donné la preuve à Ash qu'elle était importante à mes yeux. Après des mois à tenter de flouter leurs pistes, je venais de me cramer bêtement en succombant à mon obsession.
Mais je ne regrettais pas de l'avoir fait. Si j'avais gardé le contrôle et que j'étais resté chez moi, je n'aurais jamais pu surprendre cette voiture en train de la suivre et qui sait ce qui aurait pu arriver si je n'étais pas intervenu.
Mon cerveau ne pouvait s'empêcher de ressasser cette image qui me hantait.
Mes mains se resserrent si fort autour de mon volant que mes jointures devinrent blanche. Ma mâchoire était contracté et je clignais plusieurs fois des yeux pour m'ôter l'image de la tête mais en vain, cela ne faisait qu'accroître ma rage, et j'étais à deux doigts de faire demi-tour pour retrouver ce fumier et lui ôter la vie.
Un flingue.
Une putain d'arme à feu déposée confortablement sur le siège passager de sa voiture, prête à être utilisée.
Je remerciais le seigneur, le destin ou le putain de hasard de m'avoir bouger de mon putain de canapé ce soir, car autrement j'ignore ce qu'il aurait pu se passer, mais la possibilité qu'il ai pu utiliser cette arme sur elle me faisait trembler de rage.
Tout mon corps était tendu et j'avais atteint un niveau de haine tel, que ma respiration était devenue similaire à celle d'un animal, et que je pouvais apercevoir Eleanor du coin de l'œil, se remuer dans son siège, visiblement incommodée.
L'avantage c'est qu'elle semblait avoir compris qu'il était préférable qu'elle garde sa bouche fermée.
Toujours dans le silence complet, je me garais dans sa résidence et sortit de la voiture, suivit de prêt par Eleanor.
Nous n'en avions pas discuté mais il était évident que j'allais rester la nuit. Bien que le seul but de tout ça était sa sécurité, je ne pouvais contrôler ce sentiment naissant d'excitation mélangé à de l'appréhension.
Forcé de constater que peu importe à quel point je m'efforçais de me tenir éloigné de cette fille, quelque chose finissait toujours par la ramener à moi.
Le silence perdurait. L'absence de bruit dans l'immeuble, causé par la nuit, n'arrangeais rien à la situation. Seul le bruit de la clef tournant dans la serrure vint briser cette ambiance inconfortable.
Eleanor entrait en première dans son appartement et je la rejoignis aussitôt. L'odeur de son appartement me percuta en pleine face et eut un effet miraculeux sur mes muscles qui se décrispèrent instantanément.
Je regardais El se dévêtir et recopiait ses mouvements machinalement, en tentant d'ignorer ce sentiment de familiarité qui m'envahissait.
J'accrochais ma veste à sa place habituelle et me dirigeais aveuglément vers son salon, familier au lieu.
Eleanor prit appui sur la grande table à manger de son salon sur laquelle elle s'assis à moitié, le regard suspendu dans le vide. Mes pas résonnaient dans la pièce alors que j'étudiais chaque aspect comme si je n'étais jamais venu auparavant.
Alors que j'analysais un vase des plus ordinaires, j'entendis un raclement de gorge derrière moi.
" Est-ce que tu vas finir par m'expliquer ?"
" Il n'y a rien à expliquer."
Je l'entendis souffler et se redresser, signe qu'elle allait s'approcher, alors je me retournais pour lui faire face.
" Est-ce que ce mec me suivait oui ou non ?"
" Oui. " Je lu de la terreur dans ses yeux et mon cœur se comprima. Tout ceci n'était que ma faute.
Comme assommée par ma réponse, Eleanor s'assit sur le canapé.
" Tu as pu voir qui c'était ?"
" Non." Depuis toujours le mensonge faisait partie intégrante de moi.
" Oh."
"J'ai juste eu le temps de voir que ce mec était garé en train de t'attendre, mais quand il m'a vu arriver il s'est barré."
Encore un mensonge.
" Tu n'a même pas pu entrevoir son visage ?"
" Non."
Et encore un.
" C-comment est-ce que ... Qu'est-ce que tu faisais là ?"
" Tu connais déjà la réponse à cette question."
Elle semblait perplexe face à ma réponse. Sûrement à se demander si elle devait m'en vouloir et être déçue que je n'ai pas réussi à me tenir éloigné d'elle. Ou bien si elle était soulagée que j'ai si faiblement cédé à mes tendances de stalkeur, car grâce à ça je l'avais sauvée.
Je continuais de me balader dans la pièce comme si les murs étaient plus intéressants que cette conversation, dans une tentative de l'éviter. Peut-être qu'en montrant suffisamment de désintérêt, elle allait finir par lâcher l'affaire ?
" Toi aussi tu m'a suivis c'est ça ?"
Mais les mots "lâcher l'affaire" et "Eleanor", ne pouvaient pas s'aligner dans la même phrase.
" Bingo."
Je lui lançais un regard, un sourire faussement amusé aux lèvres, histoire de garder la face.
" Je vois que maintenant tu assumes pleinement." Elle secoua la tête déconcerté.
" Tu peux me dire ce qui te différencie de cet homme hein ? Tu me stalk comme une proie, sans t'inquiéter de me faire peur ou de me faire du mal !" Elle s'était levé de nouveau, se laissant envahir par la colère.
" Est-ce que t'a une putain d'idée de ce qu'il te serait arrivée si je ne t'avais pas suivis ?! Tu devrais plutôt me remercier d'être autant obsédé par toi, pour une fois !"
Les yeux d'Eleanor s'écarquillèrent à tel point que je crus qu'ils allaient sortir de leurs orbites. Ses lèvres se pinçaient entre elles et elle me regardait complètement décontenancé.
Je n'avais pas prévu de lever la voix sur elle, mais elle avait la fâcheuse habitude de me repousser dans mes retranchements.
Mais visiblement ce n'était pas le ton que je venais d'employer qui la choquait autant, mais plutôt mes propos. L'allusion qu'il aurait pu lui arriver la pire des horreurs.
Ses sourcils étaient froncés et je pouvais deviner son combat intérieur. Je pouvais voir combien cela la démangeait d'en savoir plus, mais également à quel point elle redoutait d'entendre ma réponse.
Après une longue minute de silence, pendant laquelle nous nous défions du regard, elle ferma ses yeux une fraction de seconde et hocha discrètement la tête, pour elle-même, acceptant de baisser les armes face à cette bataille intérieure.
" Merci." Souffla-t-elle.
Elle avait choisi de rester dans l'ignorance et j'en étais soulagé. Je n'étais pas prêt à imaginer ce que ce détraqué aurait pu lui faire et encore moins à le lui expliquer.
" Tu ferais mieux d'aller te coucher."
" Mais hum, toi tu ..."
" T'en fais pas, je vais rester dormir sur le canapé." Elle jeta un coup d'œil au canapé, l'air d'évaluer ma proposition puis finis par hocher la tête.
" D'accord. Je vais te chercher des couvertures"
" Ok " On se fixa un instant, animés par tous nos non-dits avant de battre en retraite.
Lorsqu'elle s'apprêta à quitter la pièce je l'interpella, gêné. Elle se tourna tout autant mal à l'aise que moi.
" Il faut que je prenne une douche."
" Oh hum, tu à des affaires qui trainent dans le tiroir de mon armoire."
" Ok."
Elle quitta la pièce sans un mot de plus, partie chercher quelques couvertures. Elle revint peu de temps après et les mis en place sur le canapé de façon à rendre mon « lit » de ce soir, le plus confortable possible. Je la regardais faire, silencieux, m'autorisant à divaguer un peu. M'imaginant être dans une autre vie, ou je pourrais fièrement la proclamer mienne et où elle serait entrain de faire notre lit conjugal.
Quand elle eu finis je la remerciais et elle s'eclipsa. J'attendis qu'elle s'enferme dans la salle de bain pour rejoindre sa chambre.
J'ignorais le sentiment que cela me causait de revenir ici après tout ce temps et dans de telles circonstances, puis je fouilla dans son placard afin de trouver de quoi me changer.
Quand elle eu finit sa douche , je pris sa place, puis dans un silence pesant, nous sommes allés nous coucher, chacun de notre côté.
ELEANOR
Je fus réveillé à 8h30 ce matin par le soleil. J'étais tellement épuisée la veille que je m'étais endormie d'un coup, sans même prendre le temps de fermer mes volets. Résultats ; je n'avais pas été capable de me rendormir depuis.
Mais pour être honnête, la vraie raison pour laquelle je ne parvenais pas à retrouver le sommeil se trouvait dans mon salon.
Jungkook
Je pouvais sentir sa présence jusqu'à ma chambre, comme si son aura irradiait à des kilomètres.
Je m'en voulais d'avoir été si faible et de l'avoir laissé dormir ici, mais pour une fois ma faiblesse était entièrement justifiée, j'étais effrayée. Je ne pense pas que je serais parvenu à m'endormir s'il n'était pas resté. Et je lui étais reconnaissante d'être resté, même après que j'ai été aussi dur avec lui la dernière fois.
Après une heure à traîner, mon estomac se manifesta, me forçant à sortir du lit et à enfiler mes chaussons pour rejoindre la cuisine. Je marchais sur la pointe de pieds pour ne pas le réveiller au cas où il serait encore endormi.
Mais alors que je faisais tout mon possible pour rester silencieuse, le haut de mon pyjama s'accrocha à la poignée de ma chambre me freinant dans mon action, et je ne pu m'empêcher de crier de surprise.
Je mis aussitôt ma main sur ma bouche.
Je soufflai et décrocha mon t-shirt puis arriva dans le couloir, mais cette fois-ci, je cognai mon petit orteil au coin du mur, ce qui me valut un deuxième cri, mais de douleur cette fois. Je pinçais mes lèvres afin de d'étouffer mes cris du mieux que je pouvais.
" Heureusement que je suis déjà réveillé."
La voix rauque matinale de Jungkook me fit sursauter.
" Désolée."
"Ca ne fais rien."
J'entrais dans le salon et remarquais que les couvertures que je lui avais données la veille, étaient déjà pliés et posés sur le coin du canapé, où il était déjà assis et habillé.
" Tu restes déjeuner ? Je pensais faire des tartines de nutella et de banane, comme je sais que t'ado..."
" Non je vais y aller j'ai des trucs à faire." Il se leva et attrapa sa veste, tandis que je restais immobile à le regarder faire.
" Oh hum oui d'accord." Je m'étais dis que lui offrir le petit déjeuné serait une façon de le remercier. Mais je ne m'attendais pas à ce refus si radical.
Il se dirigea ensuite vers le petit sas à l'entrée ou se trouvait ses chaussures et je le suivit silencieusement. Il enfila ses baskets et quand il eu finis, il se tourna vers moi.
" Promet moi juste une chose avant que je parte."
" Oui je t'écoute."
" Viens avec nous en tournée."
" Jungkook je ne peux pas, je..." Il me coupa une nouvelle fois.
"Ce n'est pas une question Eleanor. Il est hors de question que je te laisse ici sans surveillance, alors que je serais à des kilomètres de toi." Je ne pu m'empêcher de remarquer qu'il ne m'avait plus jamais appelé par mon surnom depuis que je lui avait interdit. Et peu importe combien cela m'ennuyait, c'était de ma faute alors je ne pouvais pas me permettre d'être blessée.
" Jungkook..."
" C'est pas discutable." Mon mauvais caractère mourrait d'envie de lui tenir tête et de lui crier qu'il n'avait aucunement le droit de me donner des ordres. Mais je savais pertinemment qu'il avait raison et qu'il tentait simplement de me protéger. Alors je choisis d'obtempérer.
" Ok, je vais voir ce que je peux faire."
A l'origine c'était moi qui devais les accompagner, après tout j'étais leur manageur. Mais aux vue de la situation avec Jungkook, j'avais demandé à monsieur Park de mettre quelqu'un d'autre sur le poste, prétextant devoir rester afin d'arranger les complications avec Seoul's Sisters.
" Merci." Je tentais de cacher ma surprise, mais je ne m'attendais certainement pas à ça. Il venait de me remercier ?
Nos regards s'accrochèrent de longues secondes, et aucun de nous n'était capable de bouger. Mille mots s'exprimaient à travers nos yeux, ceux que notre fierté et notre raison nous interdisaient de dire.
" J'y vais." Finit-il par dire.
J'hochais la tête et le regardais ouvrir la porte. Il me salua d'un mouvement de tête et je lui offrit un sourire timide avant qu'il ne quitte l'appartement.
JUNGKOOK
~ 1 semaine plus tard. ~
C'était pire que tout.
Etre si proche et à la fois si loin d'Eleanor était la pire des tortures. Mais je me rassurais en me disait qu'au moins elle était saine et sauve, tant qu'elle était près de moi.
Nous étions arrivés en Thaïlande depuis hier soir, après notre premier séjour en Chine, puis au Japon. Nos premiers concerts s'étaient déroulé merveilleusement bien. Les gars et moi étions plus solide et unis que jamais, cela nous permettait de nous rappeler combien on était fait pour ce métier et fait pour être ensemble. Cela se ressentait tout particulièrement sur scène, nous nous complétions parfaitement et j'adorais ça. Cette mini tournée de l'Asie nous donnait un aperçu de ce qui nous attendait, comme un amuse bouche et j'étais plus que prêt à dévorer le plat.
Tout cette agitation ; les acclamations, le bruit, la sueur, j'y étais complètement accro.
J'étais au putain de Nirvana et je n'en avais jamais assez.
Vivre ça, tout en ayant Eleanor si proche de moi était un vrai défi, car chaque soir je n'avais qu'une seule idée en tête, la rejoindre dans sa chambre pour finir mes soirées en beauté.
Sa chambre était toujours si proche de la mienne qu'il ne suffisait que d'un manque d'attention pour que je me retrouve dans la sienne par erreur. Mais jusqu'ici je parvenais à me contrôler.
Je profitais de chaque seconde car je savais que chaque seconde qui s'écoulaient, me rapprochaient de ma fin.
Je n'avais pas eu de nouvelles de Wolf depuis mon départ et cela n'annonçait rien de bon. Et comme je n'avais pas répondu à son message, je savais que je l'avais mis en rogne et que je n'allais pas échapper aux représailles de sa colère.
Alors je vivais chaque jour comme si j'allais tout perdre demain, car c'était le cas. Mais cette optique de vie rendait la mission ; "rester loin d'Eleanor", quasiment impossible.
Il était 23h et le concert était terminé depuis une heure. Nous étions chacun dans nos chambre à nous préparer pour l'after party afin de clôturer cette première semaine de tournée. Nous avions enchaîné les concerts et les vols et il était enfin temps de profiter. Demain était notre seul jour de repos, et dès lundi nous reprenions l'avion pour les Philippines.
Je sortit de la douche et enfila une tenue noir décontracté, mes cheveux étaient encore légèrement ondulés à cause de l'eau de la douche et cette fois je décidais de les laisser tel quel. J'enfilais mes bagues, ma chaine en argent et mes boots noir et il était déjà l'heure de partir. Je m'aspergeais d'un seul spray de parfum et quittait ma chambre d'hôtel pour rejoindre les autres dans le hall.
En sortant de l'ascenseur je fus accueillis par les rires des membres et d'Eleanor qui étaient assis sur les sofas à la réception de l'hôtel entrain de discuter, attendant les retardataires ; Sora, Taehyung et moi-même.
Sora nous avait rejoint dans la tournée hier soir et cette fois-ci sa présence n'avait causé aucune polémique. Depuis le temps les membres semblaient s'être fait à l'idée que où Eleanor était, Sora s'y trouvait aussi. J'ignorais comment elle parvenais à se libérer si souvent, mais j'avais cru comprendre que Sora était en stage dans l'entreprise de sa propre famille, ce qui expliquait que son emploi du temps soit aussi flexible.
On n'a pas à s'inquiéter de quoi que ce soit quand c'est papa ou maman le patron.
Je n'eu pas le temps d'arriver à leur hauteur que le ding de l'ascenseur retentit derrière moi. Je me retournais et les portes s'ouvrirent sur Sora et Tae. En les voyants arrivés, les gars se levèrent aussitôt, près à partir et c'est à cet instant que j'eu un aperçut de la tenue d'Eleanor.
Elle se leva et aussitôt mes yeux furent attirés par elle comme des aimants, traçant chacune de ses courbes. Elle portait une robe noire près du corps qui arrivait à mi mollet. Ses bras étaient dévoilés, mais surtout, sa robe était découverte sur son flan gauche, dévoilant l'entièreté de son ventre et de sa hanche, jusque dans le dos, et révélant quelques uns de ses tatouages. C'était une chance que le vêtement était à sa taille et qu'il épousait parfaitement chacune de ses courbes, car s'il était un tant soit peu plus grand, certaines parties de son corps auraient été révélés et j'aurais du crever les yeux de quiconque les aurait posé sur elle.
Déjà qu'à cet instant présent je me battais contre mon envie irrépressible de l'amener de force jusqu'à sa chambre pour l'obliger à changer de tenue. Ou bien pour lui arracher le peu de tissus qu'elle portait et la baiser sans relâche pour lui faire regretter d'avoir osé porter cette robe aux yeux de tous. J'étais pourtant du genre suffisamment confiant pour laisser ma copine porter ce qu'elle voulait publiquement, sachant pertinemment que tous ce que les hommes pouvaient faire était observer et rêver de loin, car j'étais celui qui finirait avec elle, à quatre pattes et le cul à l'air, toute prête pour moi.
Du moins c'est ce que j'avais l'habitude de penser quand j'étais avec Lexie. A l'époque Lexie était déjà en avance sur son temps, elle avais toujours un coup d'avance comparé aux filles du même âge dans notre ville. Elle portait des tenues révélatrice et un maquillage qui mettait en valeur ses traits. Elle exprimait ouvertement ce qui lui plaisait ou non et se donnait à cent pour cent dans son passe-temps favoris, le flirt. Elle aimait plaire et être au centre de l'attention. Elle faisait tourner des têtes, elle était le fantasme de tout le lycée et j'adorais ça. Lorsqu'elle à jeté son dévolu sur moi j'avais l'impression que le monde était à mes pieds. Pour la première fois on me voyait. J'étais passé du gars solitaire à populaire, elle m'avait mis dans la lumière.
Toute les filles rêvaient d'être elle et tout les hommes rêvaient d'être à ma place. Mais c'était moi qu'elle avait choisis. Et le fait de savoir que la plupart me jalousait, me faisait me sentir invincible. J'adorais que tout ces hommes bavent sur elle alors que le seul qui pouvait la toucher c'était moi.
Mais avec Eleanor tout était toujours différent. Elle refusait de reconnaître qu'elle était mienne. Et la simple idée qu'un homme puisse s'imaginer la toucher me retournait l'estomac. Je ne voulais pas qu'on la désire, je ne voulais même pas que d'autre homme que moi la voit. Si je le pouvais je l'aurais enfermé dans une tour, à l'abris du regards pervers des hommes. Et cette robe en particulier me mettait vraiment à rude épreuve.
Eleanor releva ses yeux vers moi et me surpris entrain de la relooker. Je ne fis même pas semblant de détourner le regard, je voulais qu'elle sache l'effet qu'elle avait sur moi, qu'elle devine chaque pensée qui me traversait l'esprit tandis que je la déshabillait du regard.
Et elle semblait parfaitement lire dans mes pensées car aussitôt elle coinça sa lèvre inférieur entre ses dents pour réprimer un sourire.
Et je savais, de source sûr qu'elle portait cette robe dans le seul but de me torturer. Et ça marchait.
C'est ce qui me rendait fous chez elle. Là ou Lexie cherchait l'attention des autres hommes, Eleanor ne prêtait attention qu'à la mienne.
" On y va ?" Interrogea Jin à l'intention de tous.
" Let's go !" Répondit Hoseok tout excité.
Nous étions arrivés dans le club depuis seulement trente minutes, mais Hobi, Tae et Sora étaient déjà complètement torchés. Pour ma part j'en étais toujours à mon premier verre et je n'avais aucune intention de le finir.
Toute mon attention était portée sur Eleanor qui était installée juste en face de moi, prise en sandwich entre Jimin et Sora. La banquette était grande, mais apparemment pas suffisamment grande pour les décoller.
Sora et Taehyung communiquaient de leur côté dans leur langage alcoolisé et Jimin et El étaient sobre et semblaient plaisanter sur les deux abrutis à côtés d'eux. Et cela durait depuis notre arrivée.
Ennuyé je décidait de quitter la table pour aller faire un tour aux toilettes, j'espérait qu'en revenant ils auraient mis de la distance entre eux ou alors j'allais le faire moi-même.
L'ambiance de la boîte était à son comble et c'était une épreuve que de traverser la piste pour rejoindre les toilettes, mais j'y parvint non sans difficulté.
A peine étais-je entré dans les toilettes, que deux mains saisirent le col de mon t-shirt, me planquant contre le mur. Je n'haussait même pas mes sourcils de surprise tant c'était prévisible.
Je n'étais pas surpris que Wolf m'envoi quelqu'un et encore moins que ce quelqu'un soit Ash. Wolf n'aimait pas être ignoré et c'était exactement ce que je faisais depuis plusieurs semaines déjà, alors c'était évident qu'il allait m'envoyer quelqu'un pour me faire une piqure de rappel. Il ne pouvait pas envoyer Kai, car il risquait d'être repéré par Eleanor, alors Ash son cousin était le plan de secours, comme toujours.
Cependant je n'aurais pas pensé le trouver ici. Wolf ne faisait jamais dans la demi mesure, j'aurais dû prévoir qu'il était prêt à tout, même me suivre dans un autre pays.
Je ne pu m'empêcher de remarquer sa tentative de me soulever du sol et cela me fit esquisser un sourire.
Pauvre naze.
" Bah alors Jeon, ta maman ne t'a jamais dis que c'est malpolie de ne pas répondre." Sans blague c'était ça sa super phrase d'accroche de bandit ? Il se croyait dans un film ou quoi ?
" Elle m'a surtout appris à ne pas traîner avec les grosses brutes qui veulent voler mon goûter." Ca n'avait pas l'air de lui plaire que je joue le jeu, car il me décolla du mur, pour me replaquer plus violemment.
" Joue pas avec mes nerfs Jeon, tu risque de passer un sale quart d'heure."
" Mince. Déjà que je m'amuse pas des masses."
" On verra si tu continueras à plaisanter quand j'aurais mis le grapin sur ta copine." Le seul avantage qu'il y avait au fait qu'ils soient au courant pour El, était que je n'avais plus besoin de faire semblant.
" Touche là et je te brûle les mains, parle lui et je t'arrache la langue, pose ne serait-ce que ton regard sur elle et je te crève les deux yeux. N'oublis pas ce que j'ai fais à ton vieux pote Kai et dans quel état il aurait finis si vous n'étiez pas intervenu. C'est une chance que je lui ai laissé au moins un de ces deux yeux." Crachais-je entre mes dents, alors que mon visage s'était dangereusement approché du siens. Faut croire que ma dernière phrase faisait écho dans son cerveau, car son visage perdit de sa couleur. C'est vrai que ce soir là, la scène n'était vraiment pas jolie à voir, l'œil de Kai ne tenait plus qu'à un fil et ce n'est pas une métaphore.
" Voyons Jungkook, on n'a pas besoin d'en arriver là." Wolf entra comme le vilain d'une histoire au moment opportun, le sourire aux lèvres et le regard déterminé. Il s'avança vers moi avec assurance et ordonna à Ash de me lâcher d'un signe de main. Ce qu'il fit.
Je réalisais bêtement que personne n'était entré dans les toilettes entre-temps, ce qui signifiait que quelqu'un bloquait l'entrée. Cette personne devait déjà être devant la porte quand je suis passé et je ne l'avais même pas vue. Abrutis.
Je lissais mon t-shirt d'un geste de la main et fit un signe de tête à Wolf, l'invitant à parler.
" Bon maintenant que je suis là, dis moi ce que t'a à me dire."
" Je te trouve pressé pour quelqu'un qui retarde cette conversation depuis des semaines."
" Ouais j'ai envie de retourner m'amuser."
Les lèvres de Wolf s'étendirent d'avantage avant que son sourire ne s'efface complètement.
" J'ai une proposition à te faire et je crois que ça va te plaire."
" J'en doute."
" Oh mais si, écoute moi."
Je ne dis rien, signe qu'il devait poursuivre.
" Toi et moi, on va refaire équipe pour des nouveaux combats." Laissez-moi rire. Wolf savait pertinemment qu'il n'était pas question que je reprennes mes combats de boxe clandestin, ce qui signifiait qu'il détenait de quoi me faire chanter.
" Balance."
" Pardon ?"
" Allez Wolf, je te connais ! Balance ton arme, dis moi avec quoi tu va me faire chanter."
" Tu vois c'est ça que j'aime avec toi. Depuis le temps, on se connait si bien qu'il n'y à même plus besoin de modalités, c'est direct et efficace."
" Parle." Je commençais sérieusement à perdre patience et c'était sûrement dû au fait que j'appréhendait ce qu'il allait me dire. Car cette fois je n'avais aucun coup d'avance, et je n'avais aucune idée de ce que ça pouvait être.
" Adonis, ça te dit quelque chose ?"
Je le fixait avide de réaction, complètement étranger à ce qu'il essayait de me dire. Le nom me disait pourtant quelque chose, mais je ne parvenait pas à mettre la main dessus.
J'allais pour lui dire que je ne savais pas de qui il parlait lorsque soudain ça me percuta. Adonis, était le frère d'Eleanor.
" Qu'est-ce qu'il à avoir là-dedans ?"
" Je suppose que t'a copine t'a raconté que son frère était mort, mais est-ce que tu sais comment il est mort ?"
Eleanor m'avait vaguement fait part de son suicide, notamment après avoir trouvé sa lettre d'Adieu chez elle, quelques semaines plus tôt. Le fait que Wolf le mentionne voulait surement dire qu'il savait quelque chose que j'ignorais, peut-être était-ce lui qui avait déposé la lettre chez Eleanor ? Mais comment avait-il trouvé cette lettre ? Adonis et Wolf venaient de deux mondes différents, les chances qu'ils se connaissent étaient quasi nuls. Cette lettre avait dû tomber dans les mains de Wolf par pur hasard. Il avait dû la trouver en fouillant dans le passé de El.
" Non." Je mentais et à en jugé par le regard défiant de Wolf, il le savait pertinemment.
" Tu l'a tué Jungkook."
Mes sourcils se froncèrent et mes yeux alternaient entre Ash et Wolf. Ils se foutaient de ma gueule ou quoi ? Wolf savait que je ne connaissais pas Adonis, comment pouvait-il sortir un mensonge pareil.
" Tu délire complet mon vieux." Je tapotais sur son épaule en guise de consolation, ou plutôt provocation.
" Ca suffit les conneries, j'en ai assez entendu, je me casse." Je donna un coup d'épaule à Ash sur mon passage, tandis que je m'apprêtais à sortir des toilettes, mais au moment où je posa ma main sur la poignée, les mots que Wolf prononça me glacèrent le sang et me figèrent instantanément.
" Adonis est Arson."
Mensonges.
Je ne pouvais pas y croire.
Ca ne pouvait pas être vrai.
Il mentait pour me torturer, me faire avouer quelque chose. Il se jouait de moi pour obtenir ce qu'il voulait, il voulait que je soit faible et à sa merci, alors il tentait de s'immiscer dans mon cerveau.
Malgré tous mes efforts pour me convaincre que tout ceci n'était qu'une mise en scène, ma gorge s'asséchait et mon pouls s'affolait, signe qu'une partie de moi croyais ses mots.
" Tu mens. C'est impossible."
" Tu sais bien que je ne mens pas."
Bien sûr que je le savait. Wolf ne mentais pas, jamais. Il se servait des vérités et les détournais à son avantage. Il était manipulateur malhonnête, égocentrique, grossier, arrogant, cupide et des tas d'autres adjectifs qui faisaient de lui une mauvaise personne. Mais il n'était pas un menteur. Il n'avait pas besoin de mentir, la vérité était déjà assez moche, et il adorait me le rappeler.
" Quand bien même, je, je ne l'ai pas tué, je ne... l'ai pas touché."
" Non, bien sûr, je m'en suis chargé. Mais c'est par ta faute qu'il est mort."
Il essayait de pénétrer mon cerveau, je ne pouvais pas le laisser faire. Je devais reprendre le dessus et vite. Il fallait que je m'éloigne.
J'ouvrit maladroitement la porte mais ses mots suivants m'assenèrent le coup fatale.
" Le soir de tes dix huit ans, quand je t'ai emmené dans ce bar et que je t'ai présenté à mes potes policiers, il y avait un nouveau parmi eux, tu te souviens ? Comment il s'appelait déjà... Ah oui ! Jake ! " Ma main se mit à trembler sur la poignée alors que je craignais le pire. " Tu sais Jungkook, c'est une chance que tu l'ai reconnu immédiatement. Sinon comment aurais-je pu savoir que Arson complotait contre moi et qu'il essayait de me faire tomber ? Tu m'a sauvé Jeon, tout ce que j'ai eu à faire c'est de le surprendre au moment ou il s'y attendait le moins et Boom !"
J'entendais son sourire de maniaque dans sa voix.
J'avais envie d'exploser. De tous les tuer un par un et de m'effondrer au sol. Je voulais à la fois pleurer et le faire payer. Je voulais accourir vers Eleanor et la prendre dans mes bras, tout en lui murmurant combien j'étais désolé.
Mais Eleanor ne devait jamais le savoir.
Je fermais mes yeux et pris une profonde inspiration. Je rassemblais mes esprits et enfouis toutes mes émotions aussi profondément que je le pu, pour qu'elles ne fassent plus jamais surface. Ce n'était pas le moment de m'apitoyer, il était déjà temps d'avancer.
Je rouvris les yeux, et d'un geste lent je refermais la porte et me tournait vers Wolf, résigné.
Je redressait les épaules et levait la tête.
" On commence quand ?"
Le large sourire réjouit de Wolf scella notre arrangement silencieux.
Je m'associais de nouveau à lui et il emportait ce secret dans sa tombe. Tant que je travaillais pour lui il ne devait rien dire.
Et en aucun cas Eleanor ne devait l'apprendre.
Elle ne pouvait pas découvrir que j'étais responsable de la mort de son frère.
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