J'attendis un instant pour être sûre que le prince de Silla n'allait pas faire demi-tour sous n'importe quel prétexte farfelu et qu'il était assez loin pour que je puisse être tranquille.
« Yeo Sang. » appelai je, une fois certaine que c'était le cas.
Je m'attendais à ce qu'il apparaisse instantanément, comme à son habitude mais rien.
« Yeo Sang ? » rappelai je, d'un ton un peu moins assuré.
Mais il n'y eut pas non plus de réponse. Est-ce qu'il était absent ? Il était parti sans me prévenir ? Ou il lui était arrivé quelque chose ? Mille et un scénarios me passèrent par la tête en un instant. C'était à ce point que j'avais l'habitude qu'il réponde instantanément à tous mes appels.
Je me levai du pyeongsang et regardai autour de moi, inquiète. Au même moment, Geun Rye et Hong Sim sortirent du pavillon pour venir récupérer les soban qui avaient servi pour le repas.
« Vous avez vu Yeo Sang ? » leur demandai je tout à trac alors qu'elles venaient vers moi.
« Euh... Non, Mademoiselle. » répondit sobrement Geun Rye.
« Il est d'un naturel bien trop discret. » déplora Hong Sim, se permettant même une légère grimace.
« La discrétion est importante pour un garde du corps. » la rabroua Geun Rye, désapprouvant visiblement l'attitude et la réflexion de Hong Sim.
Peut être la trouvait elle inopportune ? Ou que Hong Sim aurait dû se taire dans cette situation ? Comme je ne saisissais toujours pas toutes les nuances de l'étiquette, je ne pouvais pas le dire.
« Est-ce qu'être courageux n'est pas plus important ? » lui répondit Hong Sim, sortant sa réflexion de nulle part sans saisir les signaux de Geun Rye.
« Est-ce que vous savez où il serait susceptible d'être allé ? » les interrompis je dans leur bavardage inutile.
« Il ne peut pas être parti bien loin, son devoir est d'être toujours près de vous. » dit Geun Rye.
« Mais il est souvent invisible. » fit remarquer Hong Sim. « Qui sait s'il est vraiment toujours... »
« Mauvaise langue. » l'interrompit Geun Rye, sans attendre.
Elle se tourna vers moi avec un air un peu hésitant.
« Peut-être que... C'est un peu embarrassant de vous dire ça, Mademoiselle, mais... Peut être qu'il s'est juste absenté le temps de... D'assouvir un besoin personnel ? » dit-t-elle, visiblement gênée de faire une telle supposition.
Ah ah. Oui. Même les gardes du corps avaient besoin d'aller aux toilettes. Si c'était ça... C'était le plus logique et le plus rassurant. Mais Yeo Sang était toujours tellement si infaillible que c'était bizarre de l'imaginer avoir besoin d'aller au petit coin comme tout le monde.
Je me rassis. La supposition de Geun Rye avait du sens et je m'inquiétais surement prématurément.
Comme les servantes repartaient avec les soban, je décidai d'attendre quelques instants au cas où Yeo Sang serait vraiment parti se soulager. J'étais vraiment la pro pour me faire du souci pour rien. Ou alors... Ou alors j'avais eu raison de m'inquiéter et Yeo Sang était vraiment parti. Et si c'était le cas... La raison pouvait très bien être qu'il voulait éviter une discussion avec moi. Il avait surement entendu ce que le prince de Silla m'avait raconté. Alors si après ça, il disparaissait, ça voulait bien dire qu'il avait quelque chose à cacher. Si c'était ça...
Je relevai brusquement la tête, contrariée, et sursautai en voyant Yeo Sang pile en face de moi, semblant attendre que je m'adresse à lui, comme s'il avait été là dès l'instant où je l'avais appelé.
« Où tu étais passé ? » l'apostrophai je, un peu mécontente.
« J'étais là tout du long. » répondit-il, comme si de rien n'était. « Et je ne suis pas allé 'assouvir un besoin naturel' si c'est ce que tu te demandes. Je ne me permettrais jamais de te quitter des yeux pour quelque chose d'aussi trivial. Enfin... Je ne veux pas dire que je ferais ça en te regardant, hein ! Pas du tout ! » commença-t-il à s'embrouiller comme à son habitude. « Mais je ne vais pas te laisser pour ça alors que tu es avec quelqu'un d'aussi instable que le prince de Silla. Ah ah. J'ai entendu qu'il te prenait pour un yokwe. C'est tout à fait le genre des gens de Silla, ça. Ils sont toujours en train de réprimer tout ce qui découle du chamanisme mais il n'y a pas plus obsédé qu'eux à ce propos. » changea-t-il de sujet en suivant le fil -incohérent- de sa pensée. « Franchement, il n'y a que quelqu'un de Silla pour décider de faire ce genre de vérifications alors que les yokwe ont disparu depuis tellement longtemps. Un peu grâce au confucianisme d'ailleurs. Malheureusement pour le monde des esprits, il a tendance à avoir l'importance qu'on lui donne et avec le recul du chamanisme... »
« Tu t'égares. » le coupai je, voyant qu'il était encore en train de partir en freestyle. « Je suis sûre que si je ne t'interrompais pas, tu serais capable de tenir tout l'après midi sans répondre à la seule question que je me pose. » soupirai je.
« Euh... Laquelle ? » demanda Yeo Sang, semblant perdu après s'être fait arrêter en plein élan.
« Si tu étais là tout le temps, pourquoi est ce que tu n'as pas répondu quand je t'ai appelé ? » lui demandai je.
« Ah ça... Euh... Comment dire ? J'attendais que les servantes reprennent les soban. » se justifia-t-il.
« Quoi ? Pourquoi ? » l'interrogeai je, perdue.
Je ne me souvenais pas qu'il se soit déjà gêné pour elles. Il ne le faisait déjà pas pour moi alors que j'étais censée être sa maîtresse, alors...
« C'est que... En fait, je les évite. » révéla-t-il, l'air embarrassé.
« C'est nouveau, ça. » dis je en haussant un sourcil. « Pourquoi tu ferais ça ? »
« Et ben... Tu te souviens d'hier soir quand le roi t'a révélé qu'il était... Enfin, c'était surprenant, n'est-ce pas ? » hésita-t-il, les mots semblant lui manquer, pour une fois.
« Attend... Est-ce que tu es en train d'essayer de dire que Geun Rye et Hong Sim ont aussi tout entendu ? » m'inquiétai je.
J'avais bien compris que le roi et moi n'étions pas vraiment discrets quant à nos rencontres mais je n'avais pas imaginé que les servantes oseraient prendre la liberté de nous espionner.
« Non ! Non, non. C'est pas du tout ça. Je ne le permettrais pas. Tout ce que vous vous dites est confidentiel. Enfin... Evidemment, je suis au courant parce que je ne peux pas trop m'éloigner de toi et parce que tu as besoin de quelqu'un qui soit au courant de ce qui t'arrive pour t'aider. Je ne veux pas dire que je t'épie, hein. Je te protège seulement et pour que ce soit efficace, c'est mieux que je sache tout ce qui te concerne. Et puis, vos rencontres sont toujours très mignonnes. De mon point de vue, ça ressemble vraiment à un conte de fée même si à mon avis, les princes se prêtent mieux à ce genre d'histoire que les rois. » se permit il, hors de propos. « Enfin, tout ça pour dire que je sais que si je n'écoutes pas tes conversations, tu ne m'en feras jamais part et que je ne serais pas capable d'anticiper les ennuis dans lesquels tu vas forcément aller te jeter... » discourut il, sans prendre le temps de respirer.
« D'accord, d'accord. » tentai je de le calmer alors qu'il s'affolait dans son explication, comme s'il avait peur que je décide qu'il avait commis une faute.
Bon... Je n'étais pas ravie qu'il admette si clairement qu'il me surveillait étroitement mais je le savais déjà donc...
« Donc, qu'est ce que tu essayais de dire ? » essayai je de le recentrer.
« Ah... Oui. Euh... C'est juste... En fait, ce que je voulais dire c'est que ça m'a beaucoup surpris donc quand tu es allée te coucher, j'ai attendu que tu t'endormes, bien évidemment. Et puis j'ai vérifié qu'il n'y avait personne autour du pavillon. Bien sûr, j'ai fait absolument toutes mes tâches même si j'étais troublé, hein ! Mais quand même, j'étais un peu... Enfin, j'ai décidé de prendre l'air autour du pavillon pour réfléchir. » s'expliqua-t-il de manière complètement brouillonne.
« Pourquoi ça te retournerait autant ? » ne pus je m'empêcher de lui demander. « Ce n'est pas comme si tu avais une quelconque relation avec lui... » lui fis je remarquer, à deux doigts de lever les yeux au ciel.
« Mais... C'est... Et ben... C'est quand même la personne la plus importante de Joseon ! » se récria-t-il. « Et j'étais vraiment très inquiet à son propos parce que... Je... Enfin... ça semblait clair qu'il n'avait que le physique pour lui alors... Mais on ne peut pas gouverner efficacement juste avec de beaux yeux donc... Enfin... ça change beaucoup de choses pour le royaume, non ? » tenta-t-il de s'expliquer maladroitement.
C'était bien ce que je pensais. Yeo Sang s'intéressait au moins un minimum à la politique. Même s'il ne faisait clairement pas parti des gens qui pouvaient influer dessus. Dans tous les cas, ça n'expliquait pas sa façon d'éviter Geun Rye et Hong Sim.
« Oui bon... » balayai je donc la question d'un geste de la main. « Quel est le rapport avec les servantes, de toute façon ? »
Ce que Yeo Sang pouvait être bizarre, parfois...
« Et ben... Je marchais à proximité du pavillon et Hong Sim a dû se réveiller pendant la nuit et elle est aussi sortie du pavillon. » m'apprit-il.
« D'accord... Et ? » poussai je un peu plus.
« Et... Elle... Elle était en tenue de nuit. » lâcha Yeo Sang, comme si c'était la chose la plus gênante du monde. « Et aussi... Elle avait les cheveux à moitié défaits. » ajouta-t-il, semblant avouer un péché capital.
Je ne pus m'empêcher d'éclater de rire.
« Attend... Tu es en train de me dire que tu évites Hong Sim parce que tu l'as vue en petite tenue ? » m'esclaffai je. « Est-ce que tu ne penses pas qu'elle devrait être plus gênée que toi ? »
« Elle a dit qu'elle n'était pas gênée... » révéla Yeo Sang. « Pas si c'était moi. » ajouta-t-il, contrit.
Je m'arrêtai de rire pour ouvrir la bouche de surprise. Hong Sim en pinçait pour Yeo Sang ? Si j'avais imaginé ça ! C'était le potin du siècle ! Trop mignon.
« Alors tout va bien, non ? » laissai je entendre, trouvant qu'il en faisait beaucoup pour pas grand-chose.
« Je t'ai déjà dit que j'avais quelqu'un ! » se récria Yeo Sang, visiblement très embêté par la situation.
Ah oui. C'était vrai. Il l'avait mentionné une fois. Pauvre Hong Sim.
« Alors il n'y a qu'à lui dire que tu n'es pas intéressé. Ce n'est pas si dur. » lui conseillai je. « Et puisque les choses ont l'air d'être aussi claires, tu aurais dû le faire tout de suite. » ne pus je m'empêcher de lui faire remarquer.
« Mais elle était en tenue de nuit ! » fit valoir Yeo Sang, comme si ça suffisait à justifier qu'il n'ait rien dit. « Et elle s'est approchée de moi et... Et... » bloqua-t-il comme si la suite était trop difficile à dire.
« Et ? » l'encourageai je comme il n'arrivait pas à sortir la fin de sa phrase.
« Je me suis mis à courir. » avoua-t-il, penaud, ses épaules s'affaissant comme s'il était complètement découragé.
J'éclatai de rire une nouvelle fois, sans pouvoir m'en empêcher. Les réflexions de Hong Sim prenaient tout leur sens, maintenant. Il fallait dire que la réaction de Yeo Sang était bien ridicule.
« Donc tu t'es enfui et maintenant tu l'évites. » résumai je en riant toujours à moitié. « D'accord, d'accord... A ta place j'aurais honte aussi. » gloussai je. « J'essaierai de ne pas t'appeler en sa présence. » promis je.
Ce n'était pas à moi de m'en mêler, clairement.
« Merci. » dit il en ayant l'air de vouloir s'enfoncer dans le sol et y rester enterré à tout jamais.
Je pris un moment pour me remettre de mes émotions avant d'inviter Yeo Sang à s'assoir en tapotant la place à côté de moi sur le pyeongsang.
« Oublions ça. Toi et moi on doit parler de choses sérieuses. » annonçai je la couleur.
Yeo Sang eut une sorte de grimace résignée mais vint s'assoir docilement là où je le lui demandais.
« Honnêtement, ça fait un moment que je me pose des questions à ton sujet. » entamai je, sans laisser de silence s'installer. « Et je trouve que ta façon d'agir est parfois un peu suspicieuse. »
Il plissa les yeux et prit un air d'incompréhension.
« La seule chose que je fais, c'est de rester avec toi pour te protéger. » fit il valoir. « C'est littéralement la seule chose que je fais de mes journées. Et en plus, je prends ça très au sérieux en restant tout le temps auprès de toi alors que depuis que j'y suis, tu n'as pas été en danger à part les fois où tu t'es mise dans le pétrin toute seule. D'ailleurs, à ce propos, j'ai l'impression que j'ai été engagé plus pour te protéger de toi-même que pour te protéger d'une menace extérieure. » se plaignit il. « Après, ce n'est pas le travail le plus désagréable du monde puisque je t'apprécie beaucoup et je continuerai de le faire avec plaisir même si c'était complètement inutile mais honnêtement, si tu apprenais à ne pas te mettre dans des situations dangereuses par toi-même, ta vie serait beaucoup plus facile. Bon... La mienne aussi, je suppose, même si je suis là pour ça. » débita-t-il.
« C'est bon, tu as fini de te plaindre ? » demandai je après avoir attendu patiemment qu'il ait terminé toutes ses récriminations.
De toute façon, il n'y échapperait pas.
« Non. » répondit il très sérieusement. « Mais on va dire que oui. » se rétracta-t-il en croisant mon regard excédé.
« Ce n'est pas du tout ton rôle de garde du corps que je remets en cause. » soupirai je. « Et je sais que depuis le début tu es là pour me protéger. En plus tu réponds toujours à l'appel quand j'ai besoin de toi. Donc je ne dis pas que tu n'es pas un allié pour moi. Je dis juste que tu me caches surement des choses. » lui expliquai je.
« Et ben... Ce serait difficile de tout connaitre de l'autre puisqu'on ne se connait pas depuis si longtemps que ça. » fit-il valoir, à raison.
« Oui je sais. Mais je parlais spécifiquement de ce qui concerne mon don et ma situation. » précisai je. « A vrai dire, depuis le début, tu es un des seuls à qui j'ai pu dire ce qui m'arrivait et qui sait quel est mon but et les efforts que je fais pour l'atteindre. » posai je. « Je sais que tu n'as jamais entravé aucune des actions que j'ai pu entreprendre en ce sens mais depuis le départ, tu essaies de me dissuader. Depuis le départ, tu es contre le fait que j'essaie de retourner dans mon monde comme si tu pensais que j'ai quelque chose à faire ici même si tu ne m'as jamais dit quoi. » lui rappelai je.
« Je t'ai déjà expliqué que je pensais... »
« Oui. Tu m'as dit que tu pensais que j'étais là pour une raison, bla bla bla. Je n'ai pas vraiment besoin que tu me réexplique dans le détail ce que tu penses parce que premièrement tu me l'as déjà dit et ensuite, ça prendrait des heures pour pas grand-chose. » le coupai je encore une fois. « Seulement, avec ce que le prince Hong Joong vient de me dire, ça change la donne. » lui signifiai je.
« Le prince de Silla raconte tout ce qui lui passe par la tête pour essayer d'obtenir de toi ce qu'il veut, c'est tout. » contra Yeo Sang. « Et en plus il raconte n'importe quoi. Même toi qui n'est pas originaire de ce monde, tu t'es rendue compte que son histoire de yokwe ne tenait pas la route. Alors pourquoi est ce que tu accorderais du crédit au reste de ses propos ? » demanda-t-il, l'air embêté.
« Parce que même si je suis très consciente que le prince Hong Joong essaie de servir surtout et d'abord ses propres intérêts, je ne pense pas qu'il sorte ça totalement de nulle part. Comme tu l'as dit toi-même, il n'a pas l'air de vouloir vraiment avoir à faire aux esprits ou à quoi que ce soit qui s'y rapporte mais, de ce fait, il semble pas mal averti à ce sujet. D'ailleurs, il a bien vu que j'étais une mudang. » fis je valoir.
« Oh, le coup des yeux blancs était un bon indice. » me fit remarquer Yeo Sang.
Je grimaçai. C'était vrai aussi. Ça devait être bien effrayant vu de l'extérieur en plus. En tout cas, c'était impressionnant sur le prince Woo Young, déjà. J'espérais que ce n'était pas comme ça à chaque fois pour moi. Mais je n'avais aucun moyen de le savoir.
« Quand bien même. Je lui ai dit que de toute façon je ne l'aiderai pas sans avoir un minimum de preuve de ce qu'il avançait donc... Je suis sûre qu'il essaie d'apporter des informations de qualité. » tranchai je. « Et de toute façon, ce n'est pas le sujet. Quoi que tu en dises, je crois plutôt pas mal à ce qu'il vient de me dire et le fait que tu sois opposé à ce que je rentre chez moi conjugué au fait que tu as une connexion au monde des esprits me fait me demander si tu n'es pas une des personnes qui auraient fait un vœu que je suis censé réaliser. » exposai je mes soupçons. « Regarde les choses objectivement, tu fais quand même un bon suspect. Et c'est sans compter que tu as toujours l'air très renseigné sur les sujets qui me tracassent, comme ça, sans raison apparente. » ajoutai je.
« C'est vrai que j'ai été exposé au monde des esprits dès ma naissance. » répondit il prudemment. « Et c'est vrai que ça a laissé certaines traces. Et que je me suis un petit peu renseigné à cause de ça. » dit-il en marquant des pauses entre chaque phrase, ce qui semblait tout sauf naturel pour lui. « Mais... De ce fait, je suis aussi très au courant des risques et du prix à payer pour faire appel aux esprits donc je peux t'assurer que je n'ai absolument jamais fait aucun vœu à aucun esprit. » m'assura-t-il sur le ton de la vérité absolue.
En fait, il avait l'air tellement sûr de lui que soit il était un très bon menteur, soit il disait la vérité. J'avais envie de pencher pour la deuxième option. D'autant que son dernier argument était plutôt convainquant. Sa grand-mère avait quand même perdu la vue pour avoir fait affaire avec les esprits. Bon... Elle l'avait clairement fait pour une raison plus que justifiée mais le prix n'était pas petit non plus.
« En admettant que je te croie, pourquoi est ce que tu voudrais me retenir à Joseon alors que tu sais que je me suis faite piéger par un esprit ? » demandai je, essayant d'être un peu plus indulgente. « Et ne me sert pas ta soupe habituelle. J'ai vraiment besoin de réponses là. Parce que si je n'ai pas de raisons valables, je vais être obligée de penser que tu me mens depuis le début et que tu as vraiment fait un vœu qui me concerne. Et si c'est le cas, je me torturerais l'esprit en me demandant à quel point il peut être atroce pour que tu soutiennes depuis le début que tu ne l'as jamais fait. » lui exposai je mes craintes.
Yeo Sang grimaça et prit un temps de réflexion totalement inhabituel avant de me répondre.
« Il y a plusieurs raisons. » finit il par dire. « Faire affaire avec les esprits, c'est une chose. Défaire ce qu'ils ont fait -surtout à ta demande- c'en est une autre. Honnêtement, même avec toute l'aide du monde, tu risquerais d'y perdre quelque chose et, de manière plus que probable, ta vie. Puisque la situation est déjà comme ça, tu devrais t'en contenter si tu ne veux pas mourir. C'est déjà bien que tu sois encore vivante, en bonne santé et dans toute ton intégrité après avoir eu à faire à un esprit. Je ne veux pas te voir mourir non plus. C'est la première raison. » expliqua-t-il, l'air sincère. « Ensuite... La raison la plus importante... Peu importe la raison première pour laquelle tu as été amenée ici, le fait est que je pense que tu peux être utile... Enfin... Tu pourrais même être indispensable à quelqu'un. C'est possible que tu puisses avoir une influence ou... Un impact sur sa vie, ses projets, son bonheur aussi... Un peu tout. Je ne saurais pas clairement le définir mais... Ce serait une mauvaise chose que tu partes de ce point de vue-là. » se mélangea-t-il. « C'est quelque chose que je peux ressentir aussi. » sous entendit-il.
Je croisai les bras. On ne pouvait pas plus imprécis, là.
« Tu parles de toi ? Tu penses que je peux avoir un impact sur ta vie ? » demandai je directement.
« Non. Enfin oui, c'est sûr que tu as déjà eu un impact sur ma vie. Et je suppose que tu continueras à l'avenir si tu veux mon avis mais... Non, je ne parlais pas de moi. » assura-t-il.
« Donc tu parlais de Jong Ho. » recoupai je.
Parce que ça ne pouvait être que ça. Je ne connaissais pas beaucoup les relations de Yeo Sang puisque depuis qu'il était ici, il était toujours exclusivement avec moi mais je savais que non seulement il était le serviteur de Jong Ho mais il était aussi son ami. Ou quelque chose qui s'en rapprochait au vu de leurs statuts respectifs. D'ailleurs, s'il me protégeait, c'était parce que Jong Ho le lui avait demandé. Je ne voyais vraiment pas qui ça pouvait être d'autre. Et puis, il ne répondait pas. Si je lui avais carrément coupé la chique, c'était sûr que j'étais tombée juste.
« Alors... Explique moi exactement en quoi tu penses que je peux avoir un impact sur la vie de Jong Ho. » soupirai je.
Yeo Sang savait beaucoup de choses mais il avait -à priori- loupé toutes les conversations sur les âmes jumelles donc... ça ne pouvait pas être ça. En plus, il voulait que je reste dès le départ, avant que je sois au courant moi-même.
« C'est évident, non ? » répondit il du tac au tac, cette fois ci. « Il a toujours voulu avoir quelqu'un comme toi dans sa famille. Je pense que tu ne te rends pas compte à quel point il est seul. Je crois que je n'ai pas besoin de te dire à quel point son père peut être effrayant. Et Jong Ho est son premier et seul fils légitime. Ça fait reposer un tel poids sur ses épaules. Parce qu'il est le seul à pouvoir porter ce fardeau. Et il n'a personne à qui il peut s'ouvrir. Il n'a même pas le droit de fréquenter les enfants des concubines de son père. Il les garde dans une maison différente, à part, et Jong Ho n'a pas le droit d'y mettre les pieds. La seule femme de la famille à laquelle il puisse parler, c'est sa mère. Et il préfère la protéger et ne pas trop lui en dire. Ce qui veut dire qu'il n'a personne pour le soutenir et pour comprendre ce qu'il vit réellement. Et s'il n'y avait que ça... Le premier ministre Choi a des exigences tellement élevées envers lui. Il est obligé d'étudier dur pour réussir les différents gwageo et devenir fonctionnaire puis ministre à son tour. Ce n'est pas quelque chose d'aussi aisé que ça en a l'air. Et quand Jong Ho a le malheur de faire quelque chose qui déplait à son père, ou même seulement qui le déçoit, alors il est sévèrement puni. Et par là, j'entends qu'il est battu. Rudement. Bien plus que ce qu'il a pu te laisser entrevoir si jamais tu en as été témoin. A cause de ça, il ne peut rien faire pour lui. Tu sais surement déjà que Jong Ho a aussi ses propres envies. Peut-être qu'il t'a dit qu'il voudrait devenir historien au palais ? Mais ce n'est même pas son premier rêve, tu sais ? C'est déjà une sorte de compromis qu'il aimerait un jour, peut-être, soumettre à son père. » débita-t-il dans un flot de paroles continu. « Et toi, d'un coup, tu apparais et tout de suite, il s'attache à toi, il t'intègre dans sa famille alors qu'il connait les répercussions que ça va avoir pour lui. Il s'est attaché à toi plus vite et plus fort que n'importe qui dans son entourage. Tu sais... Jong Ho porte beaucoup d'importances à certains principes et à certaines valeurs mais les gens... Même avec ses amis il n'est pas si proche que ça. Mais toi, ça a été quelque chose d'immédiat. Honnêtement, tu dois être à peu près la seule respiration qu'il ait dans sa vie à l'heure actuelle. Si tu disparaissais, est ce que ce ne serait pas comme lui avoir donné de l'air pour respirer avant de le lui retirer brusquement ? J'ai peur que si tu partais... Il ne pourrait peut-être pas s'en relever. » plaida-t-il de manière confuse.
Je déglutis devant ce plaidoyer passionné.
« De la manière dont tu le décris, on pourrait penser que Jong Ho est amoureux de moi. » lui fis je remarquer, un peu gênée de la façon dont Yeo Sang avait exposé les choses.
C'était peut-être ce qu'il pensait vraiment de notre relation. C'était vrai que vu de l'extérieur, notre relation rapide pouvait donner cette impression. Mais pour moi... C'était fraternel et ça ne pouvait absolument pas être autre chose. C'était ce qu'étaient censées être les âmes jumelles, non ? Ou alors j'étais la seule à penser de cette manière ?
« Non, ça n'a rien à voir. » contra Yeo Sang, catégorique. « C'est plus solide que ça. Un amour, ça se casse tellement facilement. Il y a tellement de raisons et de façons d'y mettre fin. Mais vous... »
Il leva les yeux vers moi et sembla regretter ce qu'il venait de dire.
« Enfin, ce que je voulais dire c'est que... C'est un ressenti. » temporisa-t-il, un peu en catastrophe, me sembla-t-il. « Mais je connais très bien Jong Ho. » fit-il valoir. « C'est ce qui me fait dire ça. »
Je hochai la tête.
« Je comprends ton point de vue. » lui assurai je. « Mais... Pour toi, pourquoi est ce que c'est aussi important ? Je veux dire... Tu veux me garder ici sur la base d'une impression, pour Jong Ho. » explicitai je. « Je sais que tu as dis que vous étiez des sortes d'amis et que tu l'admirais beaucoup mais là... Est-ce que ça ne va pas un peu plus loin que ça ? » creusai je.
Il acquiesça avec empressement.
« C'est parce que je lui dois beaucoup. » affirma-t-il, un demi sourire se dessinant au coin de ses lèvres. « En fait, si je suis tellement ennuyé que sa vie soit difficile c'est parce que c'est grâce à lui que la mienne ne l'est pas. » confessa-t-il. « Peut-être que ça ne se voit pas, justement parce que Jong Ho s'occupe bien mieux de moi que n'importe qui pourrait le faire mais en fait, je suis un nobi. » révéla-t-il.
J'ouvris la bouche de surprise. Je savais ce que ça signifiait. J'avais étudié ça en cours. Les nobi étaient la classe des esclaves, la plus basse classe de Joseon. Ils n'étaient pas totalement déshumanisés mais ils restaient des propriétés qui pouvaient être vendues, échangées ou même données. Avec la manière d'être désinvolte de Yeo Sang, je n'aurais jamais pu imaginer qu'il puisse être un esclave. En fait, je n'aurais même pas pu imaginer une seule seconde que Jong Ho puisse posséder un esclave. C'était tellement... Mal ?
« Pour être tout à fait honnête, je suis le fils d'une gisaeng. » poursuivit il. « Ce qui, comme tu t'en doutes, veut dire que je n'ai pas de père. Et les gyobang ne sont pas des pouponnières. Les clients ne veulent pas voir de nourrissons donc... Ma mère ne pouvait pas m'élever alors qu'elle vivait là-bas. Sa seule solution, c'était de me confier à ma grand-mère sauf que... C'était une nobi, elle aussi. Pour être avec elle, je suis devenu un nobi moi aussi. » expliqua-t-il.
Je ne savais même pas quoi dire de tout ça.
« Ne fais pas cette tête, ce n'est pas si terrible. » se moqua-t-il de moi. « Il y a plein de gens qui sont des nobi. A moins d'une horrible malchance, ça se passe très bien. Et ça se passait plutôt bien pour moi. » affirma-t-il. « Jusqu'à ce que notre maître décide de se séparer de moi. »
« Il n'était pas satisfait ? » demandai je. « On dirait que tu es rigoureux dans ton travail, pourtant. » fis je la réflexion.
Il manquait peut être un peu de manières mais ce n'était pas faute de les connaitre et d'en faire usage dans les bonnes situations et il avait quand même l'air plutôt efficace, au moins dans le rôle de garde du corps.
« Le problème n'était pas mon travail. » sourit-il. « C'était plutôt la fille aînée de la maison. Elle avait à peu près mon âge. » précisa-t-il.
« Tu as eu une aventure avec elle ? » crus je deviner.
Il me regarda, horrifié.
« Tu es folle ? Si j'avais fait ça, je serais tout simplement mort à l'heure qu'il est. » grimaça-t-il. « Tu sais, il y a des règles qu'on ne doit jamais, jamais, jamais outrepasser et une relation entre un nobi et une yangban fait partie de ces règles absolues. Imagine si je l'avais fait. Elle n'aurait jamais pu se marier. Elle aurait même probablement été reniée par sa famille, jetée dehors, condamnée à mourir ou à vivre en tant que nobi si jamais un maître avait eu assez pitié d'elle pour la recueillir. Et moi, j'aurais été tué, évidemment. » exposa-t-il.
« Tss, je suis sûre que les hommes yangban n'hésitent pas à s'amuser avec leurs esclaves. » crachai je, dégoutée.
« Ce n'est pas la même chose. » nota Yeo Sang.
« En quoi ? » lui demandai je, d'un air entendu.
« Et bien... Les femmes nobi appartiennent à leur maître alors... Et les femmes yangban appartiennent à leur père ou à leur mari. » tenta-t-il de s'expliquer.
Beurk. Ça me donnait envie de vomir.
« Non mais je n'aurais pas dû poser la question. » affirmai je, faisant de mon mieux pour passer outre. « Mais du coup, s'il ne s'est rien passé avec la fille de tes maîtres, pourquoi ils ont décidé de se séparer de toi ? » demandai je.
« Par peur qu'il finisse par se passer quelque chose. » dit-il. « En fait, mon maître était très en colère contre moi. Il ne pouvait pas rendre sa fille responsable, bien sûr. Alors il a voulu me vendre au plus vite sans être vraiment regardant sur l'acheteur. » raconta-t-il.
« Alors il t'a vendu à quelqu'un de mauvais ? » anticipai je, ayant un peu peur de la suite.
« En fait, il a voulu me vendre à un fossoyeur. C'est... Un métier où il y a besoin de beaucoup de main d'œuvre. Il faut récupérer des corps, les transporter, les enterrer ou les brûler et aussi, ce sont eux qui font office de bourreau. Personne ne veut les approcher. De toutes les catégories de gens exclus, ce sont eux qui sont le plus mis à l'écart. » rapporta-t-il.
Je grimaçai. J'imaginais bien les conditions d'hygiène dans lesquelles ça devait être fait, en plus. Ils devaient récupérer pas mal de corps de gens morts de maladies diverses dont certaines devaient être contagieuses et en plus, ils devaient aussi assumer le rôle de bourreau ? Non seulement enterrer les gens mais aussi les tuer ? C'était tout simplement horrible.
« Heureusement, je connaissais déjà Jong Ho. Quand il a su pour moi, il est allé voir mon maître et il a proposé le double du prix pour m'avoir. Et il a aussi racheté ma grand-mère. Ça n'a pas gêné mon maître de la voir partir avec moi. Elle n'était pas des plus utiles comme elle est aveugle et personne ne voulait la racheter à cause de ça. Il s'en occupait parce que c'était son devoir. C'était un bon maître malgré tout. Il voulait seulement veiller sur sa fille. » soupira Yeo Sang que je trouvais beaucoup trop compréhensif.
Il avait quand même frôlé une vie de misère à cause de lui. Qu'est ce qu'il y pouvait lui, s'il plaisait à sa fille ? Il était beaucoup trop raisonnable pour lui faire quoi que ce soit alors... C'était dur de le punir pour quelque chose qui ne s'était jamais passé et pour laquelle il ne pouvait rien. Après ça, il pouvait encore le qualifier de 'bon maître' ?
« Mais comment tu connaissais Jong Ho, du coup ? » demandai je, intriguée.
« Par le jeune maître de la maison. C'était surtout lui que je servais. » répondit Yeo Sang. « En fait, maintenant que j'y pense, tu l'as déjà rencontré pendant tes fiançailles. Je n'ai pas pu me joindre à vous pour des raisons évidentes mais je gardais un œil sur toi. Il s'appelle Han Eul Tae. » précisa-t-il.
« Oh, l'ami intelligent de Jong Ho. » replaçai je immédiatement.
Jong Ho m'avait présenté trois amis, ce jour-là. Yul et sa femme Seong Nyeong ainsi que le fameux Eul Tae. Les amis qui faisaient partie de son trafic de drogue... Mais... ça voulait dire...
« Attend, toi aussi tu fais parti du trafic de drogue de Jong Ho ? » hallucinai je. « C'est pour ça qu'il t'a racheté ? » fis je la liaison.
« Oh non ! Enfin je... Oui... Peut être un peu, c'est vrai. » concéda-t-il, l'air peu sûr de lui ou, plus probablement, du bien fondé de me le révéler.
« Non mais je rêve. » lui lançai je, outrée. « Tu te permets de toujours me donner des leçons sur les soi-disant choses stupides que je fais mais toi tu... Tu vends de la drogue ! C'est... J'aurais dû m'en douter vu comme tu es proche de Jong Ho. Mais enfin, tu avoueras qu'il n'y a pas plus stupide que ça, quand même ! » le tançai je.
« Je... Non... En fait... Bon... Je crois que je ne peux pas dire le contraire... » se découragea-t-il, complètement décontenancé. « Mais, je suis un nobi, quand même. Je n'ai pas vraiment mon mot à dire là-dedans, hein... » se défendit il de manière peu convaincue.
« C'est ça... Va me faire croire que Jong Ho ne t'a pas laissé exprimer ton opinion et qu'il te force à faire quelque chose... » râlai je, pas persuadée que Jong Ho ferait ça, esclave ou pas.
Puis je réalisai.
« Et maintenant, beaucoup de choses s'expliquent ! » soufflai je. « En fait, c'est très pratique que tu sois au palais. Tu peux plus facilement atteindre la clientèle du palais là où tu es. Et c'est pour ça que le prince Seong Hwa connaissait ton prénom et que tu avais l'air d'obéir à ses ordres comme si c'était les miens. » fis je le rapprochement. « C'est un client important, n'est-ce pas ? »
« En fait... »
« N'essaie pas de me dire le contraire. Vous avez essayé de me faire croire que le prince et Jong Ho étaient amis mais en fait, c'est juste un camé et son dealer. » m'énervai je.
« Euh... Je ne comprends pas vraiment tout mais le prince t'a dit lui-même que... Ce qu'il achetait à Jong Ho n'était pas pour lui. » me rappela-t-il, l'air d'être complètement dépassé par la situation.
Il espionnait vraiment toutes mes conversations...
« Et tu penses que je vais croire ça ? » lui dis je d'un ton entendu. « C'est vrai que le prince à sous-entendu que ce n'était pas pour lui et même que c'était pour empêcher quelqu'un d'autre de souffrir mais objectivement, il y a qui dans l'entourage du prince Seong Hwa ? » posai je la question. « La basse-cour de jeunes femmes qui lui courent après ? Il n'a pas l'air de tenir spécialement à une seule d'entre elles. Il reste qui après ça ? De la famille ? Son père et sa mère sont morts et il déteste le roi... Pour qui veux-tu que ce soit à part pour lui ? »
Yeo Sang pencha la tête, l'air gêné, ne sachant visiblement pas quoi répondre. Bah oui, c'était compliqué de contrer des arguments logiques. A moins que...
« Attend... Je me trompe depuis le début ? » demandai je, pris d'un doute inquiétant. « J'ai tout de suite sauté aux conclusions en imaginant un trafic de drogue et Jong Ho n'a pas nié mais en fait, en y repensant bien, il a parlé de 'substances'. Ça pourrait être n'importe quoi comme... Du poison ? » réalisai je, glacée à cette idée.
Je n'avais jamais vu le prince Seong Hwa ne pas être maître de lui-même alors c'était difficile d'imaginer qu'il se droguait vraiment. En revanche, il avait pas mal de rancœur en lui et l'imaginer vouloir empoisonner quelqu'un était plus plausible.
« Euh non mais attend, Ri Ah. » me coupa Yeo Sang. « Je crois que tu t'imagines des choses, là. D'accord, Jong Ho fait des choses illégales et, oui, c'est vrai, peut être que je l'aide un peu. Mais là, tu vas un peu loin, quand même. Tu crois vraiment que Jong Ho pourrait vendre du poison et être coupable d'empoisonnement par association ? » demanda-t-il sur le ton du reproche.
« Parce que vendre de la drogue, c'est mieux ? » lui retournai je. « C'est aussi une sorte de poison. » fis je valoir mon point de vue.
« Oh, oublie un peu les histoires de drogue et essaie de voir les choses autrement. » souffla-t-il, comme si c'était moi qui étais en tort. « Tu l'as dit toi-même, le prince Seong Hwa est très seul. Tu ne penses pas qu'il a besoin de rencontrer des gens ? Dans sa situation ce n'est pas facile... »
« Euh... Je dois comprendre que le prince achèterait de la drogue à Jong Ho pour le voir ? » voulus je éclaircir, trouvant sa suggestion un peu tirée par les cheveux.
« Et ben, ce qui est sûr c'est qu'ils se rencontrent régulièrement. » hésita un peu Yeo Sang. « Et objectivement, comme tu dis, le prince n'a pas vraiment l'air de consommer quoi que ce soit de... Bizarre. » fit-il remarquer.
Hum... C'était une autre perspective. Deux hommes qui se sentaient seuls et qui avaient besoin d'un prétexte pété pour se voir...
Je secouai la tête. C'était débile. Et puis, pourquoi ça m'importait, de toute façon ? Ce n'était pas mon problème. D'ailleurs, dès que je serais rentrée chez moi, plus rien de tout ça ne serait mon problème. Pourquoi est ce que j'interfèrerais dans les vies des uns ou des autres ?
« Peu importe. » jetai je donc l'éponge. « Dans tous les cas, arrête d'essayer de me dissuader de partir. Ça ne me fera pas changer d'avis. Et Jong Ho s'en sortira très bien sans moi, comme quand il ne m'avait jamais rencontrée. Et dans tous les cas, je ne vis pas pour lui comme il ne vit pas pour moi donc j'ai le droit de faire mes propres choix, même s'ils ne sont pas absolument dans son intérêt. » essayai je de faire comprendre à Yeo Sang, même si ça m'arrachait un peu le cœur de dire les choses comme ça.
C'était vraiment difficile d'envisager que je puisse faire quelque chose contre les intérêts de Jong Ho. Ça me rendait presque malade. Mais nous étions des entités séparées et nous devions le rester. Sinon je ne pourrais jamais repartir. Donc aussi douloureux que ça pouvait être, je devais tenir cette ligne.
Yeo Sang eut le bon goût de hocher la tête même s'il gardait un air inquiet.
J'étais à peu près sûre qu'il ne changerait pas de comportement mais au moins, les choses étaient dites.
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Vocabulaire :
Pyeongsang : Meuble hybride entre la table, le lit et le banc. C'est un carré en bois large surélevé sur 4 ou 9 pieds
Soban : petite table à manger individuelle en forme de plateau.
Yokwe : Monstres ou créatures surnaturelles possédant des pouvoirs surnaturels. Equivalent coréen du yokai japonais.
Gwageo : Examen de la fonction publique
Nobi : Classe des esclaves
Gisaeng : Courtisanne.
Gyobang : Ecole, institut de gisaeng.
Yangban : Classe des nobles. Sous Goryeo, elle était composée de fonctionnaires civils et militaires mais sous Joseon, il s'agit plutôt d'érudits nobles (par l'influence du confucianisme) bien que les militaires aient aussi gardé ce titre.
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Apparemment, certains trouvent le personnage de Yeo Sang un peu difficile à cerner... J'espère que ce chapitre vous en aura appris un peu plus sur lui et vous aidera à vous faire une opinion à son sujet^^