Chapitre 8

448 79 76
                                    

Lorsque j'arrive devant le restaurant, Stéphane est déjà là et m'attend, assis sur un banc de la place, à deux pas de l'établissement. Tout en m'approchant de lui, je remarque qu'il s'est fait beau. Un pantalon à pinces sombre a remplacé les jeans qu'il porte habituellement et une chemisette aux tons clairs vient égayer le tout. Quand il tourne la tête vers moi, son sourire est resplendissant. Il me détaille un instant puis se lève et se dirige vers moi, sa veste à la main.

— Bonsoir, dit-il en se postant devant moi. Comment vas-tu ?

— Très bien, et toi ?

— Eh bien, j'ai faim, sinon je me porte à merveille.

— Ça tombe très bien, nous sommes là pour manger. On y va ?

Il hoche la tête et nous nous dirigeons vers la porte d'entrée de La table tourangelle. Lorsque nous la franchissons, l'ambiance rétro qu'il y règne me séduit instantanément. Face à nous, un vieux comptoir, sans doute chiné chez un brocanteur, nous accueille. Derrière celui-ci des étagères en pin massif se dressent et exposent des objets et photos de toutes sortes. Un cadre immense présentant une version quelque peu différente du restaurant culmine au sommet. Plus bas, je discerne un cliché de deux hommes dans un camion orange, un papier rempli de gribouillis, des polaroïds, une fiole pleine de sable, des bouteilles de vins régionaux et enfin un dessin, sans aucun doute réalisé par un enfant, montrant deux personnes qui tiennent un drapeau aux couleurs de l'arc-en-ciel.

Il ne faut pas être un génie pour comprendre que ce restaurant est friendly et le bien-être que j'avais ressenti en pénétrant dans les lieux se charge d'un sentiment de sécurité absolu qu'il est rare de trouver partout.

Cet endroit plairait à Philippe. À tous mes amis d'ailleurs.

Je secoue la tête pour chasser mon ex de mon esprit et braque le regard sur la jeune femme qui vient de sortir d'une pièce par une porte battante.

— Bonsoir, Messieurs, chantonne-t-elle. Vous désirez une table ?

— Oui, j'ai réservé au nom de Thierry Roussel.

Elle sourit et consulte l'agenda posé à côté de la caisse, puis relève les yeux vers moi.

— En effet, pour deux personnes. Je vous accompagne.

Laura, comme son badge l'indique, nous conduit alors sur notre gauche, dans une salle au charme bohème évident. Les tables parées de nappes brodées sont presque toutes occupées, la couleur vert d'eau des murs apporte de la douceur et met en valeur les cadres noirs renfermant des photos en noir et blanc de notre ville, prises il y a quelques décennies. Tout ici a été pensé et effectué avec goût. Si la nourriture est aussi délicieuse que le décor, je vais faire de cet endroit ma cantine.

Nous nous installons à une petite table au fond de la salle. Laura nous abandonne et je reporte mon attention sur mon invité.

— Séverine, ma collègue, m'a conseillé ce restaurant, expliqué-je. Je ne m'attendais pas ce qu'il soit si...

— Apaisant ?

— C'est ça. Je crois que je suis amoureux.

Ses iris vairons me sondent et je rougis en réalisant les mots que je viens de prononcer. Nous savons l'un et l'autre qu'ils sont adressés à ce lieu, mais je ne peux m'empêcher d'imaginer que peut-être un jour ils seront destinés à cet homme qui me terrasse d'un seul regard. Je suis certain que les mêmes pensées traversent son esprit à cet instant précis.

Je saisis l'une des cartes que Laura a déposées sur la table et me cache derrière. Stéphane pouffe de rire et prend la sienne afin de consulter le menu. Tout me tente, mais je crois que je vais jeter mon dévolu sur la salade Tourangelle version entrée puis sur le sandre à la poire tapée. Pour le dessert, on verra après.

Tourner la pageWhere stories live. Discover now