Chapitre 3

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Il fait encore chaud en ce début septembre et la bibliothèque, installée dans un vieux bâtiment en pierre, ne désemplit pas tant il y fait bon. Séverine et moi nous occupons des prêts et des retours pendant que les deux bénévoles qui nous aident pendant les permanences prennent en charge le rangement des livres. Malgré le monde, nous tenons le rythme et arrivons à écouler le flux de personnes sans que la file d'attente ne soit trop longue.

Quand « Le signal » de Maxime Chattam est posé devant moi, je relève les yeux et tombe dans deux iris de couleurs différentes, sous lesquels se trouve un grand sourire avenant.

— Bonjour, s'exclame l'inconnu de la boulangerie.

— Bonjour. Alors ce « Signal » vous a plu ?

— Eh bien, au risque de m'attirer les foudres du bibliothécaire, je n'ai pas accroché du tout.

J'arrête mon geste alors que j'allais scanner le livre et interroge mon vis-à-vis du regard.

— J'ai eu beaucoup de mal à rentrer dedans, ajoute le concerné en haussant les épaules. Je me suis forcé à le terminer.

— Quand un texte ne nous parle pas, il n'est pas utile de se forcer, répliqué-je en passant le bouquin sous la douchette.

— Je n'aime pas abandonner, rétorque-t-il en croisant ses bras sur son torse. Vous avez quelque chose à me conseiller ?

— Vous avez envie de quoi ?

Il fait mine de réfléchir alors que j'entends Séverine glousser à côté de moi.

— Quelque chose de léger, sans prise de tête.

— C'est vaste.

— Tu devrais accompagner Monsieur en rayon, intervient alors ma collègue. Ce serait plus simple de choisir avec les livres sous les yeux.

— Je suis d'accord, déclare le mangeur d'éclair au chocolat. J'ai emprunté tant d'ouvrages que je saurais mieux les reconnaître en voyant la couverture. Ma mémoire vacille un peu, parfois.

Je hoche la tête, me lève et entraîne le client vers la section roman. Une fois entre les rayonnages je commence à lui proposer plusieurs titres qu'il a d'après ses dires déjà lus.

— Je suis plutôt bon public, m'explique-t-il. Mais ces derniers temps, je n'ai enchaîné que des déceptions.

— Si vous désirez une valeur sûre, je vous conseille Gilles Legardinier, il excelle dans l'écriture de thriller, mais est encore meilleur en comédie.

Je m'arrête devant une étagère et en extrais un livre.

— Celui-ci, est parfait si vous voulez quelque chose de léger.

Il saisit l'objet et le retourne pour en lire la quatrième de couverture, puis relève la tête vers moi, un grand sourire sur le visage.

— Eh bien, ça peut être pas mal.

— J'ai beaucoup aimé, une héroïne déjantée et des situations rocambolesques. Idéal pour passer un bon moment.

— Je vous fais confiance et je vous dirai s'il m'a plu.

— Avec plaisir. Vous voulez en choisir un autre ?

— Non merci, si je n'en prends qu'un, je reviendrai plus vite.

Le clin d'œil qui accompagne ses paroles me cloue sur place. J'avale ma salive avec difficulté et retourne à la borne de prêt, le cœur tapant comme un fou dans ma poitrine. En quelques minutes, l'ouvrage est enregistré sur la carte de l'homme qui s'avère s'appeler Stéphane Lebas et ce dernier quitte la bibliothèque, me laissant perplexe.

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