Chapitre 42

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Leur supérieur les guida jusqu'à un amphithéâtre de pierre que Martin avait toujours cru être des emplacements pour se prélasser au soleil. C'était donc à cela qu'ils servaient ? 

     Il ne put réprimer un frisson. Le Bastion dans son ensemble s'était rassemblé, y comprit les employés qui n'étaient pas Gardes à proprement parler, mais qui s'occupait des nombreuses lessives, du ménage, de la cuisine ou même du jardin. D'ailleurs, une partie de celui-ci avait été altéré pour devenir un terrain escamoté. Un Sorcier était en train de réparer les dégâts laissés par le précédent duel – ses mains traçaient dans l'air des formes compliquées pour reboucher un trou béant. 

     La Commanderie était installée au premier rang. Trônant au milieu, le Général Lanteigne bavardait joyeusement avec le Commandant Marc Jaubert, comme si rien de tout ça n'avait d'importance. Comme-ci ce n'était qu'un jeu. Sa nausée le reprit. 

     La foule les applaudit poliment lorsqu'elle les remarqua enfin. Martin vit Hugo rougir violemment, gêné d'être le centre de toute cette attention. Il passa une main réconfortante dans son dos en le poussant en avant. 

     Vincent, au bord du terrain, leur adressa un sourire encourageant. De toute évidence, il tiendrait de nouveau le rôle d'arbitre. Martin expira, soulagé. Au moins, ils pourraient compter sur son impartialité ! 

- Bonne chance, leur souffla Ariane Grasset en leur indiquant le côté droit du terrain.

     Martin ne put s'empêcher de la regarder droit dans les yeux lorsqu'il passa devant elle. Elle lui sourit. Elle murmura quelque chose, mais elle parlait si bas qu'il eut l'impression qu'elle était soudain devenue muette. Il parvint néanmoins à lire sur ses lèvres : 

- Vous êtes mon meilleur élève, Martin.

     Il lui rendit son sourire et pressa un peu le pas pour rejoindre ses camarades qui s'étaient déjà alignés le long de leur limite. L'espace d'un instant, il se dit qu'il devrait dire quelque chose de solennel, une bonne vanne au moins pour détendre l'atmosphère, mais il ne trouva rien à dire. 

- Oh merde, souffla Étienne. 

     Leurs adversaires étaient apparus de l'autre côté du terrain. Martin sursauta. C'était l'équipe de Paul. Il adressa à Azzeddine un regard lourd de reproche qui le lui rendit par un discret haussement d'épaule, comme s'il ne savait pas ce qu'il fichait là. Il lui avait pourtant assuré qu'il ne participerait pas à l'examen. Pourquoi lui avoir menti ? 

- Commencez, lança soudain le Général d'un air ennuyé en accompagnant la remarque d'un vague geste de la main.

     Martin n'entendit même pas le coup de sifflet de Vincent. Il eut pour premier réflexe de se mettre à couvert avant de concentrer ses pouvoirs dans ses mains. Sa magie de glace heurta de plein fouet un rocher derrière lequel Milo s'était réfugié. Clément répliqua immédiatement par une prodigieuse vague de feu qui passa heureusement juste au-dessus de leurs têtes. Comme par réflexe, son corps se couvrit de givre devant la puissance de ce charme incendiaire. 

- Mais c'était quoi, ça ? s'épouvanta Étienne. Ils veulent nous tuer, ou quoi ?

     Martin fut obligé de reconnaître que pour une fois, n'exagérait pas. Une seconde vague passa plus proche encore, obligeant Étienne à déployer un bouclier pour leur éviter d'être touchés. 

     Mais qu'est-ce qu'il cherchait à faire ? Le but d'un duel n'était pas de blesser son adversaire – ou en tout cas rien de bien sérieux qui ne puisse être soigné par le premier Guérisseur venu ! Clément avait pourtant l'air prêt à les carboniser sur place, et devant toute l'assistance !  

ALLÉGEANCE {Tome 1} Les Murmures du BastionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant