— il a flirté avec toi, me souffle alors Séverine en approchant sa chaise de la mienne.

— N'importe quoi.

— Mais bien sûr, se moque-t-elle. J'aurais pu écrire cette scène et cette rencontre.

Je lève les yeux au ciel et souris à une adhérente qui me présente une pile de romans.

— Nous nous étions déjà rencontrés, répliqué-je après le départ de la jeune femme.

— Non !

Séverine ouvre de grands yeux et tape dans ses mains.

— Vas-y raconte-moi ! s'exclame-t-elle.

Ma collègue a fêté ses quarante-cinq ans cette année, mais elle ressemble à une gamine tant elle s'émerveille d'un rien.

— Y'a rien à dire, on s'est juste croisé l'autre jour à la boulangerie.

— C'est déjà bien. J'aime ses yeux. C'est très... sexy.

— Tu fais dans le vieillard maintenant ?

Elle éclate de rire.

— Je suis satisfaite de ce que j'ai à la maison, merci. Et cet homme n'est pas un vieillard, il doit avoir ton âge. Oh attends !

Elle se colle à moi et attrape la souris de mon ordinateur afin d'ouvrir les informations de la carte de Monsieur Lebas.

— Alors, qu'avons-nous là, murmure-t-elle. Stéphane Lebas, j'aime bien. Né en 1961, le 12 juillet. Oh c'était son anniversaire il n'y a pas longtemps.

— Deux mois quand même.

— Un détail.

— Tu crois que c'est bien ce que tu es en train de faire ?

— Je ne fais rien de mal, il nous a donné lui-même ces informations, arrête de cogiter.

— Pour obtenir une carte de bibliothèque, pas pour qu'on le stalke.

— Oh regarde, ajoute-t-elle sans m'écouter. Il habite à deux rues d'ici et tu as son numéro de téléphone si tu veux.

Je lui lance un coup d'œil blasé. Je me vois bien appeler cet homme que j'ai croisé deux fois.

— Qu'est-ce que je lui raconterais ?

— Bonjour, je suis Thierry, le bibliothécaire, dit-elle en tentant d'imiter ma voix. Est-ce que vous accepteriez de venir boire un verre avec moi ?

— Bien sûr, le meilleur moyen de me prendre un parpaing en pleine poire.

— Mais non, il a flirté avec toi je te dis. Tout le monde l'a vu te mater les fesses.

— Pardon ?

— Bon j'exagère un peu, mais dans mon roman il t'aurait regardé le cul, je t'assure.

Je soupire et me pince le nez. J'adore ma collègue, mais parfois elle me fatigue.

— OK, ne l'appelle pas, mais la prochaine fois qu'il vient, observe bien. Il y a des signes qui ne trompent pas.

— Ah oui ?

Elle hoche la tête.

— Franchement, tu crois qu'il avait besoin de toi pour emprunter un Legardinier ?

Je grimace devant son air blasé.

— C'est vrai que je n'ai pas été original sur ce coup-là, ronchonné-je.

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