Chapitre 23. Fin de l'Autorité

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Eythan

Me revoilà dans ce 4x4. Cette fois-ci, c'est bien moins animé. La nuit semble avoir avalé la colère de ce Yvan. Ou alors c'était cette dispute avec Astrid. Dommage. Subir sa haine était un bon entraînement. Si un jour je décide de n'en n'avoir plus rien à foutre et que j'élimine quelqu'un parce qu'il s'oppose à moi, je devrais être prêt à subir un torrent de merde sans pouvoir riposter. Même Dieu ne saurait apaiser toute la haine d'Internet.

La lune est si haute dans le ciel. Pourtant il n'est que 22 heures. « Les nuages n'écoutent pas la météo » comme on dit. La ville défile devant mes yeux. Les lampadaires participent à cette ambiance très mélancolique. Je pourrais passer des heures, la tête adossée à la fenêtre, à admirer le paysage défiler.

Ça n'a pas l'air d'être le cas de ma blonde préférée. Sa tête s'appuie contre mon épaule, et son regard s'accroche à moi tel mon ombre. Aurais-je pris cet appel si je savais qu'il allait jeter un tel froid entre nous ? À vrai dire, je n'en sais rien. Cette mauvaise ambiance n'est pas dûe à une quelconque méchanceté d'Hélène. Au contraire.

Ses doigts enlacent les miens comme s'ils allaient disparaître. Toute son attention est focalisée sur moi dans un seul but : me réconforter. Quant à moi, je reste muet tel un moine bouddhiste et mon regard se perd dans l'immensité du décor. Je suis le seul fautif dans cette histoire.

Mais j'ai besoin de réfléchir à certaines choses. Dois-je offrir une voiture, ou n'importe quel autre bibelot, mille fois plus cher que celle que possède déjà Astrid ? Je suis reconnaissant envers elle. Sa vivacité d'esprit et son calme olympien m'ont bien aidé pour me retrouver sur la route en quelque secondes.

Mais lui offrir un object aussi cher ne serait-il pas insultant pour sa fierté ? La gratitude que je ressens vis-à-vis d'elle n'a rien à voir avec mon expérience avec l'infirmière. Cette dernière m'a prêté quelques euros, je lui ai rendu mille fois plus, fin. Un simple calcul logique, mécanique.

Comment rembourser une efficacité née de qualités acquises pendant toute une vie ? À part avec un service mille fois plus grand, je ne vois pas. Pour créer mille fois plus de bonheur, je devrais rendre un service du style « sauver le monde ». La flemme. J'imagine que je devrais parfois abandonner ce principe du « mille fois plus ». Dommage, c'était une belle improvisation.

Ce sac contenant 5 000 euros m'embarasse aussi. Feignant le deuil, ça me paraissait incohérent de prendre la peine d'amener le sac dans la maison. Mais si Yvan découvre son contenu, il pourrait bien convaincre Astrid que je trafique de la drogue ou autre. Vu le contexte de deuil qui va s'abattre sur moi, il me sera difficile d'extraire ce sac de son coffre sans éveiller sa méfiance.

Deux autres procédures me préoccupent. Mais tant que je ne reverrais ni Isaac ni mon frère, je ne pourrais pas régler ces problèmes. Ce n'est pas un hasard si je m'en vais les rejoindre.

***

La voiture s'arrête et Yvan coupe le moteur. Sans plus attendre, je me détache et claque la portière derrière moi. Je soupire en voyant Isaac et mon frère m'attendre ensemble. Le maître cruel accompagné par l'esclave moderne. Le luxe accompagné par la pauvreté. Le capitalisme accompagné par ses pires conséquences. Qui aurait cru voir un jour un tel spectacle ?

Leurs regards se tournent vers moi. Je salue le multimillionnaire de loin. Je lui prête si peu d'attention, alors que je lui ai ordonné de me rejoindre à une heure si tardive. L'arroseur arrosé. Maxime marche dans ma direction. Si sa copine n'est pas à ses côtés dans ces circonstances, c'est certainement que leur patron ne l'a pas autorisé à quitter le travail. Il va vraiment falloir que je règle le problème qu'il représente.

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