Chapter three

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Il me tend la main.
—Euh... je ne...
Il sourit et repose sa main sur notre table.
—Je vois, pas d'inquiétudes. Vous n'êtes pas très tactile ?
—Pas vraiment, souris-je.
Présente-toi, imbécile !
—Oh, et... je m'appelle Oria Stiles.
—Ravi de vous rencontrer.
Il prend une carafe d'eau fraîche et nous sert un verre.
—Alors, cette interview !
—Je.... je ne vais pas vous cacher que c'est ma première... je débute dans le métier.
Il hoche la tête.
—Je connais ce que c'est. Je vais vous donner des conseils ; vous voulez bien ?
—Bien sûr.
Je suis toute tendue... fais quelque chose !
Je me racle la gorge. Sérieux, il me dit :
—Eh.
Je sursaute à moitié.
—Oui ?
—Je vous fait peur ?
—Pardon ?
Je transpire un peu. J'ai envie de pleurer. Pourquoi ? Pourquoi est-ce que tous les hommes me font penser à lui ?
—Est-ce que je vous fait peur ? Vous n'avez pas l'air bien.
—Je vais bien. Je suis juste... un peu stressée ! Je suis en train de parler avec une célébrité, alors...
Il lâche un petit rire.
—Je suis un humain, vous savez ? Je ne vais pas vous manger !
—Vous avez raison, pardonnez-moi.
Je ris avec lui. Plutôt sympathique... mais si ça se trouve, au fond de lui, il est comme David..
—Au fait... je pensais que c'était Jacob Gyllenhaal ?
Il fait un signe de main.
—Jake, seulement Jake. J'ai l'habitude.
—D'accord.
Un serveur vient nous apporter deux plats de pâtes carbonara.
—Merci, fait monsieur Gyllenhaal.
—Alors... je suis censée faire quoi de précis, lors d'une interview ?
Il prend une pâte sur sa fourchette en la tendant vers moi.
—Votre boulot est de divertir le public. Ce sera diffusé à la télé et sur YouTube.
Il mange sa pâte et tend à nouveau sa fourchette vers moi en faisant des cercles.
—Les gens sont fatigués.
—Mais... par quoi ?
Il a l'air très sérieux. C'est vrai que c'est son travail, à lui aussi.
—Par tout ! Le travail, le repas du resto froid, la voisine bavarde, les enfants, et les klaxons de la rue. Il faut leur faire oublier tous leurs problèmes, et c'est ce qu'on va faire.
—D'accord.

...

Pendant une bonne demi-heure, tandis que l'on mange, il m'explique des tuyaux du métier et me donne des conseils. Puis, pendant une vingtaine de minutes, nous revoyons les questions que j'ai écrites sur le film et lui.
—Tout est fin près ! s'exclame-t-il, tout content.
Il faut dire que moi aussi je suis fière.
—Super. On y va ?
—Allons-y.
Nous laissons les deux coupelles de glace vide et allons à l'accueil. Je tends ma carte bleue en tenant ma manche sur mon poignet pour cacher l'hématome. Monsieur Gyllenhaal le fixe un instant puis proteste en se tournant vers moi :
—Laissez, je vais payer.
Je repense un moment à mon petit appartement et à mon frigo presque vide, et mes placards remplis de pâtes.
—J'insiste. Vous êtes l'invité...
—Eh bien, d'accord.
Il sourit. Après avoir payé, nous sortons du café. L'air est tiède, j'ai chaud ! Nous traversons la rue et entrons dans mon agence. Les gens se retournent sur notre passage. Je déglutis. C'est la chose que je déteste le plus au monde... que les autres me regardent. Me jugent. M'inventent une vie.
Monsieur Gyllenhaal me sort de mes pensées en murmurant :
—Ne faites pas attention à eux, mademoiselle Stiles.
Je hoche la tête. Oh non, il se dirige vers l'ascenseur ! Je vais être collée contre plein de gens et...
—Vous venez ?
J'avais inconsciemment arrêté de marcher. Il me fait passer dans l'ascenseur qui est, évidemment, bondé. Il se place derrière moi. Je ferme les yeux très fort et contrôle ma respiration. Je tourne mon esprit vers ma chanson préférée et commence à la chanter dans ma tête. Ça me détend, mais pas complètement. Gyllenhaal doit remarquer mon malaise car, dans mon dos, il me prend par les épaules et me décale contre le mur de l'ascenseur. Devant moi j'ai les boutons, et derrière le bras de Jake qui empêche les autres de me toucher. Je me laisse aller contre le mur frais. C'est un vrai gentleman...
Je me tourne vers lui et lui fait un petit sourire pour le remercier. Il me le rend.
Nous montons au cinquième étage, le studio. Il y a un joli décor et deux sièges. Derrière le mien se trouve l'affiche de Far From Home. Je commence à stresser...
Je respire un bon coup, tandis que Jake salue les caméramans et tous les gens présents. Quand à moi, je reste seule dans mon coin avec ma stupidité et ma timidité, à m'affairer avec mes feuilles dans le désordre. Monsieur Gyllenhaal parle un moment avec les autres, puis me jette un regard et viens vers moi. Je toussote.
—Mademoi... je peux vous appeler Oria ?
—Bien sûr monsieur Gyllenhaal.
—Vous pouvez m'appeler Jake.
Je hoche la tête.
—D'accord Jake. Vous vouliez me parler ?
—Oui.
Il a l'habitude de fixer la personne à laquelle il parle, ce qui est déstabilisant.
—Je voulais simplement vous rappeler que stresser ne sert à rien. Vous aurez votre feuille sous les yeux, et on me filmera en grande partie. On aura juste à parler comme au café !
—Bien. Vous avez raison, j'en fais un peu trop.
Quand il me regarde, j'ai l'impression qu'il essaye de capter quelque chose venant de moi. Je ne sais pas vraiment. Il se détourne et retourne parler aux inconnus. Il a l'habitude.
—Allez ! fait un monsieur. Nous allons commencer. Vous êtes près ?
—Toujours ! fait Gyllenhaal. Et vous Oria ?
—Euh... oui, bien sûr.
Je me fais rapidement maquiller, et nous nous asseyons à nos places. La lumière m'aveugle un peu. Je cligne des paupières et regarde le caméraman, puis le patron du studio.
—Bien, tu as ta feuille dans les mains, tu n'as qu'à lire les questions.
Ils font quelques réglages, tandis que Jake remet bien son teeshirt et se passe la main dans les cheveux. Je baisse les yeux sur ma feuille.
—3... 2... 1... action !
Une diode s'allume rouge sur la grosse caméra. Je reste coincée une seconde comme une idiote et déballe :
—Bonjour monsieur, je... il..
Je mets mes mains devant mon visage. Mes joues me brûlent.
—Mon dieu, merde...
—Coupé ! Faut se détendre, mademoiselle.
Ils règlent encore quelques trucs. Je hoche la tête en retenant mes larmes. J'ai peur, c'est la première fois que je fais ça, et...
—Psst...
Quelqu'un m'appelle. J'entrouvre mes doigts pour regarder monsieur Gyllenhaal. Il chuchote pour ne pas que les autres nous entendent :
—Oria, respire. Regarde-moi.
Je renifle un coup et retire mes mains de mon visage. Je fixe Jake. Lui aussi me fixe juste.
—Interview Gyllenhaal, seconde. Action !
Jake, seulement maintenant, me fait signe de respirer et me sourit. Je sens une bouffée de force jaillir en moi. Je regarde la caméra.
—Bonjour à tous, bienvenue dans l'interview de Jake Gyllenhaal pour le film Spiderman Far From Home ! Bonjour monsieur Gyllenhaal.
—Bonjour mademoiselle Stiles.
Ça fait si bizarre de faire comme si je venais de le rencontrer ! Lui joue très bien.
—Première question ; avez-vous aimé jouer dans Spiderman FFH ?
Il me sourit. Je souris aussi.
—J'ai adoré, évidemment ! Jouer avec Tom Holland, Samuel L. Jackson et toute la troupe a été un vrai plaisir. Nous avons bien ri !
Je ris doucement, et monsieur Gyllenhaal paraît surpris de me voir aussi détendue.
—Et Mysterio, comment le trouvez-vous ?
—Franchement, c'est mon villain préféré dans Marvel. Je suis si heureux de faire partie du Marvel Studio.
—C'est vrai, et je suis sûre que c'est le rêve de plein de jeunes gens partout dans le monde. Question suivante !

...

𝒜𝓅𝒶𝒾𝓈𝑒𝑒. [𝒥.𝒢]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant