Jour 49, part 2

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Rick m'a amené partout où il devait aller. Au lieu de rester dans le réfectoire, je l'ai suivi aux douches, chez la psy et ensuite la cour, bien sûr, tout ça en faisant attention à ne pas croiser Styles. On est devenus inséparables cette journée, je n'y aurais jamais cru avant aujourd'hui. Mike ne nous a pas beaucoup croisé, tant mieux, sinon il nous aurait demandé pourquoi autant d'amour tout à coup. Je n'aurais pas su quoi répondre, Rick aurait sûrement trouvé une excuse bidon pour nous sauver. Ça fait du bien de voir d'autres têtes, je voyais toujours la même depuis plusieurs semaines. Je regarde souvent autour de moi discrètement pour voir s'il ne serait pas dans les parages, et Rick n'a eu aucun mal à le deviner.

« Arrête de le chercher, s'il te voit faire ça il va croire que tu veux le voir.

- Je ne voulais pas, pardon.

- Et arrête de tout le temps t'excuser. Il est où le Jason sûr de lui dont on a affaire depuis le début de son arrivée, hein ? »

Loin, très loin, perdu dans les pénombres.

« C'est lui que je veux voir, buste droit et tête haute. Ne te rabaisse jamais face à l'un d'eux et encore moins un raté comme lui.

- Facile à dire. »

Quand ça fait plus d'un mois que tu passes du temps avec une personne, on s'y habitue. Il faisait partie de mon quotidien, j'allais au travail pour lui, il était mon travail. Comment je vais faire si je le vois autour de moi ? Ce sera impossible de le fuir. Rick essayait depuis le début et pourtant, il le croise toujours et s'occupe de lui, donc je vais devoir faire pareil. Je vais devoir me contenir et le traiter comme tous les autres. Lui, il aura les mêmes habitudes, ou du moins celle de la chambre, c'est médical pour lui. Il restera dans cette chambre mais sans les soirées jeux et comédie du soir, car il n'aura pas le même gardien. Je ne sais pas comment il va réagir, il est imprévisible.


Me voilà dans le jardin, Rick m'a enfin laissé aller à mon poste. Je suis devant le match de basket. La dernière fois que je les observais, Styles jouait avec eux. Ça s'est fini en catastrophe mais ça nous avait permis de bien rigoler après. Rick était là aussi. Sur le coup, je lui en voulais de m'avoir distrait, mais finalement, je le remercie pour le délire que j'ai eu avec Styles grâce à lui. Bon, il faut vraiment que j'arrête de penser à lui... Il faut qu'il sorte de ma tête. Oublie-le, oublie-le, oublie-le. ...

Ce serait plus facile s'il ne m'avait pas suivi.

Il est debout à côté, j'arrive à ressentir sa présence, personne ne se met aussi proche de moi de cette façon. Proche, mais il a quand même mis une distance d'un mètre entre nous, histoire de dire je ne suis pas collé à lui. Mon estomac se serre, je ne sais pas si c'est un mélange de peur et de colère, sûrement de la déception aussi et voire même un peu de tristesse ajoutée comme assaisonnement dans ma salade de sentiments. Je ne peux pas le regarder, c'est encore trop tôt.

« Je suis désolé.

- Oh, tu t'excuses maintenant. »

Ce n'est plus mon estomac mais tout mon corps qui se serre. Rien qu'entendre sa voix ça me dégoûte... non ça ne me dégoûte pas, c'est trop violent... mais il faut que je le sois, il faut que je ressente ça, ça en est, je suis dégoûté. Dégoûté, dégoûté, dégoûté, Jason, il est dégoûtant.

« Je voulais pas.

- Bien sûr que si, tu le voulais. »

Tu ne devrais pas lui parler, Jason, tu ne devrais même pas l'écouter.

« Va t-en. »

Il ne bouge pas. Je finis par me retourner en essayant de ne pas craquer. Il me regarde les yeux humides, ses bras lâchés le long du corps, les mains qui triture son pantalon. Je ne vais pas craquer, je-ne-vais-pas-craquer.

L'ISOLÉWhere stories live. Discover now