Jour 17

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« Ji, eh oh ? »

Je me réveille en sursaut par mon père devant la porte de ma... sa chambre. J'ai dormi dans la chambre de Styles. Je regarde autour de moi, assis sur une chaise, appuyé en avant sur le dossier. Styles dort toujours.

« Il faut qu'on parle. »

Génial. Je repose la chaise à sa place et sort de la chambre sans faire de bruit pour le laisser dormir.


« Je peux savoir ce que c'est que ce délire ?

- Calme-toi, s'il te plaît ... »

Je suis encore dans les vapes, il commence à jouer le père lourd et protecteur dès tôt le matin, ça ne va pas le faire.

« J'étais seulement sur une chaise.

- Encore heureux que tu étais seulement sur une chaise ! Si je t'avais retrouvé autre part, je ...

- Tu aurais fait quoi ? »

Combien de fois il m'a menacé sans rien faire après.

« Tu as intérêt à avoir de bonnes excuses, mon garçon, crois-moi.

- Si tu savais ce qui s'est passé hier. »

Ses sourcils se lèvent  jusqu'à la racine de ses cheveux tellement ma réponse l'a surpris, ou choqué, terrifié, ce que vous voulez. Il essaye de dire quelque chose, mais rien ne sort.

« Détend-toi, on a juste discuté.

- Discuté. De quoi ?

- De lui.

- Lui ? Il a enfin parlé ? »

Je te l'avais dis qu'il fallait me le confier.

« Oui, il a parlé.

- Alors raconte-moi.

- Je ne pense pas qu'il soit d'accord. Il s'est confié à moi, pas l'asile entier.

- Fils. »

Il se pince l'arête du nez. Ce n'est jamais bon signe.

« Tu ne peux pas garder pour toi des informations qui seraient utiles à sa guérison, réfléchis. Si tu es le seul au courant, ça ne va que ralentir les choses.

- Mais il ne veut pas que les autres soient au courant.

- Sérieusement, Jason, à quoi tu joues ?

- Il ne l'a pas dit aux autres, il n'a même pas pu le dire à la psy, c'est qu'il y a une bonne raison. »

Je sais que je devrais le dire, mais je n'ai pas envie de décevoir Styles encore une fois. Pas juste après ce qu'il m'a dit.

« Dis-le moi.

- Non.

- Jason...

- C'est trop intime pour que tu le saches, désolé.

- Donc ça y est, vous en êtes arrivés à avoir des petites discussions intimes entre mecs ? Tous les deux, le soir, à faire vos soirées pyjama dans une chambre et vous raconter vos dernières crises de jalous...

- On a abusé de lui ! »

J'ai craqué. Il fallait bien que ça se sache un jour de toute façon.

« Son propre père lui a fait ce pourquoi il est ici. Jeune. »

Mike n'a même pas l'air surpris par la nouvelle, plus pour le fait que j'ai haussé le ton violemment.

« Je vois. »

Il croise les bras et me regarde comme s'il essayait de lire dans mes yeux. Je vois ? C'est tout. Il doit avoir l'habitude de ce genre de cas pour réagir aussi sereinement, ce n'est pas possible. Il reprend tranquillement.

« Tu n'as rien d'autre à me dire ?

- C'est déjà pas mal, non ?

- Tu n'aurais pas répondu ça si tu m'avais tout dis. »

Il m'énerve quand il fait ça, je suis coincé à chaque fois.

Je finis par lui raconter en bref la soirée d'hier, que j'aurais préféré garder pour moi, mais c'est impossible ici.

« Je n'aime pas savoir que tu dormes dans sa chambre.

- C'était la première fois. Il ne se serait jamais endormi sinon.

- Tout à fait logique. Oui, le fait que tu sois avec lui dans sa chambre était la seule solution pour l'endormir.

- Je n'allais pas le forcer à prendre ces cachets après ce qu'il venait de me raconter.

- Oui bien sûr, c'est évident. »

Il garde un ton ironique tout le long de la discussion. Je n'arrive pas à savoir s'il me prend au sérieux ou si je suis juste en train de me faire passer pour un gros débile. Je ne vois pas pourquoi, d'ailleurs.

« Jason, ça va un peu loin cette histoire.

- À quoi tu penses, là ?

- J'ai accepté que tu l'isoles car c'était pour toi la meilleure solution. Tu t'occupes de lui, très bien, tu as des responsabilités mais tout ça va trop loin. Je t'ai juste autorisé à faire ce qu'il te semblait être le mieux pour lui, pour sa guérison, pas pour que vous deveniez amis ou je ne sais quoi d'autre.

- On n'est pas amis.

- Oui, c'est clair. »

On se regarde dans le blanc des yeux. Cette discussion n'amène à rien. Je regarde ma montre, les autres collègues ne vont pas tarder à arriver.

« Va le chercher. »

Il me montre sa chambre d'un mouvement de tête. J'ai quand même de la chance qu'il soit un minimum compréhensif.


Je retourne dans la chambre, Styles est assis sur le bord du lit. Il n'a pas du tout l'air content de me voir.

« Hey ? Ça va ?

- Tu l'as dit. »

La porte. J'ai oublié de refermer la porte quand je suis sorti, et puisque nous avons parlé dans le couloir, il a tout entendu.

« Harry, je suis désolé, j'étais obligé.

- Tu dis tout le temps ça. Tout le temps tu es désolé. »

Je me rapproche et me mets accroupi devant son lit. « Harry, s'il te plaît. » Il lève le regard au dessus de ma tête. Mon père s'est appuyé contre le mur. Styles est encore moins ravi de le voir lui que quand c'était moi qui suis rentré. Je ne sais pas si c'est le fait que ce soit mon père ou si c'est juste parce qu'il est entré dans sa chambre. Pendant qu'il le foudroie du regard, Mike, lui, garde un air neutre. J'espère juste qu'il ne va rien dire sur ce que je lui ai raconté, pas devant Styles.

« Il ne va rien te faire, il est de notre côté. »

Je me tourne vers lui pour lui faire comprendre qu'il n'a pas trop le choix.

« Je veux pas de lui.

- Harry, il est aussi ici pour te protéger, tu n'as rien à craindre. »

Il est encore méfiant, comme avec moi au début. Mon père ne m'a jamais dit qu'il allait m'aider à le protéger car il ne supporte pas ce mot. Mais contrairement à lui et aux autres, je sais comment m'adresser à Styles.





L'ambiance est froide. Vue de l'extérieur, on pourrait croire que Styles et Mike se sont disputés la veille et qu'ils sont en train de se bouder l'un l'autre, c'est vraiment amusant. Chaque fois qu'ils se croisent, c'est regard noir et que je te relook de haut en bas. Je ne peux plus aller voir mon père sans que Styles grimace derrière moi, limite prêt à me tirer le pantalon pour me ramener vers lui. Ça me fait gentiment sourire, mais je suis bien le seul. Les deux ne semblent pas rassurés par la situation, mais chacun à leur manière. J'imagine, Styles qui n'aime pas l'idée que sa vie soit répandue dans l'asile et Mike le fait que Styles soit autant accroché à moi. Je me retrouve entre deux clans différents, sans savoir lequel je vais choisir.

L'ISOLÉOù les histoires vivent. Découvrez maintenant