CHAPITRE 21

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CHAPITRE 21

   Lorsque Julie Trolai fait son apparition au commissariat, dans la soirée, le commissaire Brégnan n'en croit pas ses yeux.

   — Yves, ça fait un sacré bout de temps.

   — Julie, tu sembles tellement... balbutie Brégnan.

   — Vieille ? le coupe-t-elle en rigolant.

   — J'allais dire différente. Mais effectivement tu as prit un petit coup de vieux, comme moi je suppose.

   — Et bien figure-toi que ce changement de région te réussit plutôt bien.

   — Cesse tes compliments, je vais rougir et nous avons pas mal de travail devant nous.

   — C'est vrai, je suis là pour une raison toute particulière.

   — Oui j'ai cru comprendre mais il va falloir que tu nous expliques tout depuis le début. Quand le lieutenant m'a apprit que tu venais ici je n'ai pas trop compris pourquoi.

   — Yves, tu imagines bien que je n'aurai pas fait le déplacement aussi rapidement si ce n'était pas réellement important.

   — Bien sûr Julie, mais je ne sais même pas d'où tu viens.

   — Assieds-toi, je vais tout t'expliquer en détail, mais avant ça j'aimerai que ce lieutenant que je n'ai pas encore eu la chance de rencontrer se joigne à nous.

   — Il va arriver, il est en train de rassembler tous ses documents.

   — Alors ? Il est aussi bon que moi à l'époque ?

   — Aussi déterminé ça c'est sûr. Mais il a ce petit côté rebelle que tu n'avais pas. Tu étais bien trop lèche-botte.

   Ils se mettent à rire de bon cœur et ne s'arrêtent que lorsque Raphaël fait son apparition dans le bureau.

   — Je vous interromps peut-être ?

   — Non pas du tout, lieutenant Casain je vous présente le commissaire Julie Trolai. J'étais justement en train de lui dire que dans cette affaire vous n'en avez fait qu'à votre tête mais grâce à ça vous avez mis la main sur des informations cruciales.

   — Enchanté, dit Raphaël.

   — De même, lance le commissaire Trolai avec un grand sourire.

   — Alors j'ai repéré la zone où Patrick pourrait...

   Le commissaire Brégnan l'interrompt aussitôt :
  
   — Raphaël, j'aimerai que nous prenions quelques minutes pour éclaircir toute cette affaire, si ça ne vous dérange pas.

   — Non bien sur allez-y, je vous en prie.

   Le commissaire Trolai prend la parole.

   — Bon, comme tu le sais après ton départ il y a bien longtemps, j'ai prit ta place à la tête du commissariat. Tout se passait à merveille jusqu'au moment où, il y a cinq ans presque jour pour jour aujourd'hui, la Belgique m'a demandé d'enquêter pour eux sur une affaire car ils n'avaient aucunes pistes. Un certain Damien Plockrit, jusqu'alors inconnu de leurs services avait étranglé la mère de ses deux filles puis les avait poignardées, sans raisons apparentes. Je l'ai traqué pendant des mois, je te jure Yves, tu me connais, j'ai fait tout ce que j'ai pu mais je n'ai jamais réussi à le coincer. Ça m'a rendu malade, je ne pouvais pas retourner au commissariat après cet échec. J'ai donc demandé à intégrer les services d'Interpol, dans l'espoir de retomber un jour sur lui. Et ce jour est arrivé, quand j'ai reçu la demande du lieutenant Casain et que j'ai vu qu'il travaillait sous tes ordres, je me suis dit que j'allais creuser un peu plus. J'ai ouvert le dossier de votre Patrick Domelin et je l'ai immédiatement reconnu.

   Personne n'ose ajouter quoi que ce soit après ce récit bouleversant.

   — Ce type est un monstre sans pitié, je ferais n'importe quoi pour le coincer, n'importe quoi Yves, ajoute-t-elle.

   — Je sais Julie, répond le commissaire Brégnan, visiblement très touché.

   — Je sais qu'ici c'est toi le boss alors je ferais absolument tout ce que tu décideras, tant que ça me mène à Plockrit.

   — Je peux peut-être vous exposer mon plan maintenant ? demande Raphaël.

   — On vous écoute lieutenant.

   — Alors, d'après la sœur de la victime, Patrick, enfin Damien Plockrit, est rentré chez lui après sa sortie de l'hôpital et a prit quelques affaires avec lui avant de repartir. Il n'est pas rentré depuis et elle pense qu'il est actuellement à la recherche de son frère qui, d'après nos déductions se cacherait quelque part dans la forêt de Calvière qui se trouve derrière leur maison. Je propose donc qu'on commence les recherches par là.

   — D'après ce que vous dites, cette jeune femme est la dernière à avoir vu Plockrit c'est ça ? demande Julie Trolai.

   — Elle et sa mère il me semble.

   — Bien, Yves, qu'est-ce que tu proposes ?

   — Et bien, c'est l'enquête du lieutenant Casain donc je suggère de suivre sa proposition.

   — D'accord, dans ce cas je vous laisse rassembler le plus d'hommes que vous pouvez avoir à disposition pour les briefer. Je vais étudier la zone avec vous lieutenant. Ainsi, les recherches pourront commencer aux premières lueurs demain matin, annonce la commissaire, prenant visiblement les choses bien en mains.

   — Oui commissaire, répond Raphaël, impressionné face à cette commissaire très entreprenante. Je me rendrais chez Mélodie et sa mère avant le début des recherches pour essayer d'obtenir des informations plus précises concernant la dernière fois qu'elles ont vu Plockrit.
Très bien, au travail, dit-elle en se levant.

   Le lieutenant se retrouve seul dans le bureau du commissaire, une sensation étrange dans le ventre. Après de longues heures de recherche sans repos, il a enfin réussi à réunir tout ce qu'il lui faut pour arrêter Patrick Domelin. Il a même réussi à remonter dans son passé pour y découvrir les horreurs qu'il a commis. Rien ne pourrait les empêcher de l'enfermer pour le restant de ses jours. Si ce n'est le fait que pour le moment ils n'ont absolument aucune idée d'où il peut bien se trouver.

   Cette sensation dans son ventre aurait pu être de la fierté. La fierté d'avoir retrouvé un criminel recherché par Interpol lors de sa première enquête, même si cette enquête n'était pas dirigée contre cet homme à la base. Mais non, cette sensation étrange c'est quelque chose qu'il n'a pas ressenti depuis très longtemps. Probablement depuis le jour où la personne qu'il aime le plus au monde lui a été arrachée brutalement.

    Cette sensation c'est celle d'avoir pu venir en aide à une personne. Mais pas n'importe quelle personne. Mélodie. Cette jeune femme déchirée par la disparition de son frère à qui il vient de redonner de l'espoir, l'espoir de voir son frère rentrer à la maison et rien ne rend Raphaël plus heureux à cet instant. Est-ce le fait de l'aider ou le fait que ce soit cette fille en particulier qui le rend si joyeux ? Pour l'instant il n'a pas la réponse à cette question mais si tout se passe bien et que Patrick est retrouvé, il aura peut-être l'occasion de le découvrir.

   Le lieutenant Casain n'a pas le temps de se poser cette question encore bien longtemps car ses hommes sont déjà tous sur le pied de guerre lorsqu'il quitte le bureau de son commissaire. Ils commencent à préparer les véhicules alors que le commissaire Trolai décide de commencer les recherches par la route passant à travers la forêt, afin d'essayer de trouver la voiture de Patrick.

   Ils sont prêts à partir bien avant le lever du soleil, ce qui laisse à Raphaël assez de temps pour passer voir Mélodie avant que la traque ne commence.

ILLUSIONWhere stories live. Discover now