Chapitre 21

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Marie Gaultier
22 novembre 2019
10h00

Me voici au chevet de Lara. La seule qui a toujours été la pour moi, quelque soit mon problème, quelque soit ses problèmes, elle est toujours restée à mes côtés. Mais moi, je n'ai pas été là. En réalité je n'ai jamais été là. C'est dans ces moments là qu'on réalise qui on est. Et moi je suis égoïste. J'aurais dû m'inquiéter. J'avais un mauvais pressentiment mais pourtant je n'ai rien fait. Tout est de ma faute.

Antoine: Marie, arrête de pleurer. Ce n'est pas ta faute.

Marie: Si. La seule personne à blâmer c'est moi. Je n'ai pas été la pour elle.

Antoine: Parce qu'elle en a choisi ainsi. Elle t'aurait contacté si elle avait voulu te voir ou te parler.

Marie: Mais je devais quand même la protéger. Elle l'a fait pendant des années, et voilà que maintenant je ne lui rends pas la pareille.

Antoine, jusque-là appuyé contre le chambranle de la porte de notre chambre d'amis, s'approche de moi et me prends dans ses bras.

Antoine: Arrête. Elle est saine et sauve maintenant. Elle restera là autant de temps qu'il en faudra. Tu vas t'occuper d'elle maintenant.

Marie: Mais le passé ne peut être oublié.

Antoine: Le passé ne s'oublie pas, on apprend juste à s'en accommoder, à le mettre dans une petite boîte au fin fond de notre cerveau. Boîte qui restera à jamais fermée.

Marie: C'est beaucoup plus facile à dire qu'à faire.

Antoine: C'est pour ça que tes proches sont là. Pour te faire aller de l'avant. Je l'ai été pour toi, maintenant tu dois l'être pour elle.

Marie: Et si elle ne veut pas de mon aide? Et si elle veut juste s'en aller?

Antoine: Elle est la seule maîtresse de ses choix. Tu devras la laisser, même s'il t'en coûte.

Je regarde ma montre qui indique 10h10. Antoine devrait y aller, son entraînement va bientôt commencer.

Marie: Merci pour ces sages paroles Griezmann, c'était très mature venant d'un enfant.

Antoine: Mais tu préfères l'enfant.

Marie: Bien sûr. Maintenant files, le ballon rond t'attends au tournant.

Il m'embrasse et me sourit tendrement avant de s'en aller. Ça me fait tellement de bien de le sentir près de moi en ce moment. Depuis hier, le temps s'est écoulé trop vite, a une allure que j'ai eu du mal à soutenir, mais j'ai fait face, même si tout mon corps est exténué. À l'hôpital, elle est restée dans un coma léger pendant près de 5 heures. Quand elle s'est réveillée, j'étais là, les yeux grands ouverts. A partir de ce moment là, les médecins ont fait des analyses, et ça a été un réel choc pour moi de découvrir qu'elle était contusionnée sur tout le corps, qu'elle avait des cicatrices, des bleus, des os fêlés, qu'elle était en hypoglycémie sévère et que par-dessus tout elle portait un enfant en elle. Le fruit d'un viol, très probablement. Incapables de parler, nous ne savons pas encore si le coupable est Mike, qui, malgré les appels de la police, est resté muet. Quand elle se réveillera, je ne la forcerai pas à parler, mais on doit arrêter chaque personne qui lui a fait du mal. Je m'en voudrais si un briseur d'âme courait en liberté quelque part alors que ma meilleure amie est en miettes.

Nous avons donc décidé ce matin très tôt, après que son état se soit stabilisé et qu'elle aille un peu mieux, de la transférer à la maison, à Barcelone, où Antoine avait préparé une chambre médicalisée. Elle sera mieux ici que nulle part ailleurs. Une infirmière est avec nous tout le temps, et un docteur doit passer une fois par jour à 11h30. Je me retrouve encore enfermée chez moi, mais je ne veux pas la quitter. Plus jamais. Ça me permettra aussi de penser à mon avenir professionnel.

Vers 10h40 je laisse l'infirmière vérifier ses doses et je descends jusqu'à la cuisine pour me préparer un maté. Ces 3 jours en Angleterre m'ont fait changer mon régime alimentaire, et je pense que c'est pour le mieux. Après mon sport du matin je mange salé, comme les Anglais eux-mêmes, le midi c'est repas léger et le soir repas normal sans féculents ni viande rouge. Ça fait 3 jours que j'ai commencé, on ne voit pas les résultats mais je me sens bien. Une fois mon maté prêt, je prends un livre dans ma bibliothèque et retourne auprès de Lara. Je m'installe dans mon fauteuil et commence ma lecture.

Lara: Mhh...

Attendez, je rêve où elle s'est réveillée? J'appelle immédiatement l'infirmière qui était entrain de se reposer dans notre autre chambre d'amis et lui demande de regarder si quelque chose va mal. Quant à moi, j'abandonne mon livre et me pose près du lit, d'où je prends la main de Lara dans la mienne pour lui donner toute ma force.

Lara: Marie...

Marie: Lara! Lara je suis près de toi. Tu es à Barcelone, chez Antoine. Tout est bien, tu vas mieux. Tu peux m'entendre.

Lara: Oui. Oui. Parles moi.

Me sentant obligée de lui parler, et avec l'autorisation de l'infirmière qui doit penser que ça peut l'aider, je commence à lui parler de choses et d'autres.

Marie: Bon... On s'est pas vues depuis un an, alors j'ai eu le temps de penser à tout ce qu'on a fait ensemble. Tu te rappelles quand on est sorties en boîte pour la première fois? Moi, j'étais une habitée de ces choses-là, mais toi tu n'avais jamais mis les pieds ne serait-ce que dans un bar! Tu étais minable quand on est sorties. Tu avais tellement profité que tu étais déjà complètement ko à 0h00 il me semble! Le videur nous avait fait sortir. Tu avais fait danser un homme dans la rue sur le retour.

La voyant sourire, je continue.

Marie: Il y a aussi la fois où on est parties à Venise. J'avais rencontré un bel italien, et tu nous avais surpris entrain de... enfin tu vois quoi... Et tu nous avais dit "oh les jeunes vous êtes protégés j'espère?". L'italien, Dominico, il me semble, t'avais traité de tous les noms en italien, c'était hyper drôle.

Elle rigole faiblement et serre plus fort ma main.

Marie: Je pense que mon plus gros fou rire c'est quand on était à Deauville pour le festival. J'y étais en tant que journaliste et tu m'avais accompagné. Ce jour-là, on mangeait un sandwich sur le bord de mer. Moi il était végétarien, et toi au thon. Je me rappelle comme si c'était hier que la mouette t'avais attaqué pour avoir ton sandwich! C'était hilarant! À la fin, tu avais capitulé et abandonné ton repas à la mouette. Je crois que je ne m'en remettrais jamais.

Lara: La mouette... la salope...

L'infirmière la regarde avec des gros yeux mais finis tout de même ses analyses et appelle ensuite le docteur.

Marie: Alors, comment tu te sens?

Lara: Bien. D'attaque pour une séance de kickboxing.

Toujours à dire des bêtises celle-là, on ne la changera jamais.

Marie: Plus sérieusement, Lara!

Lara: Mais vraiment, on va aller kickboxer le bâtard qui m'a fait ça.

Marie: Et? Qui est ce charmant jeune homme?

Lara: Tu le sais depuis bien longtemps. Toi aussi tu as vécu ça. Toi aussi tu sais ce que ça fait. Je suis encore très faible, mais promets-moi de le mettre six pieds sous-terre. Pour moi. Mike ne doit pas s'en sortir.

Amor w/Antoine GriezmannWhere stories live. Discover now