42 - Prête à tout

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En média : In motion - Colouring 

* * *

- Un billet pour Brooklyn s'il vous plait.

La blonde du guichet en face de moi me fixe d'un œil agacé, tout en mâchouillant vulgairement son chewing-gum rose bonbon, couleur en parfaite adéquation avec ses lèvres et sa tenue de clown. Je ne saurais dire ce qui est le plus agaçant chez elle : la manière dont ses cheveux décolorés se collent à son visage, ou le fait que le nom inscrit sur son badge soit digne d'une putain de télénovela. Sans déconner, comment peut on accepter d'appeler son enfant Pamela Lopez ?

— Le prochain part dans dix minutes, fait-elle d'une voix criarde auquel je m'étais bien attendue. 

Celle ci me dévisage une nouvelle fois d'un air critique, et je récupère le bout de papier de ses doigts, complètement soûlée. Bon sang, est-elle vraiment obligée de me juger comme si je sortais d'une autre planète ? Oui j'ai un look de merde, des cheveux en bordel et des yeux bouffis, mais est-ce qu'elle s'est regardée au moins ? Est-ce qu'elle se rend compte que sa tenue est dix fois plus ridicule que la mienne ? 

Ne fais pas de scandale Alex... Contente toi de monter dans ce fichu bus et de quitter cette foutue ville. 

Sans prendre la peine de répondre, je replace ma capuche sur ma tête et me détourne pour partir m'asseoir à l'extérieur de la gare routière. La vielle dame en face de moi ne cache pas son mécontentement lorsque je plonge ma main dans le paquet de cigarette abandonné par Ian un peu plus tôt dans la chambre d'hôtel. Mais je m'en fiche, car cette maudite fumée qui m'explose les poumons est la seule chose qui m'empêche de complètement partir en vrille.

La journée a été longue. J'ai dû passer cinq bonnes heures à pleurer toutes les larmes de mon corps devant le regard compatissant du gérant du motel. Pathétique. Et puis, faible et totalement vidée, celui-ci a pris l'initiative de m'appeler un taxi pour m'amener jusqu'ici. Il n'a cessé de m'assurer que son geste n'était que pure gentillesse, qu'il aimait simplement prendre soin de ses clients, mais je ne suis pas dupe. Il a dû sentir les emmerdes à plein nez, et il n'aurait pas eu tord. Vu mon état de pls, il n'aurait pas été étonnant que je me mette à squatter cette chambre durant des jours et des jours, alors que je n'en ai même pas les moyens. Ça aussi il a dû le sentir : de nous deux c'était Ian qui tenait le porte monnaie. Il n'y avait qu'à voir sa voiture...

J'expulse une énième bouffée de cigarette en faisant mon possible pour effacer son visage de ma tête.

Venir ici était une connerie, coucher avec Ian était une connerie, faire cette mission était une connerie, traîner avec Carter était une connerie. Ma vie est enfaîte un amas entier de connerie. Presque deux mois que Dean m'ait dicté cette nouvelle infiltration et me voilà de retour à la case départ, avec en bonus, tout un tas d'emmerdes autour de moi. 

Au moins je suis vivante, alors j'imagine que ça pourrait être pire. Quoi que ? 

Du coins de l'œil, j'aperçois l'autocar portant l'écriteau Brooklyn s'approcher. J'écrase ma cigarette par terre et me rapproche de celui ci, ne pouvant m'empêcher de froncer des sourcils à la vue de la ribambelle de gamins présents dans la file d'attente. 

Putain, je ne le sens pas

Et j'étais très perspicace, car ce voyage de quelques heures a été un véritable enfer. Mon programme était pourtant clair : dormir, ou écouter de la musique métal en parfaite adéquation avec mon humeur déprimée et sarcastique. Au lieu de ça, j'ai passé les trois quart de mon temps à me retenir de ne pas étriper le gamin assit à coté de moi, qui passait son temps à chialer ou à jouer avec sa petite voiture miniature sur ma cuisse. Insupportable. 

PRISONERS | TerminéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant