The Grenade

Jour 29

Il est quatre heures du matin quand nous prenons la route en direction du terrain d'aviation où l'Eldorado a atterri. L'Eldorado, c'est le jet privé que mon père a acheté au tout début de sa carrière. Avant qu'il ne devienne le riche et célèbre propriétaire de Bright Corporation, il devait faire plusieurs déplacements par mois et ça lui revenait officiellement plus cher de payer ses billets d'avion que d'investir dans un jet privé. Je dis officiellement parce que c'était la seule raison qu'il avait trouvé pour se payer ce que « tout bon riche » se devait d'avoir. En plus, il a décidé de se payer un équipage entier. Chaque mois les dix membres de l'équipage sont payés une petite fortune pour rester à disposition de mon père - et maintenant de moi - même si le jet ne décolle pas plus de deux fois par an, depuis quelques temps.
Nous arrivons donc une heure plus tard au terrain d'aviation et une surprise nous y attend. Alors que Jonathan monte dans le jet en précisant à plusieurs reprises qu'il est surexcité à l'idée de monter dans un jet privé, je suis retenu par quelqu'un qui crie mon nom. En me retournant, je vois Dylan accourir vers moi, son écharpe retenant toujours son bras. Je m'éloigne de quelques pas du jet pour que Jonathan en entende le moins possible et l'attend. Quand il y arrive à ma hauteur, il n'est même pas essoufflé. Mais comment est-ce possible ?! Moi, j'aurais été morte après avoir parcouru la moitié de ce qu'il a fait !

"Tu vas où ?! S'exclame-t-il avec une pointe d'inquiétude.
- En voyage ... déclare-je préférant garder la destination pour moi. Qu'est-ce qui se passe ?
- Je suis allé chez toi et ton majordome m'a dit que tu étais partie ! J'ai eu la peur de ma vie !"

Quelque chose dans son comportement m'intrigue mais je fais comme si je n'avais rien vu.

"À ce point ? Réplique-je surprise. Qu'est-ce qui t'arrive d'un coup ?
- Je ne vais pas cessé de t'aimer parce que tu me le demandes ! Rétorque-t-il.
- Dylan, ouvre les yeux ! On n'est pas fait pour être ensemble ! Moi, ça fait bien longtemps que je l'ai compris !
- Mais ça ne veut pas dire qu'on ne doit pas être ensemble !
- Dylan ... Je ... Je suis pressée, je ne veux pas faire attendre mon équipage. Je te demande juste une chose ! Oublie-moi ! Plus vite ce sera le cas, plus vite tu pourras retrouver quelqu'un qui te mérite ... et que tu mérites !
- Je ne suis pas d'accord !
- Je ne te demande pas d'être d'accord, je sais que ce serait impossible. Il faut simplement que tu rencontres quelqu'un d'autre et que tu vives ta vie ! Parce que la mienne ne sera peut-être pas suffisamment ... explique-je avant de me reprendre in extremis. Bien pour toi ... Je ne t'oublierais pas, Dylan ! Je ne peux pas. Mais il faut qu'on passe à autre chose ... pour notre bien !"

Je m'approche de lui et l'embrasse sur la joue avant de m'éloigner. J'essaye de maintenir mes mains au plus près de mon corps pour qu'il ne puisse pas m'attirer vers lui mais il y arrive tout de même. Il me tire vers lui et m'embrasse. Cette fois, j'ai la force de me retirer et je m'enfuis rapidement vers le jet. Arrivée dans l'encadrement de la porte, je me retourne et le regarde s'éloigner souriant. Pourquoi me fait-il autant souffrir ?!
Le trajet risque d'être long, je vais essayer de dormir et de ne pas penser à ce baiser, à sa main chaude ou à son parfum envoûtant. Non, Maya ! Dors ! Et ne penses plus.

***

Dylan
Dylan
Dylan
Dylan
"Maya, tu te réveilles ! S'exclame Jonathan en me secouant.
- Oui ! Oui, oui oui, on est où ? Dis-je à peine réveillée.
- Toujours dans l'avion ! Enfin, pour ma part parce que toi, on aurait dit que tu es encore à Forest Hill avec Dylan !
- Quoi ?
- Tu parles dans ton sommeil !
- Sérieux ? Et tu as écouté ?!
- C'était compliqué de ne pas t'entendre, à vrai dire ...
- Ah ... désolée ...
- C'était lui tout à l'heure ?
- Pourquoi tu me poses cette question ? On connaît tous les deux la réponse !
- Okay ... alors qu'est-ce qui s'est passé tout à l'heure pour ...
- Pour qu'il m'embrasse ! Dis-le ! Je n'en sais rien ! J'ai été claire pourtant mais comme à chaque fois ... il a ignoré ce que je disais ! J'ai tout fait pour essayer d'éviter ça mais ...
- Ce qui devait arriver arriva !
- Ouais, on peut dire ça ! On dirait qu'il a toujours besoin de tout savoir !
- « Le premier degré de l'orgueil c'est la curiosité. »
- Tu te mets à faire de belles phrases, toi maintenant ?
- Ce n'est pas de moi ! Bernard De Clairvaux, tu ne connais pas ?
- Non, ça ne me dit rien ! Qu'est-ce qu'il a fait de beau ?
- C'était un moine du douzième siècle !
- Okay ! Et bah il n'avait peut-être pas tort, Monsieur De Clairvaux ! (Un instant après) Je ne le voyais pas comme ça ...
- Peut-être qu'il a du mal à accepter que tu ne veux pas être avec lui ! C'est compréhensible ! Tu es sortie avec son frère et tu passes la plus part de ton temps avec Nick et moi ... et lui, tu le délaisses !
- Je n'ai jamais été très proche de Dylan. C'était pourtant une des choses que je voulais le plus à l'époque ! Puis est arrivé Brad ...
- Brad avec ses beaux yeux sombres, ses cheveux toujours aussi bien coiffés et son fessier ... Mon dieu, son fessier !
- Moques toi !
- Non ! Tu choisis bien tes copains physiquement, je ne vais pas te dire le contraire mais peut-être qu'il pêche un peu par leur manque d'intelligence ...
- Ou peut-être que j'en demande de trop ...
- Nick n'était pas prêt pour une fille comme toi ! Et même si je ne connais pas autant Brad que Nick, ça devait être la même chose pour lui aussi !
- Pourquoi est-ce qu'ils n'auraient pas été prêts pour moi ? Je suis tellement horrible que je fais peur aux hommes ?!
- Non !!! Tu es super mature, Maya ! Il y a cinq ans, on t'aurait donnée l'âge que tu as maintenant ! Ce n'est pas un défaut ! Bien au contraire mais ça peut faire peur aux gens ... En plus, à cette période, Brad avait encore beaucoup de doute concernant sa véritable nature.
- Je pense que maintenant, on est fixé !
- C'est sûr que c'est clair pour tout le monde depuis qu'il est officiellement en couple avec Victoire ! Le détective privé réservé sur sa vie privée est devenu une des attractions locales ! Le doute s'est dissipé aussi rapidement que les doutes à mon sujet !
- Depuis ton mariage, c'est sûr que tout est clair !
- Ouais, c'est ça ! Bref ! En tout cas, j'ai hâte d'être arrivé ! Je ne suis encore jamais allé à la Grenade !
- Tu n'es encore jamais sorti du pays, Jonathan !
- Pas faux !"