pluto | 12

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Jеииiе

Printemps seize

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Printemps seize.

Et ça gueulait encore, en bas. À croire qu'ils ne savaient faire que ça: s'aboyer dessus comme des chiens en manque d'os. Ça en devenait insupportable, Monsieur se plaignait de la politique du pays, Madame, n'ayant pas les mêmes opinions, défendait le système en place. Madame se plaignait de ne pas avoir eu la nouvelle collection d'escarpins Louboutin, Monsieur, désespéré par son comportement, lui criait dessus avec des trucs du genre: « Putain, mais vas te trouver un job ! », et ça repartait de plus belle, ça fracassait des assiettes en porcelaine française achetées une blinde à une vente aux enchères à Paris, ça hurlait même plus fort que cette meuf qui récitait son opéra à la télé, sur l'écran géant du salon.

Et j'étais là, allongée dans mon immense lit aux draps blancs, entourée de rien sauf du vide, contemplant sans bouger la solitude avec pour fond sonore la chapitre quarante-deux d'une dispute familiale. Je ne comprenais pas. Pourquoi l'argent ne réglait pas tout ? Pourquoi avoir plus de fric que la normale de ce pays ne les détendait pas, ne les rendait pas heureux de vivre ensemble ? Pourquoi, nom de Dieu, ne pouvaient-ils pas fermer un peu leurs grandes gueules pour se contenter d'admirer les objets de valeur tout autour d'eux ? J'étais persuadée que moi, ça me suffirait. Que, pour le temps que j'avais à vivre, être entourée de luxe me suffirait, me rendrait heureuse pour le restant de ma vie.

Les adultes étaient incompréhensibles. Ils me vrillaient les oreilles et mon regard restait planté sur le tableau en face de moi, d'un artiste japonais inconnu qui peignait des scènes de nature plutôt banale. Cependant, même si ce type n'avait aucun succès, maman avait décidait qu'il allait devenir célèbre et par conséquent, elle s'était jetée sur plusieurs de ses œuvres.

Il était merdique, son tableau. Les nénuphars ne ressemblaient même pas à des nénuphars et les couleurs étaient mélangées salement. C'était comme si ce putain de tableau voulait m'aspirer avec lui, dans son univers aux couleurs dégueulasses et ternes. Ou peut-être que je le percevais de cette manière seulement parce que tout autour de moi était déjà dégueulasse et terne.

Mon téléphone vibra.

« Vous avez quarante-trois nouvelles notifications Instagram. »

Je cliquais directement sur l'application pour découvrir que mes abonnés étaient montés, j'en souris, j'étais fière. Deux cent mille.
Encore, encore, encore...

Un bruit sourd attira tout de suite mon attention et j'en sursautai, mon regard se braquant immédiatement sur la porte close de ma chambre. Un silence lourd prit possession de l'immense villa, même cette conasse qui chantait à la télé semblait s'être arrêtée. Et puis, dans le calme étrange, ma mère hurla. Il n'en fallut pas plus pour que je comprenne, alors je sautai de mon lit et dévalai les escaliers en marbre blanc.

Parce que j'aimais mes parents. Sincèrement et inévitablement, je les aimais peut-être plus que ma propre vie. Je perdis mon souffle arrivée au rez-de-chaussée, pourtant, je ne ralentis pas pour autant, et détalai jusqu'au salon où je trouvai ma mère agenouillée devant le corps convulsant de mon père. Elle était dans un état second, impossible à contrôlée. Les larmes roulaient salement sur ses joues creuses, ruinant son maquillage digne des plus grands professionnels, elle criait, hurlait à la mort, frappant et secouant mon père dans tous les sens pour qu'il lui réponde.

- Maman, arrête ! hurlai-je à mon tour en me jetant sur elle pour qu'elle laisse papa tranquille.

Il n'était pas en état de lui répondre, mais ça, elle ne pouvait pas le comprendre. Je la tirai cependant violemment par les épaules et elle lâcha sa prise pour tomber sur les fesses un mètre plus loin. Son regard désemparé se posa sur moi, elle avait la bouche grande ouverte.

- Appelle les secours ! ordonnai-je en m'agenouillant près de papa.

La position latérale de sécurité. Putain, est-ce que ça comptait dans son cas ? Je ne pensais pas, j'étais paumée, je n'en savais rien, j'avais même oublié mon propre prénom tellement j'étais dépassée.

Et pourtant, ce n'était pas la première fois.

Ma mère me poussa sans que je n'ai le temps de réagir et prit ma place. Je compris qu'elle n'avait rien fait pour appeler les secours, je n'étais même pas certaine qu'elle avait compris ce que je lui avais dit.

Je pris moi-même son téléphone dernier cri et composai le numéro des urgences. Elles arrivèrent en un temps record, mais après tout, il s'agissait de Monsieur Kim Junkym, ce n'était pas le premier inconnu. Ils amenèrent mon père à l'hôpital le plus proche avec ma mère, complètement hystérique.

Était-elle dans cet état car elle l'aimait ?
Ou était-ce pour l'argent qu'il possédait ?
Je restais sans réponse.

••

Hiver Vingt-et-Un.
(retour au présent)

- Qu'est-ce t'as pensé de Taehyung ?

Je me paralysai. Yoongi fumait tranquillement, accoudé à la rambarde de la terrasse donnant sur notre chambre. Il était torse-nu et portait simplement un jogging noir après que nos corps ne se soient rencontrés, et les muscles fins de son dos se contractaient à chaque fois qu'il portait la clope à ses lèvres sèches. La lune éclairait le spectacle et j'essayai de me concentrer sur lui plutôt que sur les pensées qui voulaient forcer l'accès à mon cerveau. Toutes convergeaient sur Taehyung.

- Et bien, il a l'air d'être un gentil garçon.

- Tu l'trouves beau ?

Je restai sans voix quelques secondes. Pourquoi me posait-il des questions comme ça ? Il se retourna et s'appuya contre la rambarde, me scannant de la tête aux pieds alors que j'étais toujours allongée dans le grand lit aux draps défaits.

- Je te préfère toi, fis-je.

Il esquissa un rictus qui devint flou à cause de la fumée de sa cigarette qui s'évaporait dans l'air. Il jeta le mégot par terre et le laissa se consumer complètement pendant qu'il rentrait dans la chambre à peine éclairée par la lune. Il avança à quatre pattes sur le lit pour me surplomber et je me perdis dans son regard infiniment noir.

- Tant mieux alors...

Il déposa ses lèvres dans le creux de mon cou alors qu'il s'approchait un peu plus de moi.

- ... Parce que je n'aurais pas supporter que ma copine trouve un autre gars à son goût, tu vois, chérie ?

Un frisson glacé me parcourut le dos.




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𝟭𝟯𝟰𝟯𝟰𝟬; 𝙥𝙡𝙪𝙩𝙤Où les histoires vivent. Découvrez maintenant