XXXIV.

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Quand il ouvrit ses yeux, Muglerina eut le réflexe de porter ses mains à ses jambes. Il ne portait plus la moindre trace ni douleur. Il avait pu profiter d'une longue période de sommeil pour récupérer entièrement de ses blessures. Sans l'expertise du guérisseur, ce miracle n’aurait pas eu lieu. Néanmoins, cela ne le dispensait pas d'y aller doucement.

Pour être certain que je ne rêvais pas, je portais une main à son visage qu’il repoussa instinctivement.

—Mug-

Figé, je regardais son corps trembler. Son regard était dilaté et ses yeux grands ouverts. Je compris qu'il avait peur.

Puis, il se mit à pleurer en se recroquevillant, me demandant de partir. Il devint fou et se leva brusquement pour prendre mon épée en main. Je ne la portais pas dans nos appartements, elle restait toujours accrochée contre les murs de la pièce. Je tentais de dissuader l’oméga de ne pas commettre d'erreurs. Mais il continua de crier et de pleurer, en pointant la lame de mon côté.

Je savais que trop bien à quel point je l’avais détruit. J’avais été trop loin. Pour un simple baiser, je… je…

Je n’avais pas d'excuses.

—Tu as raison, je mérite de mourir pour ce que je t'ai fait.

Muglerina ne me faisait aucunement peur, je le trouvais encore plus magnifique que d'habitude. Je tombais volontairement sur les genoux, en repoussant mes cheveux en arrière pour lui présenter mon corps. Il pouvait faire ce qu'il voulait. Même me découper en morceaux si cela pouvait alléger sa peine. Je gardais simplement les bras tendus de chaque côté pour l’inviter à agir. Mais sa poigne tremblait, il n'avait jamais tenu d'arme de sa vie. Je fermais donc les yeux pour plonger dans un état second, concentré uniquement sur la présence de mon compagnon. Je pouvais décrire les battements de son cœur effrénés, ils étaient irréguliers à cause de ce sentiment de frayeur.

—Tue moi, Muglerina. Tue moi ! Lui ordonnais-je. Allez !

Je devais le pousser dans ses derniers retranchements. Le faire perdre pied pour qu'il se rende ce que je lui avais fait subir. Je continuais de l'attendre en ne bougeant pas. Je maintenais ma position sans ouvrir un œil.

—Tue moi !

Au lieu de cela, j'entendis son corps s’écrouler sur le sol et rapidement, je me redressais en réalisant toute l’étendue de son imbécillité !

Muglerina avait profité de ma cécité pour passer la lame de l’épée derrière son cou pour tenter d’effacer la morsure que je lui avais faite. Le jeune homme s’était mutilé plus qu’autre chose et se tenait d’une main, en de vidant de son sang, à terre.

—Muglerina !

J’accourus vers le garçon en cherchant une solution. Le temps de faire venir un guérisseur, il perdait une quantité importante de sang, alors je devais faire vite. Muglerina pleura silencieusement, sans crier. Il s’était affligé cette blessure dans l’espoir de briser notre lien. Mais cette marque était présente à tout jamais sur sa peau. Même la magie la plus puissante ne pouvait y venir à bout. S’il testait mes limites, il ne s'y prenait pas correctement.

Jamais je ne l'abandonnerai. C'est un serment que je lui faisais.

Je n’aimais pas l’idée de lui faire boire mon sang puisque l’intérieur de son corps était pur, mais je n'avais d’autres alternatives à lui proposer. Je mordis fortement mon poignet pour faire couler mon propre sang et en prendre dans ma bouche. Ce que je m'apprêtais à lui faire serait plus douloureux que les coups qu'il avait reçu. Mais il avait tenté de mettre fin à ses jours. Il savait à quel point les conséquences de son geste seraient irréversibles si je ne faisais rien.

Mais une fois mon sang en bouche, je fis en sorte de tourner la tête de Muglerina vers la mienne, avant de lui offrir mes lèvres. Plus précisément, mon sang. Il avala le liquide sous la contrainte et les premiers effets ne se firent pas attendre.

Muglerina ouvrit les yeux en grand et ces derniers devinrent rouges sous la pression trop grande qui traversa son corps. Si mon sang avait le don de guérir mon âme sœur, cela signifiait affliger une souffrance profonde à son être. Il la ressentait dans chaque parcelle de sa peau. Mais je maintenais son corps pour qu'il ne puisse pas se débattre. Je le contraignis à me boire même s'il  gigotait dans tous les sens pour tenter de chasser cette sensation qui menaçait de le tuer. Ces méthodes ne devaient être utilisées que très rarement. Un oméga dépendant au sang était un grand buveur. Mais son corps était trop faible, j'étais prêt à me vider pour le maintenir en vie.

Après avoir utilisé mon sang, je pris le garçon dans mes bras pour le porter jusqu’au lit.

—Pourquoi… m’avoir sauvé ?

Il me demandait cela en pleurant silencieusement, sanglotant par moment. Son nez coula ce qui lui donnait un côté enfantin et fragile.

—Parce que je t'aime, c'est évident.

Il fondit cette fois-ci, craquant face à mes paroles auxquelles il voulait tellement croire.

Mais ce n’était qu’une parfaite illusion à ses yeux.

—J-Je vous…aime tellement, dit-il en tenant la manche de ma tunique.

Après tout ce que je venais de lui faire, il trouva encore la force de me sourire et de se déclarer.

Je ne savais rien de ce qu'on appellait le destin. Mais en cet instant, j'étais celui que Muglerina désirait.

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*Chapitre écrit en juillet 2018, corrigé en janvier 2020

L'ALPHA ROYAL ET L'OMÉGA INNOCENT Vol.1Where stories live. Discover now