Chapitre 02

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J'émerge lentement de l'inconscience, ne comprenant pas tout de suite ce qui se passe autour de moi et aveuglée par la vive lumière du jour qui pénètre à travers la fenêtre.

Où suis-je ?

Je ressens une douleur au niveau de mon entre-jambes et c'est à ce moment là que tout me revient...

Ce n'était donc pas un cauchemar !

Je me redresse en panique, parcourant la pièce du regard, jusqu'à ce que mes yeux se posent sur la silhouette assoupie sur le sofa.

- maman...

A l'entente de ma voix, elle se redresse aussitôt avant de se précipiter vers moi, les traits de son visage sont voilés d'une profonde tristesse et ses yeux sont rouges et gonflés.

- mon bébé, enfin je te retrouve.

J'eclate en sanglot, prenant réellement conscience qu'il ne s'agissait pas d'un mauvais rêve.

Mon corps est secoué par des spasmes incontrôlables et mon coeur transpercé par une peine immense, que je ne parviens à décrire.

Comme si ça ne suffisait pas, des flashs incessants envahissent mon esprit — j'ai envie de mourir, je me sens brisée et vide.

- il a abusé de moi maman. ai-je difficilement articulé en reniflant, peinant à retenir mes larmes

Elle me serre désespérément dans ses bras, ne sachant probablement quoi faire pour me consoler.

- Laila, je sais que c'est difficile ma chérie mais je t'en pris calme toi. On va surmonter ça ensemble. Me dit ma mère d'une voix presque suppliante, avant de se tourner vers la porte qui vient de s'ouvrir.

Je ne veux voir personne d'autre !

- excusez-moi, j'ignorais que vous étiez là. Le médecin m'a dit que je pouvais entrer. S'écrit Alvaro en me fixant du regard.

- ce n'est pas grave Alvaro, tu peux rester. Je vais profiter de ta présence pour aller faire signe au médecin.

Non !

Il se rapproche lentement du lit tandis que ma mère se dirige hors de la salle. Je voulais lui crier de ne pas me laisser avec lui, mais les mots étaient noués dans ma gorge.

Tremblante et totalement effrayée, je ne parviens pas à le fixer — je me sens tout d'un coup sale.

J'essuie mes joues humides, essayant désespérément de recouvrer une respiration stable.

- Laila... Entame Alvaro en passant son indexe sous mon menton, mais je le retire immédiatement. Je te demande pardon, si j'étais arrivé plus tôt tu n'en serais pas là aujourd'hui.

Alvaro tente ensuite de m'attirer contre lui mais je le repousse violemment, ayant l'impression de revivre l'horrible scène de la veille.

- je te promet qu'on va retrouver celui qui t'a fais ça. Poursuit-il entre ses dents, une lueur indéchiffrable dans les yeux.

- tu n'étais pas là... fut tout ce que je parvins à murmurer.

Tout est embrouillé dans ma tête, cette journée y tourne en boucle et je me ressasse les choses que j'aurai dû faire ou ne pas faire pour éviter cette agression. Je me surprends même à en vouloir à Alvaro — à vrai dire, je regrette de m'être réveillée, il aurait dû m'achever après m'avoir tué de l'intérieur...

Plus tard dans la soirée, je réfléchis aux différentes questions que m'ont posé les enquêteurs. Au prix d'un grand effort, j'ai pu leur raconter ce qui s'était passé dans les moindres détails, tout en précisant que cet homme ne m'avait ni frappé, ni parlé — aucun mot ne s'était échappé de sa bouche, rien... Que des soupirs.

Je veux oublier... si seulement je pouvais remonter le temps pour faire en sorte que cela n'arrive pas.

Des larmes roulent à nouveau sur mes joues,
qu'ai-je fais pour mériter ça ? Personne ne le mérite de toute façon, pas même mes pires ennemis.

Le bruit de la porte m'extirpe subitement de mes sombres pensées;

- ma petite fille ! S'exclame mon père en approchant avec hésitation, comme s'il appréhende ma réaction.

Tendrement, il vient caresser mes cheveux et c'est avec beaucoup de difficulté que je parviens à garder mon sang-froid.

Je sais qu'il ne me fera jamais du mal mais l'envie de me protéger est presque machinale.

- qui t'a fait ça chérie ?

- si seulement je savais papa... j'ai peur qu'ils reviennent s'en prendre à moi.

- ça n'arrivera pas, je te le promet.

Je peux lire plusieurs émotions sur son visage d'ordinaire rayonnant, notamment de la colère, de l'inquiétude et du chagrin.

- quand est-ce que je pourrais sortir d'ici ?

- le médecin veut te garder en observation et si tout se passe bien d'ici après demain, tu pourras rentrer à la maison. Au fait, Aurora est en chemin, elle insiste pour passer la nuit avec toi.

Mon père me prend ensuite dans ses bras jusqu'à ce que je m'endorme, bercée comme quand j'étais enfant...

J'ai dû passer deux jours interminables dans cet hôpital. Mon corps s'en est remit mais je ne peux en dire autant de mon mental.

J'ignore quoi faire pour rassurer ma mère qui peine à dissimuler son trouble - elle se montre  forte pour ne pas m'inquiéter mais se yeux gonflés la trahisse.

J'aurai aimé lui dire que tout va bien, de ne pas se faire du souci - mais ce serait un mensonge.

Lorsqu'on entre dans le cottage familial, c'est un silence de mort qui nous accueille.

Je me dirige aussitôt vers le bureau de mon père, que j'ouvre doucement.

- chérie ! Dit-il après avoir lamentablement caché quelque chose dans son dos.

- désolée papa, je voulais juste vérifier que tu étais bien là. Est-ce que ça va ?

- oui, pourquoi ? Répond-il au tac

- tu mens très mal papa, qu'est-ce que tu caches ? Ça me concerne, c'est ça ?

Je tente d'arracher ce qu'il détient dans ses mains, mais il ne me laisse pas faire.

- les journaux ? Qu'est-ce qu'ils racontent ? Dit moi s'il plaît.

- je n'ai pas envie que tu replonge dans ces souvenirs en lisant ça mais les cacher ne servirait à rien puisque tu peux t'en procurer n'importe où. Se résigne-t-il en me tendant la paperasse

Ce que j'y lis me laisse bouche-bée, l'agression fait la une des journaux. Il y a même une image de moi, elle est assez nette, on aperçois ma silhouette allongée sur le sol au beau milieu des arbres, recouverte d'un drap blanc.

On aurait dit un cadavre !

- c'est vraiment dans cette forêt que vous m'avez trouvé ?

- oui Laila, c'est vrai...

- c'est confirmé... je ne mettrai plus les pieds dehors !

- c'est justement pour éviter ce genre de réaction qu'Alvaro et moi ne voulions pas que tu vois ça.

- quoi ? parce qu'il l'a lu lui aussi ?

Mais qu'est - ce que je raconte ! bien-sûr qu'il l'a lu, comme le reste des habitants de la ville d'ailleurs.

Je porte une main à ma bouche en proie à la panique - essayant vainement de réprimer les larmes qui menacent de couler.

- calme toi ma chérie, on retrouvera tes agresseurs et ils vont le payer. Pour l'instant je veux juste que tu ailles mieux, tu aurais pu mourir Laila, mais tu es en vie et c'est le plus important. Renchérît mon père en prenant mon visage en coupe pour essuyer mes larmes.

A quoi me sert ma vie si elle est gâchée ?

Si seulement j'avais pu voir leurs visages.

Avec le peu d'indices à notre disposition, je doute qu'on ne les retrouve rapidement - voire même un jour.

L'envers de l'inconnuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant