Merci Pia

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—  Le propriétaire du taxi, la dame qui habite dans le terrain d'à côté et qui d'autre ?

—  Son fils ou son mari, je ne sais pas très bien.

Pia est allongée sur le flanc, dans ce qu'il reste de notre lit. Sa main droite supporte son visage et elle m'observe. Je suis assise, le dos contre le mur.

—  Alors, si rien ne s'est produit après que ces trois personnes m'ont souhaité un bon anniversaire, on peut en conclure que tu avais raison. La malédiction s'est bien arrêtée après les bons vœux de ton prince charmant, m'énonce-t-elle en baillant.

Je souris en repensant au prince charmant en question. Le prince plus que charmant. Le prince de mes prochains jours. Enfin, je l'espère.

—  Je pense vendre les droits de cette histoire à une chaîne de télévision. Si on rajoute un peu de neige, on transforme la vendeuse en bonhomme barbu et vêtu de rouge, ça nous fera un bon petit téléfilm pour Noël. Qu'en penses-tu ?

—  Moui, si tu veux, lui fais-je évasive. 

—  Et là, ton sourire niais signifie que tu te fous royalement de ce sort tordu ou de mon idée de génie. Tu penses à ton Corentin, pas vrai ?

Je redescends sur terre – ou plutôt du cheval de mon prince – et tire sur la couverture.

Nous avons retrouvé le confort spartiate de notre bungalow, mais je n'en ai cure. Et même si le matelas jonche le sol, cela n'a pas d'importance.

Pia a rompu le sort. Plus aucun événement hasardeux ne viendra troubler cette soirée. Cela me suffit.

—  Autant que tu penses à ton Pacôme !

Elle se couche sur le dos et fixe le plafond.

—  Je ne peux pas sortir avec Pacôme.

—  Quoi ? dis-je en lui pinçant l'épaule. Tu ne vas pas me faire croire ça.

Tandis qu'elle se masse l'endroit où je l'ai pincée, elle s'assied et me fait face.

—  Maribel et Maxime. Pacôme et Pia. Non, mais, est-ce que tu as déjà vu quelque chose de plus nunuche ?

—  Je ne comprends pas.

—  Nos prénoms commencent par la même lettre, comme ceux de Maribel et son fiancé. A tous les coups, elle va dire que je l'ai encore copié juste pour avoir des nappes brodées à nos initiales !

Elle reste sérieuse un instant puis éclate de rire. Je l'imite.

—  J'ai cru que tu allais me dire que tu ne pouvais pas fréquenter Pacôme parce que, du coup, si vous vous mariés, tu deviendrais la belle-sœur de Maribel.

Pia arrête de rire et me balance son oreiller en plein visage.

—  Tu es horrible ! Comment as-tu pu me dire une chose pareille ?

Je me tiens le ventre et mon hilarité la rend encore plus boudeuse. Je n'en peux plus. Je m'étouffe tellement je ris.

—  Bien fait !

—  Oh, ça va, dis-je en toussotant.

Pour calmer ma toux, je me lève et vais dans la cuisine me servir un verre d'eau. Derrière moi, j'entends Pia qui continue de bougonner.

Une fois l'eau avalée, je respire enfin. Mes yeux sont emplis de larmes et j'attrape mon sac pour prendre un paquet de mouchoirs qui se trouve à l'intérieur.

—  Mo, je te déteste, me crie Pia.

Son intervention est si subite que je sursaute et lâche mon sac à main. Le bruit de verre qui se brise me surprend. Même Pia se lève, inquiète.

—  Ca va, Mo ? Tu as cassé un verre ?

—  Euh non. Mon sac est tombé par terre, ça doit être quelque chose à l'intérieur, mais je me demande bien quoi... dis-je en me baissant.

La flaque d'eau à côté qui s'écoule jusqu'à mes pieds m'étonne. Pia laisse échapper un petit cri et quand elle plaque les mains sur sa bouche, les poils de mes avant-bras se hérissent.

J'ai peur de comprendre.

J'ouvre mon sac et y découvre un papier coloré détrempé. Je tente de l'attraper, mais Pia m'empêcher en s'emparant de ma main.

—  Attention, tu risques de te blesser.

Je me relève puis renverse le contenu de mon sac sur la table de la cuisine. Un paquet de mouchoirs, les débris de mon téléphone, mon portefeuille, une paire de ballerines de rechange et ce maudit papier coloré scintillant que je reconnais. Je l'ai vu quelques heures plus tôt, à l'intérieur de la maison de Maribel.

C'était au moment où Pia le tendait à Maribel. Je l'ai vu une nouvelle fois quand Pia m'a expliqué qu'il valait mieux le cacher pour que sa cousine ne le trouve pas.

—  Pourquoi dans mon sac et pas dans le tien ? lui dis-je, dépitée.

—  Le paquet ne rentrait pas dans ma pochette.  

Je n'ai aucune idée de ce qui m'attend, mais un seul moyen de le savoir.

Je déchire le papier cadeau, ouvre la boite et examine les morceaux de verre brisé. Là, au milieu d'un bonhomme de neige immaculé et de multiples paillettes dorées, au milieu de tout ce qui constituait cette fichue boule à neige que Pia voulait offrir à Maribel, un petit parchemin beige.

Je l'attrape, le déplie et le lis puis le replie.

Cette fin d'année sera mémorable.

Merci Pia.

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⏰ Dernière mise à jour : Dec 16, 2017 ⏰

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Les vingt-trois joyeux anniversaires de PiaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant