Carreaux de ciment

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Cet idiot de pompier qui se moque de nous depuis tout à l'heure a raison. La solution du propriétaire ne nous convient absolument pas. Qui voudrait dormir dans un mobil-home, en plein milieu d'un champ gelé ? Pense-t-il, vraiment, que deux jeunes filles de moins de trente ans, citadines jusqu'au bout des ongles, vont accepter ?

Dépitées, nous refusons poliment l'offre de l'hôtelier, mais je prends quand même son numéro, et nous décidons de nous rendre chez Maribel. Nous n'arrivons pas à consulter internet sur nos téléphones, impossible, donc, de rechercher une autre location. Nous devions rejoindre Maribel ce soir, de toute façon. Tant pis si notre venue ne lui fait pas plaisir, sans elle, nous ne risquons pas de dénicher un logement pour cette nuit.

— Tu paries que sa maison possède au moins mille chambres ? grommelle Pia qui a retrouvé le volant de sa voiture.

— Mille chambres accaparées par les mille membres de la famille de son fiancé.

— Je vois que tu es de la même humeur que moi.

Je hausse les épaules et me contente d'observer les paysages campagnards qui défilent devant moi. J'ai toujours trouvé cela étonnant que Maribel vienne s'installer ici, elle qui détestait tout ce qui ressemblait à une vache ou à un tracteur. Sa vie, c'était le shopping. Comme quoi, l'amour peut nous faire changer d'avis. Et, l'héritage colossal que son cher et tendre a touché à la mort de ses grands-parents, aussi.

— Elle va nous jeter dehors, tu vas voir.

Je n'ose pas répondre, persuadée, pour une fois, qu'elle a raison. Sa campagne anti-Maribel commence à fonctionner.

Sa voiture longe ce qui ressemble à un château, puis à l'arrière de celui-ci, nous découvrons une maison plus petite, mais de taille plus que raisonnable.

— Je te parie que Maxime possède le manoir et que les gardiens ou les domestiques louent la maison.

— Non, tu te trompes, lui fais-je, en soupirant. Les domestiques qui s'occupent des gardiens louent la maison et les gardiens habitent le château.

Elle me regarde puis éclate de rire.

— Oui, en fait, le village entier doit leur appartenir.

Sa petite Fiat s'engouffre dans l'allée vaste qui mène à la résidence et, une fois garée devant, la voiture de Pia paraît encore plus minuscule.

La demeure, impressionnante bâtisse aux pierres de taille, surplombe un jardin arboré. Elle est composée de trois parties. La plus grande, celle du milieu, s'élève jusqu'à atteindre la cime des arbres plantés devant la maison. Je compte au moins deux étages entre le rez-de-chaussée et la lucarne située sous le toit orange. La construction est assez large; deux énormes baies vitrées entourent ce que je prends pour la porte d'entrée.

La partie plus à gauche, moins haute, s'étire sur le côté, jusqu'à atteindre le bout de la propriété. Une multitude de fenêtres sont alignées en un rang parfait. Peut-être, est-ce une salle de réception ou quelque chose comme ça ?

La dernière construction, à droite, ressemble à une ancienne étable. Ses lourdes portes bleues sont assorties aux châssis de toutes les fenêtres des trois bâtiments.

Je descends de la voiture, un peu intimidée par ce spectacle. Pia m'attend déjà en bas des escaliers qui mènent sous le porche de l'entrée. Quand je la rejoins, nous montons ensemble les marches. Je me stoppe une fois en haut. Nous atterrissons sur une terrasse pavée, entourée par un muret sculpté. De nombreux arbustes en pots décorent le balcon.

— C'est...

— Canon, dis-je avant que mon amie ne trouve à critiquer ce qui ne peut pas l'être.

Les vingt-trois joyeux anniversaires de PiaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant