Leçon n°63

Depuis le début
                                    

Y a pas très longtemps on m'a dis :
<< Respecte ceux qui te respectent >>

J'avais pas bien compris, j'croyais qu'on me parlait de politesse et toutes ces conneries inutiles mais pas du tout. Là j'ai bien compris le sens, mais à quel prix ?

On accorde de l'importance à des gens qui en ont littéralement rien à foutre de nous, qui vont jamais se dire " Tiens comment tu vas aujourd'hui ? ", qui cherchent pas après nous, alors que y a certaines personnes qui ont toujours toujours été à vos côtés mais tellement on a été habitué à eux et qu'on les a pris pour acquis, ils sont dans l'ombre. On les voit même pas.

De toute façon ainsi est la nature humaine : ingrate.

On se rend compte de ce qu'on avait que lorsqu'on l'a perdu.

[...] Je la regarde derrière cette vitre, ma respiration est saccadée. Je lutte pour retenir mes larmes, j'pense que sa mère a pas besoin de gérer une crise alors qu'elle même est au plus bas.

Elle est amaigrie et pâle, ouais même si elle est noire j'peux quand même voir qu'elle est pâle, sa peau est terne. On dirait presque qu'elle est morte.

Ça me brise de partout de la voir comme ça, j'ai l'impression de revivre l'histoire de Fares. Déjà que j'ai eu du mal à me remettre de la mort de Fares alors que je le connaissais que depuis quelques mois, comment je vais réagir si Adah, ma shab depuis des années part elle aussi ?

Je prends sa mère dans mes bras et lui dis que je vais voir mon père, que je repasserai demain.

Je laisse ma voiture garée sur le parking de l'hôpital, je me sens pas de conduire, même si jusqu'à demain je vais en avoir pour au moins trente balles de parking.

Je passe au moins deux heures dans les transports, tellement j'étais à l'ouest j'ai même raté ma station.

Je marche dans les rues comme un zombie, comme si j'avais vu la faucheuse alors que c'est peut-être ma Titi qui va la rencontrer.

Je rentre chez mon père et vais m'enfermer directement dans les toilettes. Je m'assois sur la cuvette, dans le noir.

Après une heure je sors des toilettes et vais me laver mes mains même si j'ai rien fais.

Memed : Alors ?

Je le regarde et mes yeux deviennent flous d'un coup. Je me tiens au mur et glisse sur le sol.
Mon père vient immédiatement s'accroupir à côté de moi et me prend dans ses bras comme quand j'étais petite.

Moi : Elle... elle.. va partir. Je l'ai vu, je le sais... Elle va s'en aller pour de bon.

J'me suis mangée une gifle, j'ai rien compris. J'regarde Memed, choquée.

Lui sourcils froncés : T'es Allah ?

Moi : Non astaghfiruAllah.

Lui : Bha voilà, elle va s'en aller nul part. Y a que Rabbi qui sait. S'Il veut Il peut encore la garder sur cette Terre.

Ça m'a fait un choque. Il a raison. Je pleure comme si elle était déjà morte alors que nan.

Il part et reviens en me jettant un tapis de prière à mes pieds.

Lui : Pleurer ça va servir à rien sauf te faire mal à la tête. Tout c'que tu peux faire c'est prier et invoquer pour elle.

Je prends mon tapis dans mes mains. Ça fait combien de temps depuis la dernière fois que j'ai prié ? J'ai honte de moi.

J'me sens hypocrite et mal d'attendre qu'il y a quelque chose de grave pour enfin penser à mon seigneur et prier. Mais mieux vaut tard que jamais, non ?

[...] Je déambule dans les couloirs, sans but ni direction.

Ça sert à rien de venir à l'hôpital, on peut même pas rentrer dans sa chambre, mais je sais pas j'me sens obligée. Comme si elle pouvait sentir que j'suis la pour elle.

Son frère jumeau la surveille, comme si elle pouvait partir ou j'sais pas... Moi ça me tue plus qu'autre chose de la voir dans ce contrôle.

Je fais les cents pas quand je relève ma tête et vois quelque chose que j'aurai préféré pas voir.

Pourquoi sur une cinquantaine d'hôpitaux en Île-de-France faut que j'tombe sur eux ici ?

Soraya dans une chaise roulante avec un bébé dans les bras... et Aymen.

[Leçon n°63 : On prend tout pour acquis et on oublie qu'on est rien dans cette dûnya qu'un jour ou l'autre on retournera forcément à Allah. ]

| À Suivre, To be Continued... |

Code de la rue : Survivre à MarseilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant