AFRAID • ahs; murder house

dix-huit » tombe, ange, tombe

- Je peux vous aider ? Lance un trentenaire lorsque sa vitre fut baissée.

J'allais répliquer un non ferme, mais quelques gouttes tombent sur mon front. Encore une de ces pluies agaçantes typiques de ce côté du pays. Mes genoux se détachent du sol et je me dirige vers la bagnole, cet homme au sourire éblouissant et aux airs friqués me regarde de haut en bas.
Je le laisse me mater car je veux être présentable devant ma famille.

- Euh, oui, si ça ne vous gêne pas. J'aimerais être à Seattle très rapidement.

Le blond hoche la tête sans dévier son regard de mon bassin. Je m'assois, le sac sur mes cuisses et les cheveux humides, je reste froide et impassible.

- Je dois aussi aller à Seattle, quelle coïncidence!

Il pouffe tandis que j'esquisse un sourire gêné.

- Vous y retrouvez quelqu'un ?

Sa voix brise le silence et en même temps le fil de mes songes. Je tourne mon menton vers lui, et décide de ne pas mentir :

- Ma famille. Je ne l'ai pas revu depuis longtemps, ses lèvres s'étirent et ses yeux ne me fixent que quelques secondes pour se concentrer sur la route. Et vous ?

- Un mariage.

- Le vôtre ?

Je sens qu ma question trop curieuse le dérange vu son silence, alors je dirige mon corps et pose ma joue contre la vitre glacée. La pluie tombe et fait des ravages, d'habitude j'aime contempler ce paysage pourtant cette fois-ci, j'aurais souhaité un soleil radieux pour des retrouvailles.

- Pas le mien.(Le blond se mord la lèvre avant de continuer :) J'ai vu celle qui m'était destinée autrefois dans les bras d'un autre. Je les ai surpris aux rendez-vous romantiques, au lit. Et maintenant, cette soi-disant âme sœur m'invite à son mariage.

- Je suis désolée pour vous.

Je me retourne vers lui, cet inconnu qui déballe son sac. Et sa peine étouffée, ses larmes retenues, cette haine enfouie, cet passion me donnent envie d'être à nouveau quelque chose d'humain.
Le seul sentiment qui peut m'envahir, c'est la colère. Elle ne se caractérise pas seulement avec des disputes, des mots ou des gifles. Je connais désormais cette émotion, dévastatrice. Et oui, j'en ai peur.

- Ne le soyez pas.(Il renifle et ravale sa salive, stressé.) Moi c'est Luc, et vous ?

-Nora. Vous êtes d'ici ?

- Non, je viens de très loin.(Je sais qu'il veut détourner le sujet donc je le laisse faire.) Vous avez un copain, un mari ?

Une image de Tate me revient et ma nostalgie prend le dessus. En plus de la colère de m'avoir créé, renaître en tant que bizarrerie surnaturelle. Cependant, son regard chaleureux, son sourire intense et sa présence rassurante lors de mes terrifiants cauchemars me font regretter d'être haineuse contre lui.

- Non, on vient de se séparer, dis-je sèchement, mon attention sur la route et la noirceur de la nuit.

- Navré, mais vous êtes jeunes, et vous avez l'air d'avoir un fort tempérament.(Il ralentit à la vue d'un feu rouge.)Quelqu'un vous aimera telle que vous êtes, Nora.

- Ça va être difficile, je ricane en fixant la mâchoire dessinée au millimètre près de Luc.

- J'en suis certain.