XXVIII) De l'autre côté de la porte silencieuse

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La discussion avec mon père me libéra d'un poids que je n'avais jusqu'à présent même pas conscience de porter. Désormais, je devais apprendre à me détacher de mon passé. Ma mère ne m'aimait pas, certes, mais cela n'impliquait pas que je n'étais pas digne d'être aimée.

Cette nuit-là, d'horribles cauchemars se succédèrent, comme quoi le cerveau travaille sans relâche. C'est donc la mine grise que je me rends au travail. Par chance, je ne croise personne au détour des couloirs et surtout pas mon patron. À l'heure du déjeuner, je quitte tardivement mon bureau, afin de ne pas me sentir obliger de partager le repas avec quelqu'un. Je picore sans envie dans mon assiette, quand mon portable me ramène à la réalité.

Bonjour ma chérie,

J'espère que tu te sens mieux.

Je quitte l'hôpital en début d'après-midi.

Millie vient me chercher et des infirmières me feront mes soins quotidiens à l'hôtel.

Tu me manques énormément.

Passe me voir ce soir, s'il te plaît.

Je t'aime.

Pff...C'est presque mieux ainsi, car je préfère rompre ailleurs que dans une chambre d'hôpital. Je sais que la douleur sera la même, mais ça me semble moins glauque. Que répondre à ce SMS ? À part :« OK, à ce soir ». Bon, 13 h 30, je n'ai quasiment rien dans le ventre, mais je dois retourner au bureau. De toute façon, j'ai guère d'appétit en ce moment. Comme j'aimerais avoir ce mélange d'amour et d'amitié que seul Théo peut m'apporter. Il me manque de façon viscérale et cela est amplifié par le manque de nouvel. J'ai essayé à plusieurs reprises de contacter sa maman, mais elle me répond sans cesse qu'une enquête est en cours et que pour l'instant, il reste sous les barreaux. Je sens bien à sa voix qu'elle est en colère contre moi. Elle doit sûrement penser que je suis à l'origine des soucis que traverse son fils et elle a peut-être raison en quelque sorte.

Les problèmes me collent à la peau et Théo est toujours le premier à intervenir pour me tirer des sales draps où je me fourre. Toutefois, sur ce coup, je n'arrive pas à trouver ce que les forces de l'ordre ont bien pu découvrir comme pièce à conviction chez lui. Plus je retourne cette histoire dans ma tête et plus je me dis que c'est un coup monté, mais par qui ? Et pourquoi ? Qui voudrait me nuire et qui voudrait nuire à Gabriel ? Je n'arrive à faire aucun lien dans cette affaire.

Déjà 18 h 00 ! Ma tête est prête à exploser. Je n'ai pas été professionnellement rentable cet après-midi. J'ai passé des heures à ruminer sur les charges retenues contre Théo.

***

Je suis devant le somptueux palace où réside Gabriel.

Je ne peux plus reculer. Je m'approche les jambes tremblantes des grandes portes de l'accueil. Je souffle un grand coup, les pousse et tombe nez à nez avec Marcus. Il est comme à son habitude, vêtu d'un costume gris, le visage fermé, bref, professionnel jusqu'au bout des ongles.

— Bonjour Mademoiselle Paola. Puis-je vous offrir un verre ?

Comment ? Monsieur le garde du corps draguerait-il la petite amie de son patron ? Cela m'étonne de sa part. Je le pensais dévoué corps et âme à Gabriel.

— Euh... J'ai rendez-vous avec Gabriel et je pense qu'il m'attend déjà.

En gros, si tu lis le sous-titrage, tu dois comprendre que je ne suis aucunement intéressée. Non mais !

Il réajuste sa cravate et insiste en me livrant la raison qui le pousse à vouloir me tenir compagnie.

— Monsieur Gabriel a insisté pour que j'interdise à toute personne de le déranger.

Non mais j'y crois pas ! Il m'invite et ensuite bloque l'accès à sa demeure. Je suis furax, toutefois je prends sur moi pour ne pas déverser ma rage sur ce pauvre homme. Après tout, il suit juste les consignes données.

— Marcus, vous n'êtes pas sans savoir que Gabriel souhaite me voir, quelle que soit l'heure du jour ou de la nuit. De plus, il sera très certainement fâché de savoir que vous m'avez interdit l'accès à sa chambre. Je ne suis pas une personne quelconque, n'est-ce pas ?

Je lui décoche un sourire malicieux afin qu'il pense que ma venue est du genre coquin.

Il est mal à l'aise. C'est un bon point pour moi. J'ai percé la carapace de la bête. Encore une petite couche d'arguments et elle va craqueler.

— C'est dommage, je vais devoir m'éclipser sans même lui annoncer la réponse à une question qui lui tient beaucoup à cœur.

Je me sens minable sur ce coup bas, mais à situation perdue, solution crapuleuse.

Ses yeux s'écarquillent. Il comprend que je parle de la demande en mariage de Gabriel. L'animal courbe l'échine, grogne un peu, mais capitule pour finir.

— Bien. Montez.

Je le gratifie d'un grand sourire de vainqueur, avant de m'engouffrer dans l'ascenseur.

Courage ma belle. Tu es devant sa porte maintenant, alors pas question de rebrousser chemin. Tu dois l'affronter, même si c'est pour le blesser profondément.

Mon corps s'affole. Mon cœur tambourine, mes mains sont moites, ma respiration s'accélère et plus que tout, j'ai envie de pleurer. Ce que je m'apprête à faire me demande un effort surhumain. Je pose mes doigts sur mes joues pour essuyer les larmes qui roulent sans que je ne puisse les contenir. Je me sens prise au piège, comme debout devant le siège du dentiste quand j'avais huit ans. Ce dernier devait m'extraire une dent à cause d'un brossage pas suffisamment rigoureux. Pourquoi je pensais à ce désagréable souvenir en ce moment ? Peut-être parce que je suis autant terrorisée à l'idée de rompre que d'affronter ma phobie des chirurgiens-dentistes. Malgré tout, je frappe fébrilement à la porte.

J'attends.

Pas de réponse.

Je frappe plus fort cette fois-ci.

Toujours rien. C'est bizarre. Une idée saugrenue me vient alors à l'esprit. Non...il ne serait pas en train de... Non...

Je dois savoir s'il se trouve seul dans cette chambre.

Je compose le code d'accès, ouvre discrètement la porte et pénètre comme une petite souris fouineuse. Personne n'est présent apparemment. Puis, un bruit de verre brisé me fait sursauter.

— Ne bouge pas salope !

Cette phrase me projette dans une autre dimension.

Elle déboule en trombe face à moi et pointe son arme droit sur moi. Je suis estomaquée, sidérée, liquéfiée je dirais même. Je n'arrive pas à demander quoi que ce soit, je lui offre juste un air ahuri.

— Non, je t'en prie. Ne lui fait aucun mal. Elle n'a rien à voir dans tout ça. Laisse-la partir. Je ferai tout ce que tu veux, mais par pitié épargne-la.

C'est Gabriel ! Sa voix est faible et tellement suppliante à mon égard. Le son semble venir de la salle de bains.

Qu'est-ce que c'est que tout ce cirque ?

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Coucou

Avec une fin de chapitre pareille, mieux vaut que je sorte cagoulée de chez moi ! Mdr :D

Alors, qu'en pensez-vous ?

Bisous

Entrée dans la nuit (Terminé ) (Protégé par copyright)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant