Hinata

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Hinata n’était pas un idiot. Et parfois, il aurait préféré l’être, pouvoir ignorer, pouvoir faire que les choses lui passent au-dessus de la tête et ne l’atteignent pas. Mais ce n’était pas le cas.

Il aurait voulu dire qu’il n’avait pas senti l’odeur sucrée typique en rentrant chez lui le dimanche, que Tobio ignorait, sûrement trop habitué à elle. Il aurait voulu dire que ses doutes étaient infondés, et qu’il n’avait pas vérifié les quantités de nourriture, d’où –à moins que Tobio ait mangé comme deux- il tirait des conclusions inquiétantes. Il aurait voulu dire avoir confiance en Kageyama.

Il n’avait fait semblant de rien. A croire que les derniers événements avaient accru sa capacité à mentir à Kageyama, mais malheureusement pas à lui-même. Il sentait la douleur vivace, la peine qui ne voulait pas s’en aller, et les plaies, dans sa poitrine, que personne ne voyait. Tobio aurait dû les voir, il aurait dû comprendre, il était censé le connaître mieux que personne, mais Hinata était là, terriblement seul. Seul face à son petit ami. Et l’amant de celui-ci.

Hinata ne savait pas comment il avait réussi à être crédible, mais Tobio semblait tout rater de sa souffrance. Lui était radieux, trop, et Shouyou n’en savait que trop bien la cause. Les choses ne s’arrangèrent pas quand, le soir, Yachi lui envoya un sms pour lui dire qu’elle devait lui parler d’urgence. Ils convinrent de se voir le mercredi après-midi, puisqu’elle se refusait à expliquer par sms et qu’elle habitait tout de même à une certaine distance de chez eux. Hinata redouta de laisser Tobio seul, mais il se résigna. Il abandonna. Que pouvait-il faire ? Il avait tout essayé. Tout ce qui lui restait était la faible consolation d’être encore son petit ami officiel.

Jusqu’au mercredi, il ne put qu’imaginer ce que les murs de l’appartement avaient vu durant le week-end. Oikawa avait mangé ici, il avait dû y passer la nuit. Ce qui signifiait que ce n’était plus seulement une affaire de cul… Hinata resta affligé, presque apathique, tout le temps où il était sûr que Tobio ne pouvait le voir. Il se perdait dans la contemplation d’un objet quelconque, ses pensées dérivaient, et sans qu’il ne s’en rende compte, quand il revenait à lui, ses yeux étaient noyés de larmes. Il les essuyait, d’un geste lent. Ni le désespoir ni la colère ne le prenaient plus, violents et irrépressibles. Juste un vide, immense et qu’il ne pouvait remplir, qui annihilait sa volonté et ses émotions.

Le mercredi, Yachi sembla la première se rendre compte de son état. Elle l’assit à côté d’elle, lui servit une boisson chaude et le regarda, quelques minutes, sans un mot.

-Tu sais ? murmura-t-elle.

Hinata hocha la tête, un semblant d’intérêt le prit.

-Comment tu le sais, toi ?

Yachi se trémoussa, gênée. Plus que gênée, même, elle était désolée, désolée pour lui. Hinata se dit qu’il devait faire pitié. Yachi baissa la tête et ses cheveux dorés se balancèrent quelques instants avant qu’elle ne bégaye :

-Je, euh, je gardais ma petite cousine et j’étais avec elle au parc ce week-end et…

Elle se mordit les lèvres.

-Ils étaient là, ensemble. Je veux dire, j’étais pas sûre…Mais ça ne pouvait pas être… Il y avait ce capitaine de Seijôh et…et Tobio.

Hinata ferma les paupières très fort et elle s’interrompit.

-Continue.

Il entendait les trémolos dans la voix de Yachi, il sentait chacun de ses mots s’enfoncer dans son cœur comme des poignards, mais la curiosité morbide le dominait, l’obligeait à regarder l’immonde vérité.

Des Coeurs et des CorpsWhere stories live. Discover now